Commune de Ziguinchor : Les non-dits dans l’attribution (gratuite) d’un lot pour l’installation d’une station ELTON (Rapport Cour des compte 2015-2018)


Après avoir procédé à la vérification de plusieurs pièces reçues de la commune qui a attribué un lot à l’entreprise Elton pour l’installation d’une station de vente de carburant, la cour des comptes fait l’étude de tous ces documents reçus. Leur examen a révélé un vice dans la procédure d’affectation du lot concerné auquel s’ajoute la gratuité de l’opération.



 

La cour rappelle que le conseil municipal a tenu une session ordinaire le 06 juin 2015. Le procès-verbal de ladite session informe que le premier adjoint au maire a fait une intervention sur l’autorisation de construction d’une station d’essence Elton de dernière génération pour l’épanouissement et la réponse des besoins des populations ». Dans ce procès-verbal, il est précisé que cette intervention a été effectuée « pour information ». Ainsi, le lieu pour l’installation de la station et la superficie requise ne ressortent pas dans le procès-verbal. Cependant, les deux seules délibérations prises lors de cette session, au regard du procès-verbal, concernent l’adoption « du lotissement des quartiers de Djibock et Colobane ainsi que le changement de destination des réserves foncières (…) de Kandialang, de Djirigho » et celle de la « coopération avec la commune de Grand-Yoff », fait apparaître le rapport.  Toutefois, la commune a communiqué à la Cour l’extrait de délibération n° 10/CZ/SM/ du 08 juin 2015 dont le premier article précise, à son dernier tiret, que « le conseil municipal de Ziguinchor autorise l’affectation d’un lot pour l’installation de la Station-Service Elton ».



La Cour dit relever une contradiction entre ces deux documents. En effet, le procès-verbal de la session ordinaire du 06 juin 2015 évoque une « autorisation de construction d’une station d’essence Elton » alors que l’extrait de délibération, pris en référence à la même session ordinaire, consacre « l’affectation d’un lot pour l’installation de la Station-Service Elton ». Or, note l’organe de contrôle, «  le procès-verbal n’a nullement évoqué la mise en vote de l’affectation de ce lot et l’adoption de cette affectation par le conseil municipal ».  Ainsi, l’affectation par l’organe exécutif d’un lot à ELTON, en violation du principe de l’autorisation préalable de l’organe délibérant, est entachée d’un vice de procédure. En retour, le maire, Abdoulaye Baldé, évoque « une erreur de prise de note du secrétaire de séance ». Selon la cour des comptes,  il s’agissait effectivement d’une affectation » d’une parcelle à la Compagnie Elton. La Cour estime que l’erreur consistant à écrire « autorisation de construction » à la place de « affectation d’un lot » pourrait être admissible. Les éléments de la cour considèrent que la procédure d’affectation d’un lot pour l’installation de la station de services Elton est viciée en raison de plusieurs manquements.

 

 

 

Affectation à titre gratuit du lot pour l’installation d’une station de services



La cour rappelle l’article 195 du code général des collectivités territoriales qui identifie le produit de l’exploitation du domaine notamment la « location de terrains communaux » comme faisant partie des recettes de fonctionnement. Selon elle, « cette option devait être privilégiée pour une commune confrontée à des contraintes budgétaires et qui n’a pas besoin d’offrir une gratuité pour attirer des distributeurs de carburant qui y sont déjà présents en nombre ».



Toutefois, « les autorités n’ont pas signé un contrat bail pour l’exploitation commerciale du lot » remarque la cour.  En effet, le lot a été attribué par le maire sans contrepartie financière alors qu’il est situé sur la route du Boulevard 54 KM, en face de la pharmacie Tilène. La Cour constate que cette affectation gratuite interpelle eu égard notamment à l’emplacement commercial du lot sur la section Ziguinchor-Mpack-Bissau, à cette route transfrontalière attire l’intérêt de plusieurs opérateurs privés. Pour toutes ces raisons, la commune devrait, estime la cour, en bonne règle de gestion, « mettre en location ce lot extrait, de surcroît selon le maire, de son domaine privé. ».  La Cour relève que dans le cadre de la « location de terrains communaux », la commune avait la possibilité d’appliquer le décret n° 2010-439 du 6 avril 2010 fixant le barème du prix des terrains nus et des terrains bâtis, applicable en matière de loyer. Ce décret fixe, au titre XI, la valeur du mètre carré d’un terrain nu à 20 000 F CFA pour les quartiers du secteur 2 polarisant H.L.M Néma, Boudody, Goumel-Diéfaye, en bordure du Boulevard des 54 m (100 m de part et d’autre), Cité Biagui I et Cité Biagui II.



Mais selon le maire, « le lot ayant servi à la construction d’une station-service, n’a pas été mis à la disposition du bénéficiaire sans contrepartie financière. En effet, en plus d’un accord qui avait permis le recrutement d’une dizaine de jeunes de la commune, l’entreprise ELTON verse désormais une redevance annuelle ».



La Cour considère qu’au-delà de l’ordre de recette, le maire aurait dû communiquer la copie d’une quittance délivrée par la recette perception municipale, d’un ordre de virement ou d’un chèque émis par la Compagnie au nom de la commune pour administrer la preuve d’un règlement effectué par ELTON. Mais, aucun de ces documents de paiement n’a été produit au titre des exercices de contrôle allant de 2015 à 2018. Ainsi, « la commune n’a reçu de la Compagnie Elton, durant cette période, ni des loyers ni des recettes relatives aux droits pour occupation du domaine public ».
Lundi 13 Mai 2024
Dakaractu



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