Rempart anti-Idy : Le Pm est-il à la hauteur de ses nouvelles fonctions ?

Dans la conception négro-africaine de la communication d’État, le président de la République reste ce roi que le prestige de son trône dispense de débattre avec ses opposants. Mais quand la vie politique est bipolarisée, la voix du Premier ministre n’a pas assez de résonance pour voler au secours du chef. Sous Abdou Diouf, Habib Thiam s’est rendu impopulaire en voulant se poser en alter ego de Wade à la place du président. Abdallah Dionne, qui s’interpose dans un duel à mort déclenché sous le nom de code 4444, est-il le meilleur antagoniste capable de résister à « l’ex-patron » de son patron ?


 
Depuis quelque temps, le Premier ministre semble troquer son costume de technocrate introverti dans le secret de son cabinet contre le gilet pare-balles du commandant sur le théâtre des opérations. Cela, pour essayer de contenir les attaques de Idrissa Seck contre Macky Sall. La tâche requiert de solides références en sophisme et en sadisme. Il manque à Boune Abdallah Dionne la faconde de Mimi Touré, nourrie aux mamelles de la culture révolutionnaire. 

Le pape du Sopi, qui savait, parmi ses collaborateurs, distinguer les moutons des lions, procédait, parfois, à un dédoublement fonctionnel en déléguant la communication politique à un militant zélé quand le chef du gouvernement est un technocrate de la trempe de Aguibou Soumaré. On se rappelle que pendant tout ce temps que ce dernier a été Pm, c’était le directeur de cabinet politique, Babacar Gaye, qui répondait à l’opposition. C’est d’ailleurs, en reconnaissance de ses hauts faits d’armes que celui-ci est devenu porte-parole du Pds depuis lors. 

Mieux, à la différence de Macky Sall, Wade est un tribun hors-pair qui aimait se passer de ses « Soukh ». Le meilleur porte-parole du leader sopiste face à ses détracteurs était Wade lui-même. 

L’actuel président de la République, à l’image de Abdou Diouf, n’est pas habitué au « tessanté » à la sénégalaise. C’est pourquoi il envoie son Premier ministre au charbon. Cependant, même avec le successeur de Léopold Sédar Senghor, feu Habib Thiam, qui n’a jamais été un habile politicien, s’était rendu impopulaire en voulant mener le combat contre l’opposition « Par Devoir et par Amitié » (titre de ses mémoires). Qui ne se souvient des huées que Thiam avait essuyées au stade de l’Amitié, quand un jour de la très politique 1993, il était venu présider l’édition d’une finale de la Coupe du Sénégal entre le Jaraaf de Dakar et la Linguère de St-Louis ? 

Abdallah Dionne, dont la qualité de militant de l’Apr n’a été connue par le Sénégalais lambda qu’avec sa nomination au poste de Pm, réussira difficilement à assumer sa nouvelle mission politique qui est pourtant détachable de ses fonctions administratives. Tête de liste de Benno Bokk Yakaar aux dernières législatives, il n’a pas su profiter de cette posture pour s’imposer comme le numéro 2 du parti au pouvoir.

Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse ! Dionne risque de se retrouver dans le viseur d’une opposition capable de manipuler des armes de destruction massive et non conventionnelles. Ce qui retient les adversaires de Macky, c’est autant le souci de l’épargner pour des raisons purement d’ordre sentimental que la nécessité de focaliser leur énergie sur leur haute cible. Avec Abdoul Mbaye, dont le valeureux père feu Kéba n’était pas épargné, le Pds n’avait pas hésité à exhumer l’affaire supposée du blanchiment de l’argent de Hissène Habré.

C’est dire que l’Apr semble être victime de sa « structuration horizontale » qui la prive d’un second couteau capable d’endiguer les assauts de Idy. En définitive, il est légitime de se demander si Abdallah Dionne peut combler ce vide sans y laisser des plumes.
Mardi 27 Février 2018




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