Covid-19 et criminalité : Le coronavirus « augmente » les chiffres d’affaires des réseaux criminels, les autorités sur le qui-vive.


Covid-19 et criminalité : Le coronavirus « augmente » les chiffres d’affaires des réseaux criminels, les autorités sur le qui-vive.

L’apparition de la COVID-19 en début mars 2020 a redéfini l’agenda sénégalais de la sécurité humaine et restructuré les dynamiques liées à la criminalité transnationale organisée au Sénégal.

Si, d’une part, les restrictions imposées ont brisé l’élan de certains réseaux criminels, d’autre part, elles ont favorisé la persistance d’autres formes de criminalité.

 

C’est ainsi que l’ampleur de la pandémie, la peur qu’elle a créée et le nouveau mode de vie qu’elle a imposé à la population, ont servi de prétexte aux réseaux criminels pour créer des économies parallèles et s’enrichir à travers la cybercriminalité et le trafic de faux médicaments. Cette tendance risque malheureusement de perdurer, au vu de la résurgence de la COVID.

 

Chercheur au Centre des Hautes Études de Défense et Sécurité (CHEDS), Mouhamadou KANE, docteur en Relations Internationales nous a envoyé un document qui constitue les résultats de ses recherches. C’est la note d’analyse du CHEDS N°1 du 02//2021 qui porte sur « Criminalité en temps de crise sanitaire : Comment la COVID 19 a impacté la criminalité transnationale organisée au Sénégal ? »

 

Le phishing et de skimming font perdre aux banques des centaines de millions de francs CFA.

 

Le document révèle que des réseaux criminels ont profité de la crise sanitaire pour développer des économies parallèles dans des secteurs tels que la cybercriminalité, la santé, avec notamment la vente de faux produits médicaux. Le Sénégal figure aujourd’hui parmi les 5 pays les plus attaqués par les cybercriminels en Afrique. Cette situation semble même s'empirer pendant la période COVID, selon les autorités sécuritaires qui se sont ouvertes au docteur Kane.

 

D’après des sources sécuritaires concordantes, le nombre de plaintes liées aux sextorsions, aux virements frauduleux, aux achats non ordonnés et non effectués ont explosé depuis le début de la pandémie. De nombreuses banques établies au Sénégal et leurs clients ont également été victimes de phishing et de skimming. Ces activités criminelles leur ont fait perdre des centaines de millions de francs CFA.

 

Selon le centre des hautes études, de défense et de sécurité, une négligence de ce secteur pourrait coûter cher à l'économie nationale et, en même temps, faire fuir les investisseurs.

 

Le Sénégal perd plus de 12 milliards par an à cause du commerce des médicaments illicites.

 

Le trafic de faux médicaments était déjà un problème de santé publique au Sénégal avant la pandémie. Le pays dispose aujourd'hui de centaines de dépôts illégaux de faux médicaments. Ce commerce illicite, en plus de ses effets dégradants sur la santé publique, fait perdre à l'État du Sénégal plus de 12 Milliards de francs CFA chaque année. Cependant, la crise sanitaire est venue exacerber ce problème. Les réseaux criminels ont en effet opportunément exploité la situation.

 

En mars 2020, à la suite de l’homologation par les autorités sanitaires sénégalaises de la chloroquine comme remède contre le coronavirus, les réseaux criminels ont profité de la forte demande pour ce médicament pour introduire de la chloroquine contrefaite (Nirupqin) dans le circuit mafieux. Une plaquette de ce médicament était vendue à 1500 FCFA dans le marché noir, tandis que la boite de 100 était vendue à 20 000 FCFA.

En début août 2020, la division spéciale de cybercriminalité de la police a démantelé un réseau criminel qui vendait en ligne de faux médicaments, notamment des kits de test rapide de COVID, trafiqués depuis la Chine. Ce faux kit de test, connu sous le nom de Deangel Biological, était vendu à 25 000 francs l'unité.

En début décembre 2020, Interpol avait émis une alerte à ses membres sur une éventuelle attaque des vaccins par les réseaux criminels.

La saisie de 5,145 tonnes de haschich par la marine sénégalaise au mois d’avril 2020, qui est par ailleurs la plus grosse saisie de drogue dans l’histoire du Sénégal, illustre à suffisance leur résilience.

 

Les cyber-patrouilles ont permis de démanteler des réseaux de cybercriminels

 

L’État a accentué sa traque contre les cybercriminels, à travers des cyber-patrouilles plus régulières. Ces actions ont permis le démantèlement de nombreux réseaux cybercriminels à Dakar et à l'intérieur du pays, dont le dernier en date remonte au mois de novembre avec l'arrestation à Mbour de 12 Nigérians. Quelques semaines avant l’apparition de la COVID au Sénégal, le groupement de recherche et de répression et de la fraude de la gendarmerie a procédé à deux saisies évaluées à un peu plus de cent millions de francs CFA.

 

Le Sénégal vers la criminalisation, le trafic, la production et la vente de faux médicaments grâce à la convention MEDICRIME?

 

Le Sénégal a signé plusieurs conventions pour mieux lutter contre le trafic de faux médicaments à savoir l’initiative de Lomé, et la convention MEDICRIME. La ratification de cette dernière convention pourrait aider par exemple à criminaliser le trafic, la production et la vente de faux médicaments. En plus, le démantèlement total des réseaux criminels et la fermeture des dépôts illégaux de faux médicaments sont toujours attendus.

 

Les recommandations du docteur

 

Le secteur public comme le secteur privé devrait mener des campagnes de sensibilisation sur la cybercriminalité, à travers les réseaux sociaux, et sur les différents supports de communication (télévision, radio et presse écrite), en français et dans toutes les langues locales ; Améliorer les outils techniques de lutte contre la cybercriminalité ; Il est impératif de renforcer l’action de la marine nationale ainsi que les mesures de contrôle du port de Dakar afin d’endiguer une probable offensive des cartels, qui voudront, à tout prix, écouler leur produits, après l’allègement des restrictions de voyage ; Renforcer la sécurisation de la chaîne d’approvisionnement des médicaments et des vaccins tout en menant une campagne de sensibilisation intense auprès des populations ; L'État devrait ratifier la convention MEDICRIME afin d’infliger des sanctions exemplaires aux trafiquants de faux médicaments qui font planer une menace permanente sur la santé publique ; Procéder à la fermeture de tous les dépôts illégaux de faux médicaments et au renforcement de la surveillance des frontières avec les principaux pays pourvoyeurs de faux médicaments.

Samedi 6 Février 2021




Dans la même rubrique :