Allocution de Mankeur Ndiaye à la Réunion des ministres des Affaires étrangères des pays nordiques et africains


Allocution de Mankeur Ndiaye à la Réunion des ministres des Affaires étrangères des pays nordiques et africains

REPUBLIQUE DU SENEGAL

Un Peuple – Un But – Une Foi

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     Ministère des Affaires étrangères 

   et des sénégalais de l’extérieur 

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Excellences Mesdames, Messieurs les Ministres, chers Collègues,

Excellences Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs 

Distingués invités,

Mesdames, Messieurs, 

 

Je voudrais, chers collègues, vous dire l’honneur de me retrouver parmi vous, pour la 2ème fois, à la réunion des Ministres des Affaires étrangères de l’Afrique et des pays Nordiques.

 

Cet honneur est doublé d’une fierté légitime car nos présentes assises se tiennent dans ce beau et grand pays, théâtre de tant d’événements historiques qui ont marqué la marche du Continent et du monde.

 

Je voudrais également exprimer ma gratitude et ma reconnaissance au peuple et au Gouvernement sud africains pour leur accueil fraternel et leur généreuse hospitalité, ainsi qu’à notre Sœur, Son Excellence Madame Maité NKOANA-MASHABANE, Ministre des Relations Internationales et de la Coopération de l’Afrique du Sud, pour toutes les commodités mises à notre disposition, depuis que nous avons foulé cette belle Province du Limpopo. 

 

Madame la Présidente, 

Chers Collègues,

 

Le thème soumis à mon analyseles Modèles d’intégration régionale, avec un accent particulier sur les projets phares de l’Agenda 2063, est aujourd’hui au cœur des préoccupations de l’Afrique. 

L’Agenda 2063 est l’expression de la volonté maintes fois exprimée par les dirigeants africains de réaliser une plus grande unité et une solidarité agissante entre les pays africains et entre les peuples Afrique en favorisant l’accélération de l'intégration politique et socio-économique du Continent.

 

Avec la mise en place de l’Union africaine(UA), héritière de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA), sur la base de la Déclaration de Syrte du 9 septembre 1999, l’Afrique a opéré un tournant décisif en faisant de l’intégration une stratégie de développement fondamentale du continent devant lui permettre de jouer le rôle qui lui revient légitimement dans l’économie mondiale.

 

Toutefois, force est de reconnaitre que le processus l’intégration africaine n’est pas né avec le lancement de l’UA ; les initiatives dans ce sens remontant à l’époque de l’OUA.

 

Pour rappel, en 1980 fut adopté le Plan d’Action de Lagos  dont l’idée a germé lors de la 16ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement de l’OUA, tenue à Monrovia, en juillet 1979. 

 

La Déclaration des Chefs d’Etat et de Gouvernementadoptée en 1980 à Lagos, lors de la 17ème Session de  l’Organisation, décline une feuille de route dans les domaines économique et social, à l’échelle nationale et régionale.

 

 

 

 

 

 
Par cette Déclaration, les Chefs d'Etat et de Gouvernement de l'OUA “s'engageaient, au nom de leurs Gouvernements et de leurs peuples à promouvoir le développement économique et social et l'intégration de leurs économies en vue d'accroître l'auto-dépendance et favoriser un développement endogène et auto-entretenu”.
 

 

 
La mise en œuvre de cette Déclaration est consignée dans un Plan d'Action dont l'ambition est à la mesure du retard économique considérable du Continent. Ce plan d’action embrasse des domaines aussi variés que  l’Agriculture, l’Industrie, les Sciences et les Technologies, les Ressources humaines, les échanges commerciaux et financiers, entre autres.
 

 

Mesdames, Messieurs le Ministres,

 

Dans la lancée du Plan d’action de Lagos, les Leaders africains décident, le 03 Juin 1991, à Abuja (Nigeria), de créer une Communauté Economique Africaine (CEA) faisant partie intégrante de l’OUA. Le Traité instituant la CEA, communément appelé Traité d’Abuja, va entrer en vigueur le 12 Mai 1994.

 

Le Traité stipule que les États africains doivent s’efforcer de renforcer les Communautés Économiques Régionales (CER), en assurant,en particulier, la coordination, l’harmonisation et l’intégration progressive de leurs activités en vue de la réalisation de la Communauté Économique Africaine.

 

 

 

Tout comme le Plan d’Action de Lagos, les objectifs poursuivis  par le Traité d’Abuja tournent notamment autour de la promotion du développement économique, social et culturel et de l’intégration des économies africaines.

 

Mesdames, Messieurs, 

 

En septembre 1999, à Syrte, en Libye, les Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’OUA, dans leur volonté de hâter le processus d’intégration, ont adopté la « Déclaration de Syrte », visant à accélérer la mise en œuvre du Traité d’Abuja et la mise en place des institutions telles que la Banque Centrale Africaine, la Cour africaine de Justice et le Parlement panafricain.

 

La mise en œuvre de la Déclaration de Syrte sera traduite dans les faits par la création de l’Union africaine avec l’adoption de l’Acte constitutif de l’Uau Sommet de Lomé (Togo) de juillet 2000, la mise en place effective de la nouvelle Organisation en juillet 2001 à Lusaka (Zambie) et la tenue de son premier sommet en juillet 2002 à Durban, ici en Afrique du Sud.

 

Dans le même ordre d’idées, au moment même où l’Union africaine prenait forme à Lusaka, les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont adopté le Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique (NEPAD). Le NEPAD, dont le Comité d’Orientation est place sous la présidence du Président Macky SALLreelu en janvier dernier pour un mandat de 2ans, qui a été ensuite intégré dans les structures de l’UA, constitue le programme majeur de l’Organisation avec l’Agence de planification et de coordination du NEPAD devenue un organe technique de l’UA.

MesdamesMessieurs les Ministres,

 

L’engagement pour une Afrique unie, intégrée prospère et débarrassée  de tous les fléaux va connaître un tournant décisif avec le Sommet de Mai 2013, qui a consacré les cinquante ans de l’OUA/UA. 

 

En effet, à l'occasion du Jubilé d’or de l’Organisation continentale, les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont pris acte des réalisations et des défis sur le Continent et ont renouvelé leur engagement pour une Vision panafricaineportant sur « une Afrique intégrée, prospère et pacifique, dirigée par ses propres citoyens et représentant une force dynamique sur la scène internationale».

 

C’est dans ce contexte que le principe de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, qui est un plan pour la transformation structurelle de l'Afrique, a été approuvé par le Sommet qui a donné mandat à la Commission de l'Union africaine, avec l’appui de l’Agence de Planification et de Coordination du NEPAD, de la Banque africaine de Développement (BAD) et de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (CEA), d’élaborer cet Agenda continental, par le biais d’un processus de larges consultations axé sur les populations.

 

L’Agenda 2063, cadre stratégique et endogène de croissance inclusive et de développement durable pour la transformation de l’Afrique, prend ainsi en compte les leçons et les défis du passé, ainsi que le contexte continental et mondial. Il est ancré dans l'Acte constitutif, la vision de l'UA, la Déclaration solennelle du cinquantième anniversaire et les aspirations africaines déclinées en sept (07) catégories à savoir :

 

1. une Afrique prospère fondée sur une croissance inclusive et un développement durable ;

 

2. un Continent intégré, politiquement uni, basé sur les idéaux du panafricanisme et sur la vision de la renaissance de l’Afrique ;

 

3. une Afrique où règnent la bonne gouvernance, la démocratie, le respect des Droits de l’Homme, la justice et l’état de droit ;

 

4. une Afrique pacifique et sécurisée ;

 

5. une Afrique dotée d’une identité, d’un patrimoine commun, de valeurs partagées et d’une éthique culturelle forte ;

 

6. une Afrique dont le développement est axé sur les populations et s’appuie, notamment, sur le potentiel des femmes et des jeunes ;

 

7. une Afrique, en tant qu’acteur et partenaire fort, unie et influente sur la scène mondiale.

 

Ces aspirations ont été traduites en objectifs spécifiques dont l’atteinte devait passer par l’identification de domaines prioritaires.  

 

 

 

 

 

 

La Commission de l'UA, en collaboration avec le NEPAD, la BAD et la CEA, a ainsi élaboré un programme dont les projets phares portent sur (i) le Réseau intégré de trains à grande vitesse, (ii) le Grand barrage d’Inga en République démocratique du Congo, (iii) le Marché unique du transport aérien en Afrique, (iv) l’Espace, (v) le Réseau électronique panafricain, (vi) la Création d’un forum consultatif annuel africain, (vii), la Création d’une université virtuelle, (viii) la Libre circulation des personnes et passeport africain, (ix) la Zone de libre échange continentale, (x) Faire taire les armes d’ici à 2020, (xi) l’Elaboration d’une stratégie de commercialisation des produits de base, (xii) la Création d’institutions financières continentales, notamment de la Banque centrale d’ici à 2030   

 

Ces projets phares devront servir de catalyseurs pour une transformation à grande échelle du Continent. Ils constituent en outre la base pour le premier Plan décennal de mise en œuvre de l'Agenda de l'Afrique à l’horizon 2063 qui sera soumis au Sommet de l’UA en Juin prochain ici même en Afrique du Sud.

 

Mesdames Messieurs les Ministres,

 

Pour réaliser ces objectifs, l’Afrique est consciente des défis multiples qu’elle devra surmonter. Aussi, la 24ème session de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement a-t-elle demandé à la Commission de l’UA de présenter des feuilles de route détaillées pour chacun des projets en vue de leur examen par les organes délibérants de l’UA en juin 2015, une directive qui laisse entrevoir, au delà de la planification, la question fondamentale de la mise en œuvre de l’Agenda 2063 et de ses projets phares. 

L’un des défis majeurs concerne l’articulation entre l’Agenda et les plans régionaux et nationauxS’agissant des plans régionaux, les huit Communautés économiques régionales constituent les véritables piliers de l’Union dans ses objectifs d’intégration régionale, de paix, de sécurité et de développement. Ces CER sont :

• L’Autorité intergouvernementale pour le Développement (IGAD), mise en place en 1996 ;
• La Communauté de Développement de l’Afrique australe  –SADC- (1992) ;
• La Communauté de l’Afrique de l’Est – CAE - (1999) ;
• La Communauté des Etats Sahélo-sahariens – CEN-SAD- (1998) ;
• La Communauté des Etats de l’Afrique centrale  - CEEAC- (1983) ;
• La Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest - CEDEAO – (1975) ;
• Le Marché commun de l’Afrique orientale et orientale        – COMESA – (1993) ;
• L’Union du Maghreb Arabe – UMA – (1989). 

La transposition de l’Agenda 2063 au niveau des CER et des Etats membres constitue, à n’en pas douter, une condition pour assurer le succès de sa mise en œuvre. Cette déclinaison permettrait, non seulement de faciliter le suivi-évaluation, mais aussi de garantir l’appropriation par les populations africaines. 

Pour ce faire, il faudra établir une approche qui tienne compte des principes de subsidiarité et de complémentarité de nature à   faire ressortir les éventuels chevauchements entre l’Agenda et les initiatives de développementaux niveaux national et régional

En outre, il serait indiqué de renforcer la capacité statistique de l’Afrique et d’établir des données de référence dans les domaines prioritaires de l’Agenda, en vue de fonder les projets de l’Agenda sur des données crédibles et de faciliter le suivi-évaluation. Il s’y ajoute la nécessité d’avoir une stratégie de communication efficace et de tirer les leçons des initiatives de développement passées et en cours en Afrique.

Mesdames, Messieurs les Ministres, 

L’un des défis les plus cruciaux demeure celui du financement des projets de l’Agenda 2063. Pour ce faire, au-delà l’aide publique au développement et des partenariats à bâtir et à consolideril est impératif de miser davantage sur la mobilisation des ressources intérieures à travers notamment l’épargne domestique, le renforcement des systèmes fiscaux et l’élargissement de l’assiette. Le secteur privédevrait également jouer un rôle de premier plan. 

Dans cette optique, il convient de relever, pour s’en féliciter, que les différentes stratégies de mobilisation des ressources à l’échelle continentale tiennent compte de ces préoccupations.

 

 

Il s’agit notamment des propositions du Groupe de haut niveau sur les nouvelles sources de financement pour l’UA dirigé par le Président Olesegun OBASANJO, de celui sur les flux financiers illicites conduit par le Président Thabo MBEKI, de l’étude sur la mobilisation des ressources financières intérieures pour mettre en œuvre les programmes du NEPAD et de la stratégie de mobilisation des ressources de la Commission de l’UA. 

Toutes initiatives qui épousent parfaitement les conclusions du premier Sommet sur le financement des infrastructures en Afrique,tenu en juin 2014, à Dakar, sous la présidence de Son Excellence Monsieur Macky SALL, Président de la République du Sénégal qui avait donné naissance au Programme d’Action de Dakar auquel il convient d’apporter le suivi escompté.

En adoptant le document cadre l’Agenda 2063en Janvier 2015à Addis-Abeba, lors de sa 24ème session, la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union africaine a, se faisant, a décliné une feuille de route crédible et à même d’accélérer les efforts du Continent pour la réalisation des aspirations légitimes au bien-être et à l’épanouissement des populations africaines.

Avant de terminer, je voudrais saisir cette occasion pour réitérer la détermination du Sénégal, qui a inscrit dans sa Constitution sa disponibilité à abandonner tout ou partie de sa souveraineté, pour réaliser l’unité africaine. 

 

Je vous remercie de votre aimable attention.

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Jeudi 9 Avril 2015




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