Professeur Souhaibou Ndongo, Chef du service de médecine interne Hôpital Dalal Diam : « Les difficultés liées au diagnostic précoce des maladies auto-immunes dans nos pays »

Dans le cadre de notre dossier sur les maladies auto-immunes au Sénégal, nous avons interviewé le Pr Souhaibou Ndongo. Le rhumatologue officie à l’hôpital Dalal Diam comme chef du service de médecine interne. C’est un service qui reçoit cette catégorie de malades.


Professeur Souhaibou Ndongo, Chef du service de médecine interne Hôpital Dalal Diam : « Les difficultés liées au diagnostic précoce des maladies auto-immunes dans nos pays »

Avec le coronavirus, les Sénégalais ont découvert les maladies auto-immunes. Si vous aviez à les présenter. Que diriez-vous ?

 

Les maladies auto-immunes sont des maladies liées à une perturbation du système immunitaire. En effet, en cas de maladies auto-immunes, le système immunitaire, outil majeur de protection de l’individu contre les infections en particulier, se met à attaquer cet individu en produisant des substances appelées anticorps dirigés contre les organes de cet individu. Il existe des formes limitées à un organe et des formes diffuses appelées maladies systémiques.

 

Quelles sont les difficultés pour des pays comme le Sénégal d'établir un diagnostic précoce pour les malades souffrant de ces formes de pathologie ?  

 

Il existe des difficultés diagnostiques en rapport avec :

 

-        Les modes de présentation des maladies auto-immunes : ces maladies sont souvent d’installation insidieuse avec des signes cliniques  non spécifiques qui peuvent être méconnus au début.

 

-        Les patients : qui, dans bien 

des cas, ne consultent pas dès les premiers symptômes considérés, à tort, comme « banals ». D’où l’intérêt d’une meilleure vulgarisation de ces affections.

 

-        Les modalités diagnostiques qui nécessitent généralement des examens immunologiques coûteux

 

-        Le nombre de spécialistes des ces affections qui est encore limité dans nos pays.

 

Quelles sont les formes observées au Sénégal et avez-vous une idée du nombre de personnes souffrant de ces maladies et du taux de létalité ?

 

Toutes les formes sont quasiment observées au Sénégal avec des fréquences hospitalières variables. La polyarthrite rhumatoïde, le lupus systémique et le syndrome de Sjögren sont plus rapportées dans ces séries hospitalières. Il y’a souvent beaucoup de comorbidités c’est à dire d’autres affections associées qui font que c’est difficile d’imputer totalement la létalité à la maladie auto-immune seulement.

 

Pourquoi les femmes sont plus touchées que les hommes ?

 

Il s’agit d’affections dues à plusieurs facteurs notamment génétiques, hormonaux, infectieux etc. Parmi les facteurs hormonaux par exemple, ceux de la femme comme l’œstrogène, entre autres facteurs, jouent un rôle non négligeable dans la survenue de ces affections.

 

Les maladies auto-immunes ont elles un traitement ? En guérit-on ? Sont-elles transmissibles ?

 

Oui les maladies auto-immunes se traitent et le plus tôt est le mieux ! On parle surtout de fenêtre d’opportunité c’est à dire la période à ne pas rater pour instaurer le traitement et prévenir ainsi les dommages tissulaires. On n’en guérit pas mais avec un traitement adapté, on arrive à juguler l’évolution de ces affections et permettre aux patients d’avoir une bonne qualité de vie. Elles sont non transmissibles cependant du fait des facteurs génétiques, il arrive qu’on observe des formes familiales.

 

Du fait qu'elles prennent l'hydroxychloroquine, sont-ils moins exposés que les autres au coronavirus ?

 

Les patients atteints de maladies auto-immunes sont fragiles du fait de leur type de maladie mais également de leur traitement en cours. Nous leur recommandons vivement de respecter les mesures barrières et d’éviter toute exposition.

 

À ce jour, on ne note pas une sensibilité plus élevée en terme de nombre de cas de coronavirus chez les patients atteints de maladies auto-immunes quel que soit le type de traitement en cours : hydroxychloroquine ou non. L’avenir nous dira si chez ce groupe de patients l’hydroxychloroquine aura été ou non un facteur protecteur par rapport à d’autres traitements. Je rappelle également que  toutes les maladies auto-immunes ne sont pas  traitées qu’avec de l’hydroxychloroquine. D’autres fois, il n’est d’ailleurs pas indiqué.

Vendredi 19 Juin 2020




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