Expulsions vers le Rwanda: semaine à haut risque pour Rishi Sunak


Le Premier ministre britannique Rishi Sunak affronte l'une des semaines les plus périlleuses de son mandat, menacé par une fronde de l'aile droite du parti conservateur concernant son projet d'expulser les migrants clandestins vers le Rwanda.

Le chef du gouvernement peine à unir ses rangs à la veille d'un vote décisif à la Chambre des communes sur son projet de loi contre l'immigration illégale, le "plus sévère" jamais proposé mais encore jugé trop faible par les élus conservateurs partisans d'une ligne dure.

Différentes factions des Tories se réunissent lundi pour déterminer si leurs députés soutiendront ou non ce plan, nouvelle version d'un projet controversé porté initialement par l'ancien Premier ministre Boris Johnson et bloqué par la justice.

Sans dévoiler de consigne de vote, l'influent Groupe de recherche européen (ERG), composé de Brexiters radicaux, a ainsi estimé dans un communiqué que le projet n'apporte qu'une "solution partielle et incomplète" pour empêcher les recours devant les tribunaux, nécessitant "des amendements très importants".

Après que la Cour suprême britannique l'a jugé illégal en novembre, s'inquiétant pour la sécurité des migrants expulsés, ce nouveau plan doit permettre d'inscrire dans la loi que le Rwanda est un "pays sûr". Il propose également de ne pas appliquer aux expulsions certaines sections de la loi britannique sur les droits humains, afin de limiter les recours en justice.

Le ministre britannique de la Défense Grant Shapps a affirmé lundi sur Sky News que 99,5% des recours individuels contre les expulsions ne pourraient pas aboutir avec ce nouveau projet de loi.

Mais l'aile droite de la majorité, dont le porte-voix est l'ex-ministre de l'Intérieur Suella Braverman, pourraient refuser de voter en faveur de ce projet aux allures de dernière chance.

Ils estiment en effet que Londres devrait se retirer de la Convention européenne des droits de l'Homme et autres conventions internationales sur les droits humains, pour empêcher tous les recours légaux d'aboutir.

Le dossier, érigé en priorité par le gouvernement, menace de faire imploser la majorité, un an après l'arrivée de Rishi Sunak à Downing Street et à quelques mois des législatives.

Après près de 14 ans au pouvoir, les conservateurs sont largement devancés dans les sondages par les travaillistes et selon les médias britanniques, le Premier ministre a déclaré la semaine dernière qu'ils devaient désormais "s'unir ou mourir".

- Un texte trop "faible" -
Avec certains de ses ministres de premier plan, comme le chef de la diplomatie David Cameron, Rishi Sunak a multiplié les rencontres avec les députés conservateurs ce week-end pour tenter de s'assurer de leur soutien et étouffer les rébellions internes au parti.

D'autres factions des Tories, comme les conservateurs plus modérés du groupe One Nation, examinent aussi lundi ce projet pour tenter de déterminer leur position lors du vote.

La rébellion de 28 députés conservateurs pourrait entraîner le rejet de ce projet dès ce stade précoce du processus législatif, ce qui représenterait une première depuis près de quarante ans.

Suella Braverman, limogée par Rishi Sunak le mois dernier, martèle que cette nouvelle version du projet est "vouée à l'échec" et que les conservateurs risquent "l'oubli électoral" lors des élections législatives, prévues d'ici à janvier 2025, si ce plan échoue une fois de plus.

Robert Jenrick, ministre délégué à l'Immigration censé porter ce texte devant le Parlement, a présenté sa démission mercredi, jour de la publication du projet, estimant que celui-ci ne va pas "assez loin". Il a déclaré dimanche à la BBC qu'il ne le soutiendrait pas en l'état.

A l'inverse, plusieurs personnalités britanniques comme le présentateur de la BBC Gary Lineker ou l'acteur Brian Cox ont dénoncé lundi la sévérité de ce projet, appelant le gouvernement à proposer un "nouveau plan équitable pour les réfugiés".

En juin 2022, un premier vol qui devait emmener une poignée de migrants à Kigali avait été annulé in extremis après une injonction de la Cour européenne des droits de l'Homme.

Quelque 29.700 personnes sont arrivées au Royaume-Uni cette année à bord de petits bateaux, contre 45.700 en 2022, un recul que le gouvernement met sur le compte de l'effet dissuasif du durcissement de sa politique.
Lundi 11 Décembre 2023
Dakaractu




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