DOUBLE MEURTRE DE MÉDINATOUL SALAM / Du drame au procès en passant par la double opération du cœur du Cheikh aux séances d'acte d'allégeance, grèves de faim et autres menaces de suicide collectif des détenus


DOUBLE MEURTRE DE MÉDINATOUL SALAM / Du drame au procès en passant par la double opération du cœur du Cheikh aux séances d'acte d'allégeance, grèves de faim et autres menaces de suicide collectif des détenus
Serigne Cheikh Béthio Thioune, Cheikh Faye, Pape Ndiaye, Ablaye Diouf, Serigne Khadim Seck, Alassane Ndiaye, Samba Ngom, Mame Balla Diouf, Demba Kébé, Mamadou Guèye, Aziz Mbacké Ndour, Pape Ndiaye, Aliou Diallo, Al Demba Diallo, Momar Talla Diop, Samba Fall, Mohamed Sène, Adama Sow, Serigne Saliou Barro et Aly Diouf sont appelés à la barre pour répondre du double meurtre de Ababacar Diagne et Bara Sow. 

Nous sommes le 23 Avril 2012  à MEDINATOUL SALAM.
D'une bagarre qui a éclaté, l'irréparable va se produire. Deux Thiantacônes y laissent la vie et seront enterrés en catimini à Keur Samba Laobé. Ibrahima Ndoye, alors procureur de  la République à Thiès, informé du drame, pilotera une série d'arrestations. Cheikh Béthio, dans son propre véhicule vers 18h35 conduit par son propre fils avec à bord des éléments de la Division des Investigations Criminelles allait passer sa première nuit dans la gendarmerie territoriale de la capitale du Rail. Le lendemain, la presse Sénégalaise rivalisait de titrailles.

''Béthio, la chute !’’, s'était exclamé le journal Enquête. La Tribune et L’As se produisaient le même titre : ‘’Le monde s’effondre sur Béthio Thioune’’.  L’Observateur, se voulut plus explicite : '' Le guide des thiantacounes déshabillé par le Procureur Ibrahima Ndoye’’ avant d'ajouter en sous-titre ‘’sur ordre de Béthio Thioune, les corps de Bara Sow et Ababacar Diagne ont été traînés sur 1, 5 km dans la brousse avant d’être enterrés dans des trous de rat’’.  ‘’Encens d’assises sur Béhtio’’, tonnait Le Quotidien. Le journal Walfadjri versait dans le commentaire mettant en relief ‘’  Justice et impunité - Macky à l’épreuve de l’affaire Béthio’’ etc...


DE L'ENQUÊTE À LA LIBERTÉ PROVISOIRE
Le 26 Avril 2012, l'enquête devait connaître sa vitesse de croisière avec l'exhumation des corps des deux victimes. Quelques jours après, il y eut la reconstitution des faits. Cheikh Béthio replacé dans les conditions du direct devait prouver qu'il n'a entendu, de sa chambre, aucun coup de feu retentir. Un témoin dira que le chef religieux a tout le temps gardé sa sérénité. Les conclusions de cette séance de vérification n'ont jamais été officiellement publiées. Mais l'on dira que les murs et le son de la télévision militaient en faveur du guide spirituel des Thiantacônes. Néanmoins, il sera mis en prison. La Mac de Thiès accueillait son plus illustre détenu.

Le 06 juillet 2012, Cheikh Béthio, aux oubliettes et presque infréquentable, devait recevoir son premier baume au cœur. En effet, au moment où l'on s'y attendait le moins, Serigne Bassirou Mbacké Abdou Khadr venait lui rendre visite.
Le 8 novembre 2012, le procès tant attendu est repoussé. Dans la matinée, les Thiantacônes avaient déjà envahi le tribunal des flagrants délits de Dakar.  Ils étaient une cinquantaine à venir mettre la pression. Le juge ne s’était  finalement pas prononcé sur le verdict et avait renvoyé de nouveau le procès jusqu’au 15 novembre prochain pour une audience spéciale. 
Le 22 février 2013,  Cheikh Béthio devait bénéficier d'une liberté provisoire. La chambre d’accusation de la Cour d’appel de Dakar la lui avait accordée, l' assortissant, en son temps, de mesures de contrôle judiciaire qui, violées pourraient le reconduire immédiatement en prison. Le communiqué du ministère de la Justice lui intimait l'ordre de respecter les  recommandations du juge qui lui interdisait d’organiser ou d’assister à des réunions ou rassemblements publics et d’entreprendre des actions ou de faire des déclarations en relation avec la procédure en cours et susceptible d’occasionner des troubles à l’ordre public. Le Cheikh était aussi contraint d’aviser le juge d’instruction de tout changement d’adresse.
En novembre 2013, débutèrent ses déboires de santé. Il devait être transféré d'urgence en France où il subira une double opération du cœur. C'est lui-même qui le dira au Khalife général des Mourides, Serigne Sidi Mokhtar Mbacké. Cheikh Béthio avait préféré rendre visite d'abord au Patriarche de Gouye-Mbind. Prenant la parole, le guide religieux des thiantacônes avait choisi de revenir sur ses traitements médicaux en France . « J’ai subi une double opération du cœur. Je suis certain que c’est grâce à vos prières que je m’en suis sorti sain et sauf ''. Serigne Sidi Mokhtar Mbacké le remerciera de l’attachement qu’il porte à sa personne . « Je sais à quel point vous tenez à moi. Je sais aussi le type de relations que vous avez entretenu avec Serigne Saliou. Rien que pour cela, je vous voue un estime profonde. »  Le chef religieux remettra à son hôte un boubou.

Cheikh Béthio ne se privera pas d'aller voir les autres Khalifes de concession. À Darou Khoudoss, il aura des entretiens avec Serigne Cheikh Walo Mbacké et Serigne Cheikh Aliou, alors patron de Maou Rahmati, qui l’avait reçu à Tindôdi. Auparavant, Cheikh Béthio avait rencontré Serigne Bass Abdou Khadre Mbacké, porte-parole du Khalife des Mourides qui lui remettait pour l’occasion une natte, Serigne Ass Guédé, Khalife de Mame Cheikh Anta Mbacké. À Darou Salam,  le Cheikh rencontrait Serigne Cheikh Anta Mbacké. Parmi les chefs religieux rencontrés, il faudra aussi citer Serigne Sidi Mbacké, khalife de Serigne Abdou Lahad Mbacké. Serigne Cheikh Dieumb Fall, khalife des Baay-Fall. Cheikh Béthio honora la prière du crépuscule dans le salon de Serigne Abdoulahi Mbacké « Yallay Buur », khalife de Mame Mor Diara Mbacké. 

LA VIE DES DÉTENUS THIANTA EN PRISON 
Taciturnes comme personne, les détenus Thiantacônes allaient petit-à-petit perdre le nord avec le caractère très long de leur détention. En juillet 2018, les Thiantacônes amenés par Cheikh Faye (un nom à retenir pour le procès) devaient entamer une grève de la faim, menaçant de se suicider. Ils réclamaient l'ouverture de leur procès. Au téléphone de Dakaractu, Aly Diouf précisera que seuls 8 d'entre eux avaient entrepris de se donner la mort.
'' Je ne sais pas qui sont ces talibés de Cheikh Béthio qui envisagent de se donner la mort prétextant le retard excessif accusé par le démarrage de leur procès. Nous convenons avec eux, (s'ils existent bien sûr, car nous ne sommes pas au courant de tout ce bruit) qu'il est suffisamment temps pour nous d'être face au juge, mais nous ne nous tuerons jamais. Quand je dis nous, je veux citer des condisciples comme Moussa Dièye, Mamadou Guèye, Massamba Fall, Mouhamed Sène, Pape Ndiaye et moi-même. Je suis sûr qu'il y en a d'autres qui pensent comme nous. '' Aly Diouf de poursuivre : '' Ce qui nous arrive relève exclusivement de la volonté de Dieu. Nous acceptons le décret divin. Nous sommes des disciples de Serigne Touba et pour rien au monde nous mettrons terme à nos vies juste parce que nous voulons être jugés. C'est une aberration. Que nos parents soient rassurés ! ''
Quelques jours après, cette grève de la faim devait connaître son épilogue avec la visite d'une autorité venue calmer leurs ardeurs. Dakaractu écrivait : '' Ils ont mis un terme à leur diète, a confirmé une source basée au sein de la maison d'arrêt et de correction de Thiès où ces derniers croupissent depuis 6 ans et 2 mois.  La source est tout de même peu bavarde par rapport aux raisons qui ont poussé '' Cheikh Faye '' et ses inconditionnels à renoncer à leur initiative, mais précise que tout a été fait sans conditions''.

Aujourd'hui et pour de bon, le procès est ouvert sans le Cheikh, malade et sous soins médicaux à Bordeaux...
Mardi 23 Avril 2019




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