Au procès de l'ex-président français Sarkozy, débats sur un mystérieux enregistrement de Kadhafi


Une expertise "nécessaire" pour la défense, un "effet d'audience" pour le parquet: au procès de l'ex-président français Nicolas Sarkozy, le tribunal a débattu mercredi d'un enregistrement envoyé anonymement aux avocats de Nicolas Sarkozy, qui serait une conversation de 2007 entre lui et Mouammar Kadhafi concernant l'ONU.

Après avoir commencé à interroger son directeur de campagne de l'époque Claude Guéant sur la vente pour 500.000 euros de deux tableaux en 2008, considérée comme fictive par l'accusation, le tribunal est revenu sur ce sujet.

Si plusieurs personnes ont dit pendant l'instruction que le dictateur libyen  enregistrait ses conversations, aucune bande n'a jamais été versée dans l'épais dossier des soupçons de financement libyen de la campagne électorale de M. Sarkozy , sur lequel se penche le tribunal depuis le 6 janvier et jusqu'au 10 avril.

Selon les avocats de l'ancien chef de l'Etat, cet enregistrement leur est parvenu le 16 janvier par mail.

Dans le corps du courriel, la "source" anonyme soutient qu'il existe "une personne" pouvant "démontrer" que Nicolas Sarkozy est "l'objet d'un complot" et que la note libyenne, révélée en 2012 par le média d'investigation Mediapart, a été falsifiée.

Une longue enquête pour "faux" concernant ce document s'était pourtant soldée par un non-lieu, définitif depuis 2019.

Pour "prouver" son "sérieux", l'expéditeur joint un "exemple d'enregistrement en (sa) possession", "volontairement neutre". Deux hommes qui semblent être Mouammar Kadhafi et Nicolas Sarkozy y parlent de la place de l'Afrique à l'ONU.

Aucune mention d'un financement donc, mais l'enregistrement est "essentiel" pour la défense qui demande à l'"authentifier".

Revenu à l'audience pour s'exprimer sur un autre sujet, Nicolas Sarkozy abonde.

"Madame, j'ai reconnu ma voix à 100%. Madame, j'ai reconnu la voix de l'interprète et Madame, j'ai souvenir du sujet évoqué", déclare-t-il avec emphase à l'attention de la présidente. "Est-ce que ça a lieu en Libye ou à Paris, je ne peux pas dire. Mais c'est sûr que c'est en 2007 parce qu'il m'appelle +M. le président+".

"C'est la preuve de ce que je savais sans pouvoir le démontrer. Que les archives n'avaient pas été détruites, que (Mouammar Kadhafi) enregistrait tout", ajoute-t-il, assurant: "s'ils avaient un audio qui puisse me compromettre, ça fait bien longtemps qu'on l'aurait".


- "Manipulation" -

Le procureur Quentin Dandoy explique que le parquet financier est d'accord pour verser l'enregistrement dans les débats, mais qu'il s'oppose à la demande d'expertise.

Faute d'avoir "l'original" et compte tenu de la nature et de l'ancienneté de l'enregistrement, "on obtiendrait après plusieurs mois d'expertise rien de mieux qu'un pourcentage, une probabilité, une estimation au mieux", fait-il valoir.

Et "sur le fond-même du dossier" c'est-à-dire un possible financement libyen de la campagne 2007, "cela n'apporte absolument rien !", poursuit-il, fustigeant l'attitude de la défense qui "a fait le choix délibéré de la mise en scène plutôt que de la loyauté et de la transparence".

"Pourquoi a-t-elle attendu un mois ?" lance-t-il. "Pourquoi faire jouer cet enregistrement à la dernière minute du dernier interrogatoire de Nicolas Sarkozy sur le pacte de corruption ? Nous avons l'impression que vous êtes dans la recherche d'un effet d'audience, d'une démarche stratégique pure".

"Là où nous vous rejoignons, c'est qu'il existe un risque majeur et évident de manipulation du tribunal" de la part de cette expéditeur anonyme, conclut-il.

Le tribunal tranchera jeudi.
Mercredi 19 Février 2025
Dakaractu



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