Téléphonie : Les forces et faiblesses de Free, selon le Dr Abdou Khadre Lo, Directeur Afrique du cabinet Access Partnership

Le secteur des télécommunications a été un peu secoué mardi dernier, du fait de l’entrée en scène de la nouvelle marque Free en remplacement de Tigo. Alors que sur les réseaux sociaux et les places publiques, les populations étaient divisées sur la question, l’on a pensé interroger quelques spécialistes des télécoms. Ce, pour voir les forces et faiblesses de ce produit qui suscite moult interrogations et anime les passions. Le Dr Abdou Khadre Lo, directeur Afrique du cabinet Anglo-Americain Access Partnership, a répondu aux questions de Dakaractu. Il est par ailleurs, membre de l’Union africaine des télécommunications (Uat) et de l’Union internationale des télécommunications (Uit).


Téléphonie : Les forces et faiblesses de Free, selon le Dr Abdou Khadre Lo, Directeur Afrique du cabinet Access Partnership
Globalement comment appréhendez-vous l’arrivée de Free sur le marché sénégalais ?
 
L’arrivée de Free est de toute façon positive parce qu’elle booste le secteur avec une concurrence qui sera accrue et certainement plus qualitative. D’autant plus que le Consortium est constitué de Free (France), Teylium (Sénégal) et Axion (Madagascar). Donc 3 acteurs avec une certaine expérience dans le domaine. N’oublions pas que Yerim Sow (Teylium) a démarré par la téléphonie.
 
Est-ce un opérateur qui pourrait chambouler le secteur de la téléphonie/internet ?
 
C’est fort possible. Parce que Free a la réputation de casser les prix et d’avoir une stratégie marketing et tarifaire très agressive. L’offre sur laquelle ils ont abondamment communiqué pour démarrer le montre, si besoin en était. Avec 6 000 F Cfa, ils proposent un bundle comprenant 800 mn tous réseaux + 10 Go (3G), +10 Go (4G) +WhatsApp gratuit valable 30 jours. C’est extrêmement alléchant. Reste à savoir ce qu’en diront les autres opérateurs et l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp), en terme de conformité. Est-ce réaliste? Free vendra-t-il à perte? Ce sont des questions qui devront trouver des réponses.
 
On a vu dans les réseaux sociaux, beaucoup de sénégalais qui émettent des réserves concernant ce nouveau produit (Free). Si l’on prend en compte le fait que Orange gère une importante part de marché au Sénégal, croyez-vous aux chances de Free de tenir la tête hors de l’eau pendant longtemps ?
 
Tout d’abord les 2 autres “gros” opérateurs avaient déjà la tête hors de l’eau. Orange s’est certes taillée la plus grosse part, mais les autres ne sont pas en faillite non plus. Après, le nouveau Consortium va apporter certainement plus de dynamisme dans le secteur du fait de la qualité des acteurs.
 
À votre avis, quelles seraient les forces et faiblesses de Free à l’état actuel ? 
 
Free a cette force extraordinaire qui consiste à être extrêmement compétitif sur les prix. En France, ils sont arrivés sur le marché, en 2007, comme 4ème opérateur, mais aujourd’hui ils sont classés 2ème en terme d’expérience/satisfaction client. Derrière Orange mais devant Bouygues et Sfr. Maintenant ils sont derniers en terme de couverture et de débit, derrière les 3 précités.
 
Il est apparu que vous disiez, dans un de vos post que j’ai pu lire, que l'arrivée de Free sur le marché pourrait radicalement changer la donne dans le secteur des opérateurs de réseau mobile au Sénégal. Sur quoi vous fondez-vous pour dire cela ?
 
D’abord parce qu’en 18 mois, Free (le Consortium) a déployé 1 600 km de fibre et 400 sites. C’est vraiment intéressant dans ce sens que cela va compléter l’offre d’Orange en la matière. Il y a donc une amélioration des infrastructures. Ensuite parce qu’ils vont se fonder sur leur expérience (notamment en matière de data) aussi bien en France que dans d’autres pays pour appliquer les mêmes recettes au Sénégal. Ils vont amener les autres à revoir leurs grilles. Au final, le consommateur peut y gagner, si la qualité de service est également au rendez-vous. Et ça, c’est du ressort du régulateur qui doit s’assurer que la promesse correspond à l’offre réelle et que les règles du marché sont respectées. Par exemple, la loi interdit de vendre à perte.
 
Nous avons aussi noté la présence d’une société de téléphonie typiquement sénégalaise à Matam. Qu’est ce qui explique qu’elle n’est pas trop connue ? 
 
Effectivement, il s’agit de Hayo (Csu) qui est le 4ème Mno (opérateur de réseau mobile) derrière Orange, Free et Expresso. C’est le seul opérateur à 100% sénégalais. Et nous gagnerions à ce qu’il survive dans cette jungle. Je pense qu’il faudrait revoir le cahier des charges et lui permettre de sortir de Matam pour offrir ses services sur l’ensemble du territoire. Je pense qu’il nous faut encourager les initiatives locales. Si on veut bâtir demain suffisamment de champions nationaux.
Mercredi 2 Octobre 2019




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