Décès Imam Alioune Badara Ndao : retour sur les périodes de « djihâd » du prêcheur.


L'information vient de tomber!  Le prêcheur Imam Alioune Badara Ndao est rappelé à Dieu dans la nuit du lundi au mardi à l'hôpital Fann de Dakar. Il est décédé des suites d'une courte maladie et sera inhumé à Kaolack. Secrétaire général des Imams et prédicateurs du Sénégal de la section de Kaolack de son vivant, imam Alioune Badara Ndao est connu par le grand public à cause de ses démêlés judiciaires. En effet, l'Imam Ndao a été dépeint sous ses traits les plus sombres durant toute la durée de son procès pour apologie du terrorisme entre autres chefs d’accusation our lesquels il était poursuivi. Dans les comptes-rendus de presse, il a été présenté comme un formateur de jihadistes, son daara comme une usine de fabrication de jeunes radicaux prêts à se faire exploser à l'image des jihadistes. Retour sur les périodes troubles d’un fervent défenseur de la religion musulmane.

27 octobre 2015, ARRESTATION…

Accusé d’apologie du terrorisme, il est arrêté à l’aube du 27 octobre 2015, à Ngan Alassane, quartier situé dans la périphérie nord-ouest de la commune de Kaolack. Des hommes lourdement armés qui ont fouillé de fond en comble son domicile, ont procédé, à son interpellation. Il est également poursuivi pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et blanchiment de capitaux et traduit en procès devant la chambre criminelle de la Cour d’Appel de Dakar. Après une filature de cinq ans, Alioune Badara Ndao a été entendu par les enquêteurs et placé sous mandat de dépot à la Maison d’arrêt et de correction de Rebeuss avant d'être transféré à Saint-Louis. Peu de temps après, il est transféré à Dakar à la section spéciale du Camp Pénal où le retrouveront 30 autres accusés dont le « cerveau » Matar Diokhané et sa bande composée essentiellement de jeunes sénégalais ayant cotoyé de près Boko Haram. Ils sont tous arrêtés et emprisonnés au même titre que l’Imam qui était présenté comme leur mentor. Après les auditions dans le fond, les accusés sont renvoyés devant une chambre criminelle à formation spéciale.

9 avril 2018, OUVERTURE DU PROCÈS…

Après trois reports, le procès de l’imam Alioune Badara Ndao et ses 30 co-accusés djihadistes présumés s’est ouvert au Sénégal, le lundi 9 avril et aura duré trois (3) mois. Les interrogatoires ont démarré 48 heures après l'ouverture du procès et les accusés se sont succédés à la barre pour répondre aux questions du juge, du procureur et de leurs conseils. Il s'ensuit le réquisitoire du substitut qui n'a pas été tendre avec les accusés. Pendant quatre heures de temps, Aly Ciré Ndiaye a essayé de prouver la culpabilité d'Alioune Badara Ndao et de ses acolytes supposés.

Dans ses conclusions, le maitre des poursuites a estimé que l'Imam Ndao est le maître à penser de la bande à Matar Diokhané qui, après leur odyssée à Abadam, Gwoza et Sambisa, au Nigeria où ils ont bénéficié de fonds d'Abubakar Shekau, devait rentrer au Sénégal pour établir une base jihadiste. Le représentant du ministère public a, à cet effet, requis 30 ans de travaux forcés contre l'Imam Ndao pour les crimes de complicité d'actes de terrorisme par association de malfaiteurs, actes de terrorisme par menace ou complot, apologie du terrorisme, financement du terrorisme et blanchiment de capitaux en relation avec une entreprise terroriste. Pour les deux derniers crimes, le substitut était convaincu qu'ils sont établis par la collusion entre l'Imam et un des "assistants" de Matar Diokhané, Ibrahima Diallo alias Abou Omar.

Devant le tribunal, Imam Ndao a nié les accusations. Sur sa relation avec Matar Diokhané, l'Imam a avoué que ce dernier lui avait envoyé un livre intitulé "L'Ignorance est-elle une raison", mais précise qu'il n'en a pas discuté avec l'auteur même s'il reconnait avoir fait des annotations. De la décision de Matar Diokhané consistant à lui confier ses "boys" du Nigeria, Imam Ndao a affirmé qu'il n'était pas au courant. Et l'accusation n'a pas été en mesure de prouver que le religieux de Ngane ne disait pas vrai. De même, aucune preuve n'a été apportée sur l'existence de champs où seraient formés de futurs jihadistes.

19 juillet 2018, ACQUITTEMENT…

L’imam Alioune Badara Ndao a été officieusement acquitté, le jeudi 19 juillet 2018, après 2 ans et 9 mois de détention. Le verdict est précédé par une série de plaidoiries des avocats de l’Imam Alioune Ndao qui ont invité la chambre à se prendre une sage décision pour éviter des représailles des groupes terroristes envers notre pays. Ainsi, les principaux chefs d’accusation, dont « apologie du terrorisme », « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » et « blanchiment de capitaux », pour lesquels le parquet avait requis 30 ans de prison lui ont été déchargés. Le prédicateur de la mosquée de Kaolack a toutefois été jugé coupable de « détention d’arme de deuxième degré », en référence au pistolet et aux cartouches retrouvés lors de son arrestation à son domicile en 2015 et pour lesquels il est condamné à un mois de prison avec sursis. Au terme du procès, le juge avait prononcé 13 condamnations et 15 acquittements. Les 29 co-prévenus du maitre coranique, dont Makthar Diokhané, le « cerveau » présumé, ont été condamnés à des peines allant de cinq jusqu’à vingt ans de prison. 

Trois ans après son procès pour terrorisme, la Cour d’Appel a rouvert le dossier suite à la décision du parquet de s’opposer à la décision du défunt juge Samba Sall qui l’avait acquitté des principaux chefs d’accusation. La Cour d’Appel a confirmé la décision d’acquittement de Imam Ndao, qui est désormais « définitive » et « irrévocable ». Les cinq (5) juges de la formation spéciale de la Cour d’Appel ont donc définitivement lâché Imam Alioune Badara Ndao, pour qui, la vie a naturellement repris comme avant jusqu’à ce 6 septembre, date à laquelle il a rendu l’âme...
Mardi 6 Septembre 2022




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