Ziguinchor : Les prouesses de Alioune Fall, un autodidacte, créateur d’un véhicule ‘’Made in Sénégal’’


Vouloir, c'est pouvoir! C'est le leitmotiv de ce sénégalais du nom d'Alioune Fall, un homme qui tend vers son demi-siècle d’existence sur terre. Établi à Ziguinchor où il tient un magasin de pièces détachées pour automobile, Aliou a eu une idée qui aurait semblé à  de l’utopie pour beaucoup. Mais lui, l'idée de fabriquer un véhicule lui a toujours caressé l'esprit. Avec ses employés, il s'est aussitôt engagé à relever ce grand défi même si ‘’c'est pour le fun’’. Les plans dessinés, le besoin en matériaux budgétisé, voilà Aliou et son équipe dans le vif du sujet. Des tôles et du fer de différents formats sont acquis pour les besoins de l’ouvrage.

Le châssis du véhicule ‘’Made in Sénégal’’ posé, l'équipe se voit pousser des ailes. Avec l'aide d'un soudeur grassement payé, les travaux s’accélèrent sous la supervision du maître d’œuvre. La devanture de son magasin est ainsi transformée en atelier de construction où des mains se relaient depuis maintenant plus six mois pour donner corps à ce projet. Un projet ‘’incroyable’’ comme on n'en voit pas tous les jours dans nos murs.

À mesure que les jours passent, la voiture prend forme. Les autres éléments constitutifs du véhicule sont soit achetés par le constructeur soit recyclés. Le moteur, celui d’une Golf, est récupéré. Mais contrairement à bon nombre de fabricants, Aliou Fall dit ‘’Badou’’ l’installe à l’arrière. ‘’J'ai voulu me démarquer pour créer de l'originalité, casser les codes actuels’’, a confié le constructeur de ce véhicule ‘’Made in Sénégal’’ qu’il a baptisé ‘’Modou Farmata Diagne’’, du nom de son oncle. Ce parent qui, depuis son plus jeune âge, veille sur son éducation, avoue t-il, comme pour lui rendre hommage.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, il dit avoir appris sur le tas. Ce serait même un don, dit-il. ‘’Je n'ai pas fait l'école française. Mais je suis issu  d'une famille qui a été l'une des premières au Sénégal à avoir un véhicule’’, fait savoir Aliou Fall qui évoque la possibilité d'une exploitation commerciale de sa création pour le bénéfice des Sénégalais. ‘’Peut-être pourrions-nous, à partir de cet échantillon, concevoir d'autres automobiles pour un usage purement local’’, a-t-il dit comme pour ouvrir une brèche d'exploitation future de sa ‘’marque de voiture’’.

Trouvé devant son magasin en train de faire les derniers réglages, sur ce véhicule aux allures d’une Jeep dont la fabrication est presque à terme, M. Fall annonce que son ‘’invention’ ‘’est capable d'assurer la desserte Ziguinchor-Dakar et de faire le tour du Sénégal’’. Pour étayer ses propos, il confie avoir déjà fait un test filmé dans les rues de Ziguinchor, alors que son véhicule était en pleine construction. À ce stade, il promet de présenter, à la fin de ses travaux, un produit plus performant et plus rayonnant. Oui, parce que la réussite est au bout de l’effort, croit-il dur comme fer.

Ce qui n’a pas été évoqué, dans cette affaire, c’est que Alioune Fall n’en est pas à sa première création. C’est lui-même qui l’a signalé. Pour preuve, c’est en 1997 qu’il dit avoir construit son premier véhicule avec télécommande et une réplique du bâteau le Joola. Par la suite, il dit avoir laissé tomber ses entreprises. ‘’C’est cette année que l’envie m’est revenue de construire un autre véhicule. J’entendais montrer à la face du monde que nous avons le savoir mais qu’il nous manquait juste les moyens nécessaires pour les matérialiser. Nous sommes nombreux dans ce pays à avoir ces idées ingénieuses. Cela fait 8 mois que j’ai commencé la construction. Mais à dire vrai, tout s’est passé dans un délai de 3 mois. J’avoue cependant que tout pouvait se faire au bout de 2 mois. J’ai aussi choisi d’installer le moteur à l’arrière du véhicule pour créer la différence’’, a confié Alioune.

Agé de 46 ans, il se dit capable de créer d’autres types de matériel roulant. Pour ce faire, il faut des moyens. Il avoue avoir dépensé plus d’un million de francs pour donner corps à son projet de réalisation d’un véhicule. Trouvé dans son garage, de retour d’un essai de son prototype, il sollicite l’aide de l’Etat pour obtenir les documents devant lui permettre de voyager avec son véhicule.

‘’Au Sénégal, on aspire au développement, on parle d’émergence, mais je crois que tout cela ne peut se faire sans de la créativité. Chez les Chinois, il n’est pas surprenant de modeler, pour près de 400 000 F, le moteur d’un engin qui aurait coûté au moins 30 millions’’, indique A. Fall.
Vendredi 29 Novembre 2019




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