Le calvaire d'El Hadj Gassama, interdit de sortie du territoire en Trinité et Tobago : « Je veux rentrer au Sénégal dans les plus brefs délais »


Le calvaire d'El Hadj Gassama, interdit de sortie du territoire en Trinité et Tobago : « Je veux rentrer au Sénégal dans les plus brefs délais »

Un choix peut changer le destin d'un homme. El Hadj Abass Gassama ne dira pas le contraire. Né à Tambacounda le 03 avril 1979, précisément au village de Hamdallaye, il a regagné la capitale après l'obtention de son Bac au lycée Mame Cheikh Mbaye. Une année à l'Université de Dakar où il a fréquenté le département de langues romanes, section Portugais, et le voilà en train de rêver d’Amérique. Mais de quelle Amérique ? Influencé par des amis qu'il a connus à Dakar et qui sont partis vers cette destination, le Tambacoundois jette son dévolu sur cette voie de la migration.

 

Le 24 décembre 2004, il quitte le Sénégal à destination du Brésil, via Lisbonne, au Portugal. Au Brésil, El Hadj Dramé s'installe à Natal, dans l’État de Rio Grande do Norte. Il n'a fait qu'un mois dans cette ville avant de faire la connaissance d'un Nigérian qui lui a vendu le rêve américain.

 

À la recherche d'une vie meilleure, il accepte d'aller à l'aventure. À ses frais, les deux aventuriers mettent les voiles. Trois jours de voyage et les voilà au Venezuela, au nord du Brésil, en passant par la Guyane française. « J'ai payé 2535 dollars », conte El Hadj Gassama, au bout du fil.

 

C'est au Venezuela qu'il dit avoir compris qu'il a été embarqué dans une aventure dont l'issue lui semblait incertaine. « Je me suis séparé du Nigérian et chacun de nous est parti de son côté », confie-t-il à Dakaractu. Parti de son coté ? En réalité, El Hadj Gassama est resté au pays de Hugo Chavez (mort en 2013 et remplacé par Nicolas Maduro).

Sa situation financière se dégrade de plus en plus. Ce qui rend le migrant sénégalais vulnérable. C'est ainsi qu'il va faire le voyage de la...Trinité et Tobago.

 

Deux séjours en prison

 

Dans cet archipel composé de deux îles situé dans le Sud des Caraïbes entre la mer des Caraïbes et l'océan Atlantique Nord, au Nord-Est du Venezuela où il a débarqué le 9 mai 2005 par pirogue, la vie du Sénégalais ne sera pas un carnaval. Une année après son arrivée, il est arrêté à Chaguanas, dans le nord-est du pays. Il s'était pourtant trouvé un travail d'agent de sécurité et croyait passer entre les mailles des filets de la police de l'immigration. Hélas, El Hadj Gassama est jeté en prison, à Port of Spain, la capitale. 

 

«J'ai été mis dans des conditions exécrables, précaires. Je partageais une cellule restreinte avec 5 personnes et il y avait du tout, des criminels, des voleurs... », détaille le quadragénaire. Deux semaines après, il est élargi de prison, avec un « ordre de supervision ». En clair, Gassama peut maintenant vaquer à ses occupations et mener une vie tranquille. Sauf qu'il va renouer avec l'enfer des prisons trinidadienne. Neuf ans après.

 

« Alors que je prenais le ferry à Tobago où j'étais allé rendre visite à des connaissances, j'ai été arrêté manu militari et transféré à la Trinité où j'ai fait 4 ans de prison à Aripo », confie El Hadj Gassama, dans un débit ultrarapide. Il faut croire que son séjour en prison a laissé des séquelles...

 

Sorti de prison suite à l'intervention d'une organisation caritative, il est cependant bloqué dans ce pays par les autorités. Comme pour les raisons qui l'ont amené en prison pour une seconde fois, rien ne lui a été notifié s'agissant de son interdiction de sortie du territoire. Cette mesure serait-elle liée au fait que El Hadj Gassama pratique un islam dit salafiste ? Il bat en brèche. « Jusqu'au moment où je vous parle, je ne connais pas les raisons de cette mesure », s'explique-t-il, perdu.

 

L'Opération sauvetage ratée de « Ensemble pour réussir »

 

Tombé par hasard sur un message whatsapp qui décrivait la situation dans laquelle vit El Hadj Gassama en République de Trinité et Tobago, l'association « Ensemble pour réussir » dirigée par un Sénégalais du nom de Kandioura Sakho, résidant en France, en fait son propre combat. Une correspondance est alors envoyée à l'alors directeur des Sénégalais de l'Extérieur, Sory Kaba pour une réaction de l'État du Sénégal. Une suite favorable sera donnée à cette saisine. L’État a fait les documents et a payé le billet pour le retour du ressortissant sénégalais qui ne disposant pas de passeport, devait voyager par sauf-conduit délivré le 25 mai 2018 par les services de l'ambassade du Sénégal au Canada (voir document). C'est d'ailleurs Viviane Laure Elisabeth Bambassy qui a signé le document, alors qu'elle était ambassadeur du Sénégal.

 

Dès lors, il devait quitter le pays le samedi 09 juin et était attendu à l’aéroport de Diass le lundi 11 juin (voir document). Mais quand il s'est pointé à l’aéroport de Port of Spain, il lui a été signifié qu'il ne peut pas sortir du pays. En plus d’être retenu contre sa volonté à 5082 km de chez lui, El Hadj Gassama a perdu toutes les opportunités de retrouver une vie meilleure dans ce pays. Où il pourtant il commençait à voir le bout du tunnel. Comme s'il était pourchassé par un mauvais sort, il a perdu sa femme trinidadienne avec qui il n'a pas eu d'enfant. « Elle est décédée », renseigne-t-il. Nous avons appris qu'il est également orphelin de père. Sa mère est au village. 

 

Hébergé par un « cousin » ivoirien, il réitère son appel à être rapatrié le plus vite possible. « Tout ce que j'attends des autorités de mon pays, c'est de réagir de façon prompte pour que je rentre dans les plus brefs délais », supplie-t-il, à bout de souffle. 



Le calvaire d'El Hadj Gassama, interdit de sortie du territoire en Trinité et Tobago : « Je veux rentrer au Sénégal dans les plus brefs délais »
Dimanche 19 Janvier 2020




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