Mali : est-on entré dans une nouvelle ère de l’insurrection djihadiste ?


Les forces armées maliennes ont fait l’objet d’attaques simultanées à Sévaré, Bapho et Niono. Ces assauts coordonnés avec l’utilisation de « véhicules kamikazes », selon un communiqué de l’État-major général des armées, ont fait au total 6 morts et 20 blessés. 

À Sévaré qui est la plus grande ville de la région de Mopti, dans le centre du Mali, les assaillants ont tué 6 soldats et ont perdu 11 des leurs, affirme l’armée malienne. Dans la région de Ségou, les camps de Bapho et de Niono ont été visés pour un bilan de 5 blessés, un hélicoptère et deux véhicules endommagés.

Ces actions complexes ont été officieusement revendiquées par la Katiba du Macina à travers un enregistrement audio dans lequel un orateur s’exprime en bambara et assure que les trois camps ont été « frappés » avec un intervalle de 5 minutes entre les attaques. « Nous disons à Assimi Goita et à ses hommes de se préparer. La guerre commence maintenant », menace-t-il les autorités de la transition malienne. Les cibles choisies semblent témoigner de l’état d’esprit des terroristes. Le camp de Sévaré où six soldats maliens ont été tués n’a pas été attaqué depuis 2018. Six victimes avaient été enregistrées dont trois assaillants. Suite à cette attaque, le quartier général du G5 Sahel a été transféré à Bamako.

Le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM) auquel appartient la Katiba du Macina ne s’est pas encore prononcé sur les évènements du 24 avril. Cependant, un communiqué diffusé par son organe de propagande « Az Zallaqa » est largement revenu sur des opérations menées depuis le début de l'année par l’organisation djihadiste.

Dans ce communiqué, les djihadistes affiliés à Aqmi affirment avoir capturé des membres du groupe de sécurité privé, Wagner, en réponse aux opérations menées par les mercenaires russes et l’armée malienne à Moura. Selon plusieurs experts contactés par Dakaractu, c’est une autre réplique à l’opération de l’armée malienne et des miliciens russes à Moura. 

En guise d'explications, l’armée malienne dit avoir reçu des « renseignements bien précis qui ont permis de localiser la tenue d’une rencontre entre différents Katibas ». « Une combinaison d’actions aéroterrestres, en l’occurrence les forces au sol et les troupes aéroportées notamment les forces spéciales, a permis un bilan lourd chez les terroristes : 203 combattants des GAT (Groupes armés terroristes) neutralisés avec une interpellation de 51 personnes », poursuit l’État-major général des armées maliennes. Si le GSIM reconnait qu’il y avait des djihadistes à Moura, il attribue aux Fama et à la milice russe la responsabilité de la mort de « centaine de civils » lors de ces évènements qui ont duré cinq jours.

Dans un élan opportuniste, les djihadistes se sont érigés en défenseurs des populations civiles et n’hésitent pas à revendiquer des actions violentes contre les forces de défense et de sécurité pour justifier cette posture. Au mois de mars, le GSIM a revendiqué l’attaque sanglante de Mondoro contre l’armée malienne pour venger les civils tués à Dogofry quelques jours plut tôt.

À travers les attaques très audacieuses du dimanche 24 avril, les djihadistes ciblaient aussi les moyens aériens des Fama qui les mettent en difficulté. Au Camp de Bapho, ils ont endommagé un hélicoptère de type Mi-35. « Pris en étau, les terroristes tentant de fuir la localité sur les plaines ont été interceptés et neutralisés par le Mi-35 en couverture », se félicitait l’armée malienne qui a beaucoup communiqué sur l’acquisition de matériel aérien, fruit de son rapprochement avec la Russie. Est-on en train de franchir un nouveau palier dans cette guerre ? Une chose est en tout cas sûre : le dialogue avec les djihadistes n’est plus d’actualité.
Lundi 25 Avril 2022




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