Durant ces quarante années de crise et de guerre sans merci alimentées par des embuscades par-ci, des attaques par-là, des moments de détente ont toutefois été notés. Histoire de mettre autour de la table les belligérants de cette crise indépendantiste qui mine la Casamance depuis 1982 : l’État du Sénégal et le MFDC. C’est ainsi que plusieurs accords ont été signés entre ces deux camps. Des accords qui seront violés et les deux antagonistes s’accusant mutuellement de violer les termes des accords.
Les rivalités entre facilitateurs
En 1991, un groupe de ses collègues députés libéraux originaires de la Casamance sera soutenu par Me Wade, parmi lesquels Laye Diop Diatta, Moussa Diédhiou et Oumar Lamine Badji. C’est à Toubacouta, localité située dans le centre-est du pays, non loin de la frontière avec la Gambie que ce groupe mené par Marcel Bassène réussira à convaincre le MFDC de signer avec l’État sénégalais son tout premier accord en vue d’un cessez-le-feu. Suivront les Accords de Cacheu (en Guinée Bissau) le 31 mai 1991.Mais ces accords seront tous bafoués et il aura fallu reprendre les négociations. Mais ce groupe composés de fidèles de Me Wade a été combattu par des responsables du régime socialiste. Dès lors, Marcel Bassène vit ses prérogatives progressivement diminuées avec un partage de rôles avec Robert Sagna. Cette confusion a favorisé la reprise des hostilités. C'est seulement le retour de Me Wade dans le gouvernement en 1994, que le dossier retombe entre les mains des opposants. En 1995, Wade obtient la libération de tous les sympatisants du MFDC détenus à Dakar. Abdoulaye Bathily et Landing Savané qui connaissent bien les maquisards ont géré ce dossier. Mais ils ont laché à cause des yoyos de Diouf et les radicaux du PS.
Les accords de Banjul 1 et 2
En 1993, les rencontres de Banjul I, eurent lieu du 21 au 25 juin, avec pour objectif de « réunifier » le MFDC, écartelé entre différentes tendances rivales qui rendaient les négociations difficiles. C’est ainsi qu’un deuxième accord de cessez-le-feu verra le jour le 8 juillet 1993 entre l’État du Sénégal représenté par le ministre des Forces armées Madieng Khary Dieng et le MFDC représenté cette fois-ci par l’abbé Augustin Diamacoune Senghor.
Entre accords fantoches et assises fantômes
Le premier accord a été signé le jeudi 08 juillet 1993 entre le ministre de l’Intérieur d’alors, Djibo Ka, représenté par le gouverneur de la région de Ziguinchor. Mais le premier accord de cessez-le-feu a été signé le 31 mai 1991 à Cacheu (Guinée Bissau) suite à la trêve observée à l’issue des pourparlers de Toubacouta. Les termes de ce pacte renferment une loi d’amnistie et la libération des rebelles arrêtés. Cet accord, signé pendant que l’abbé Diamacoune était en prison, fera long feu puisque souffrant de légitimité d’une bonne partie du mouvement indépendantiste. Dans cet accord, il y avait aussi le retrait de l’armée de certaines de ses positions dans la zone. Cette accalmie a d’ailleurs été consolidée par le premier appel à la paix émis à l’époque par Sidy Badji, le fondateur de la branche armée Atika du Mfdc, le 30 septembre 1992. Cet appel faisait suite à la première marche pour la paix de la jeunesse de Ziguinchor suivie, quelques jours plus tard, du retour, à Ziguinchor, de l’abbé Augustin Diamacoune Senghor, après un séjour dans le maquis. Malheureusement, la violence va reprendre, avec notamment la disparition de 4 touristes français en avril 1995 dans le parc national de la Basse Casamance.
Ainsi, cet accord n’a pu être respecté parce que dans le camp de Cassolole, il y avait de l’électricité dans l’air entre Léopold Sagna et Ousmane Niantang Diatta qui est descendu sur leur lieutenant direct, Salif Sadio et César Atoute Badiate. C’est de là que la rébellion s’est disloquée en deux camps qui se regardent désormais en chiens de faïence. C’est à partir de là qu’il y a eu les attaques meurtrières de Badem, de Singhère, de Babonda en juillet 1995 (23 militaires tués), Mandina Mancagne en août 1997 (25 militaires tués) qui ont ravivé les hostilités…
Le ligne sale davantage sali hors du Sénégal
En juin 1999, le Mfdc tient à Banjul (Gambie) des assises inter-Mfdc pour ‘’laver le linge sale en famille’’ et resserrer ses rangs dans la perspective de négociations pour une paix définitive. Le 26 décembre 1999, le Mfdc se retrouve à nouveau en Gambie pour arrondir, définitivement, les angles en vue de faire face au gouvernement du Sénégal.
Il faut attendre 10 ans encore pour voir un autre accord signé le 24 mars 2001. C’est le président Abdoulaye Wade qui a réussi à pacifier cette crise. Une crise qu’il maîtrisait bien. La preuve, il a réussi à faire libérer des sympathisants et non des combattants du MFDC en 1994. Au pouvoir, il a démilitarisé le conflit permettant aux différents membres du MFDC de circuler sans être inquiétés par l’armée. C’est ainsi que l’Abbé Augustin Diamacoune Senghor qui était en résidence à Ziguinchor recevait de la visite avant son décès en 2004. Le 16 mars 2001, sous la conduite de Wade, l’abbé Diamacoune va signer un accord de paix avec l’État du Sénégal.
Autre date importante, le 10 mars 2010. César Atoute Badiate, le chef d’état-major du Front Sud a surpris tout le monde. Sa déclaration de paix était salutaire. : « Nous voulons des négociations maintenant.
Reprenant la balle au rebond, l’Etat du Sénégal répond favorablement. Sauf que le lieu des négociations posait problème. Le Premier ministre d’alors, Souleymane Ndéné Ndiaye, précise que l’État est fin prêt à négocier en terre sénégalaise avec le Mfdc, à Oussouye, à Ziguinchor ou à Foundiougne. La Casamance fait partie du Sénégal. Les négociations vont se tenir au Sénégal. Une condition mal vue dans le maquis qui avait posé comme condition : le retrait de l’armée sénégalaise le long de la frontière avec la Guinée-Bissau et l’organisation d’assises inter-Mfdc pour désigner les membres de leur délégation. Autre condition : que les négociations se tiennent dans un pays neutre. Profitant de la décrispation, Mamadou Nkrumah Sané va poser comme exigences la levée de son mandat d’arrêt ainsi que la remise de ses documents saisis sans oublier celle posée par Salif Sadio qui avait un mandat d'arrêt international posé sur sa tête.
Arrivée au pouvoir en 2012, le président Macky Sall s’ouvre en rassurant le MFDC qu’il est prêt à aller jusqu’au Groenland pour négocier. Son objectif, c’est la fin de cette crise qui n’a que trop duré. Une saisine acceptée par les différentes factions du MFDC qui ont accepté de se mettre autour de la table de négociation, même si Salif Sadio et ses acolytes campent sur leurs positions : l’indépendance de la Casamance. C’est ainsi qu’un accord est signé le 22 février 2014 à Sant’Egidio, relatif aux mesures de confiance réciproque. Les deux parties s’engagent à garder un comportement qui puisse favoriser les négociations pour le retour de la paix en Casamance. Il y a aussi la libre circulation des membres du Mfdc, dans le cadre des négociations de paix qui est exigée.
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