Projet de motorisation des pirogues: 576,937 millions FCFA détournés entre 2019-2021. (Rapport Cour des Comptes).


Le secteur de la pêche est secoué ces derniers jours depuis que le Chef de l’Etat, Bassirou Diomaye Faye a donné des instructions fermes allant dans le sens d’assurer la transparence dans la gestion des ressources halieutiques. C’est dans ce cadre que la Cour des Comptes a officialisé la publication de son rapport définitif sur le contrôle de la Gestion des équipements de la pêche artisanale entre 2019 et 2021. A la page 42 du document, le corps de contrôle fait état d’un détournement d’objectif du projet de motorisation des pirogues avec 576 937 000 F CFA de dépenses qui n’ont aucun lien avec le projet.

 

La revue du compte de dépôt par les contrôleurs fait apparaitre, au titre des gestions 2019, 2020 et 2021 le paiement d’un montant total de 2 950 000 000 FCFA. Ce montant des dépenses devrait correspondre à une subvention de 2950 moteurs en raison de 1 000 000 FCFA de subvention par moteur. Cependant, il a été constaté que l’intégralité des crédits n’est pas consacrée à la subvention, des dépenses d’un montant global de 576 937 000 F CFA sont effectuées sur le compte de dépôt et n’ont pas de lien direct avec l’objet du compte. Il apparait ainsi un détournement d’objectif des crédits destinés à la subvention pour la couverture de charges de salaires, d’achats de matériels informatiques, de diverses prestations de services etc. Les contrôleurs ont interpellé le gestionnaire du compte qui a donné des explications sur ces impairs mais n’a pas convaincu la Cour. Pour Monsieur Boubacar DIOUF, gestionnaire, le compte de dépôt Aires de transformation n°368.8.036 n'est pas uniquement réservé au chapitre « projet motorisation des pirogues ». Pour lui, ledit compte est alimenté par les différents chapitres de transferts courants notamment le Fonds de redéploiement industriel ; le Suivi à la ressource halieutique ; le Projet de motorisation des pirogues ; le Projet d'appui à la pêche artisanale. A l’en croire, cette organisation a été effectuée dans le but d'asseoir une unité de caisse pour éviter l'éparpillement de la trésorerie affectée aux paiement des dépenses éligibles. Pour le fonctionnement du compte de dépôt d’après M. Diouf, les ressources sont mobilisées par tranches trimestrielles ou semestrielles et les paiements sont effectués sur ressources disponibles dans le compte sans tenir compte du niveau de mobilisation du chapitre concerné, selon le principe de l'unicité de caisse.

En effet, tant que le compte affiche un solde créditeur assez important, les tranches suivantes ne sont pas autorisées pour être mobilisées. Les services du Ministère en charge des Finances demande d'utiliser d'abord les ressources disponibles pour effectuer les paiements d'autant plus que le Trésor public est souvent confronté à une forte pression de trésorerie. Il ne peut pas réserver des ressources pour la subvention des moteurs alors qu'il y'a des paiements urgents à faire sur les autres chapitres (salaires). Le gestionnaire a expliqué que les paiements sont donc effectués en fonction des urgences, étant entendu que les tranches suivantes des autres chapitres viendront combler le gap des moteurs, le cas échéant. Malheureusement, il arrive très souvent que ces chapitres subissent des annulations de crédits en cours de gestion. Il s'ajoute à cela que le solde créditeur du compte au 31 décembre de l'exercice n'est pas reporté selon le gestionnaire du compte.

La Cour estime que les développements de Monsieur Boubacar DIOUF, sur la notion d’unité de caisse au niveau des ressources des comptes de dépôt sont dénoués de tout fondement juridique. En effet, la règle de l’unité de caisse est prévue pour les recettes du budget général mais ne s’applique pas à des crédits déjà affectés par la loi de finances. C’est ainsi que la revue des pièces justificatives produites par le gestionnaire du compte de dépôt a révélé qu’un montant de 303 349 000 a été utilisé pour effectuer des paiements des différents déplacements du Ministre de la Pêche alors que ces dépenses ne sont pas prévues dans le budget du Ministère. Ceci contrevient aux dispositions de l’article 9 du décret n° 2020-978 portant Règlement général sur la Comptabilité publique.

Dans ses recommandations, la Cour a demandé au gestionnaire du compte de dépôt de cesser d’imputer des dépenses de fonctionnement sur les crédits destinés au Projet de motorisation des pirogues.
Vendredi 10 Mai 2024
Dakaractu



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