C1: chaos autour du Stade de France, des intrus prêts à tout pour voir la finale




Chaos et frustrations: les forces de l'ordre ont été débordées, samedi aux abords du Stade de France à Paris, par l'afflux de dizaines de milliers de supporters et des tentatives d'intrusion de personnes sans billet, prêts à escalader des barrières pour assister à la finale de Ligue des champions Liverpool-Real Madrid.
"Je suis arrivé jusqu'aux escaliers (du stade), après un policier m'a ramené directement" en dehors de l'enceinte. Mais "je vais réessayer pour regarder le match, c'est mon rêve", expliquait vers 22H00 Yacine, 30 ans, tout juste refoulé du stade.
"Les places coûtaient 2.000 euros, jusqu'à 3.000. Si c'était 600 euros, j'en aurais pris une", ajoutait ce jeune homme ayant escaladé une première fois la barrière, se présentant comme chauffeur de profession.
Cette pagaille a contraint les organisateurs à retarder le coup d'envoi de plus de trente minutes et a considérablement frustré des spectateurs qui avaient payé leurs billets, mais ont manqué toute la première mi-temps.
"Ton billet ne passe pas", déclare ainsi un agent de sécurité à une jeune femme qui attend devant les grilles, sous les yeux d'une journaliste de l'AFP.
Cette femme n'est autre que la championne olympique 2016 de boxe Estelle Mossely. "Le billet ne passe pas, c'est n'importe quoi, ça fait une heure que j'attends", s'énerve-t-elle.
Elle pourra finalement entrer, quelques minutes avant la fin de la première mi-temps.
A l'entrée où ont surtout afflué des supporters de Liverpool, un agent de sécurité, sous couvert de l'anonymat, a avancé une explication: "Le problème c'est qu'il y avait trop de faux billets. Soit en papier soit sur téléphone. Ça ressemblait aux vrais billets mais ça ne passait pas sur le lecteur."

- Intrusions -

Tout avait pourtant débuté dans une ambiance festive et très bon enfant, sous le grand soleil d'un Paris printanier: habillés des maillots des "Reds" ou de tuniques blanches madrilènes, des dizaines de milliers de supporters déferlaient tranquillement dans la capitale française, invités à rejoindre des "fan-zones" distinctes.
Mais à moins d'une demi-heure du début du match, l'ambiance s'est tendue quand au moins un millier de supporters ont été ralentis avant de pouvoir entrer, contenus par les gendarmes. Enervés, ils criaient "open the gate ("ouvrez le portail"), alors que les supporters ne pouvaient passer qu'un à un.
Puis de véritables intrusions ont mis à mal le dispositif.
"La police intervient pour repousser les tentatives d'intrusions dans le stade", reconnaissait la Préfecture de police de Paris vers 21H15. Des gaz lacrymogènes commençaient à être lancés pour empêcher quelques dizaines de jeunes d'escalader agilement les barrières, a constaté une journaliste de l'AFP.
Agents de sécurité et gendarmes se lançaient à leur poursuite, pour les faire aussitôt ressortir. "C'est très mal organisé", lâchait anonymement un agent de sécurité.
Ce jeu du chat et de la souris s'est poursuivi, même une fois le match commencé. Et peu avant 22H00, les forces de l'ordre ont dû charger, en faisant usage de gaz lacrymogènes, provoquant un mouvement de foule.
"Ce sont des personnes qui essaient de rentrer dans le stade et de voler des places", a expliqué anonymement à l'AFP un policier municipal.
De quoi mettre en colère des supporters de Liverpool, restés dehors, bien que munis de billets: "Nous étions ici deux heures avant le début du match, nous n'avons aucune idée de pourquoi nous étions bloqués. Je suis sérieusement agacé mais nous avons gardé notre sang-froid", a raconté anonymement à l'AFP l'un d'eux, pendant qu'un autre "fan" de Liverpool se plaignait que "des Français essaient d'entrer".
La finale initialement prévue à Saint-Pétersbourg avait été délocalisée au Stade de France, à la suite de l'invasion russe de l'Ukraine le 24 février. Mais les autorités n'ont bénéficié que de trois mois pour préparer l'événement au lieu de dix-huit, délai prévu dans le cahier des charges de l'UEFA.

- 6.800 policiers -

Par précaution, la Préfecture de police avait déployé 6.800 policiers, gendarmes et pompiers.
Car Paris n'avait pas vu autant de supporters de football depuis l'Euro-2016, dont 20.000 "fans" des Reds détenteurs d'un billet pour la finale, le même contingent que celui attribué à Madrid.
Marqués au fer rouge par le drame du Heysel en Belgique - 39 morts en 1985 - les supporters de Liverpool n'ont aujourd'hui plus une réputation de hooligans vraiment problématiques.
Quelque 6.000 supporters du Real Madrid ont été invités à se rassembler non loin du Stade, dans un parc à Saint-Denis, tandis qu'une marée rouge compacte d'au moins 30.000 supporters de Liverpool, sans billets, avait investi une zone spécialement aménagée sur une avenue de l'est de Paris.
Dans l'après-midi, la Place de la Nation s'est ainsi retrouvée nimbée de fumée rouge et submergée par les chants, dans la plus pure tradition du mythique stade d'Anfield de Liverpool.
Au pied de la statue "Le triomphe de la République", en fin d'après-midi, Richie Stuart de Liverpool et ses amis avaient acheté 70 bouteilles de bière censées les porter jusqu'à la victoire... "Les doigts croisés, parce qu'avec le soleil, l'alcool et une défaite, ça pourrait tourner vinaigre très vite", admettait ce supporter.
Samedi 28 Mai 2022




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