Ces femmes qui, comme Diam's, choisissent la conversion à l'islam


Ces femmes qui, comme Diam's, choisissent la conversion à l'islam
Dans son album Brut de femme paru en 2003, Diam's chante: "J'sais que j'suis pas une bombe latine ni une blonde platine". C'est déjà ça, mais cela ne dit pas grand chose de Mélanie Georgiades, la rappeuse de 32 ans qui rompt avec plusieurs années de silence dans une autobiographie publiée jeudi 27 septembre aux éditions Don Quichotte. Pour en savoir un peu plus, mieux vaut se pencher sur le message qu'elle a envoyé vendredi 14 septembre sur son compte Facebook, en préambule à la publication de son livre, simplement intitulé Diam's.

"Un jour je me suis tue et je suis partie sans dire au revoir. Ce n'était pas du dédain croyez-moi, ce n'était pas non plus de l'arrogance ni de l'ingratitude, mais j'avais tellement de choses à dire qu'il m'aurait fallu bien plus de cinq minutes sur scène ou d'une simple vidéo postée sur internet", raconte-t-elle dans la longue lettre manuscrite publiée sur le réseau social.

Un livre, "l'ultime moyen de rétablir des vérités"

En novembre 2009, Paris-Match publie un long reportage sur la rappeuse, photographiée voilée et sortant d'une mosquée en compagnie de son mari (regardez notre diaporama en bas de page). En plein débat sur l'interdiction du voile intégral dans les lieux publics, ces clichés volés font scandale. Le malaise est d'autant plus grand que la rappeuse refuse dès lors de s'exprimer dans les médias, renvoyant aux textes de son album S.O.S, qui paraît en décembre 2009.

Ce livre, achevé en juillet dernier, est "l'ultime moyen de rétablir des vérités", poursuit-elle dans sa lettre. Puis dans son livre, avouant avoir été "dépassée" par le succès et les intrusions dans sa vie privée, Diam's estime que "ce n'est pas tant (sa) conversion qui a gêné que (son) voile". "Ma décision de porter le voile est le fruit d'une réflexion personnelle, intime et mûrie, le fruit de mes lectures et de mes convictions. Jamais une personne dans mon entourage ne m'a dicté telle ou telle conduite à suivre", affirme-t-elle. Catholique sans avoir eu de véritable éducation religieuse, Diam's dit dans son livre avoir trouvé le salut d'abord dans la prière, puis dans la lecture du Coran lors d'un voyage à l'île Maurice en décembre 2008.

Pas d'interviews avec des hommes

Depuis et jusqu'à ces derniers jours pour la promotion de son livre, Diam's disparaît des écrans radars, refusant les interviews et parvenant à tenir secrète la naissance de son premier enfant, qu'elle dévoile en 2012 à la fin de son autobiographie. Aujourd'hui, Diam's refuse toujours les séances photos mais accepte les interviews. Selon VSD, qui rapporte des propos de l’éditrice du livre, la rappeuse refuserait toutefois d'accorder des interviews à des hommes.

Si la démarche de la rappeuse est éminemment personnelle, de nombreuses personnes s'émeuvent de la conversion de celle que les médias avaient pris l'habitude de présenter comme "l'idole de la génération… désenchantée". À l'image de Fadela Amara, l'ancienne secrétaire d’État à la Ville de François Fillon et ex-présidente du mouvement "Ni putes ni soumises", selon qui Diam's est "un vrai danger pour les jeunes filles des quartiers populaires, parce qu’elle donne une image de la femme qui est une image négative". Sur le web, certains pointent du doigt une islamophobie rampante, mais les commentaires des internautes flirtent le plus souvent avec le "point Godwin", notait Marianne2.fr en 2009.
Le sujet ne peut se résumer en quelques centaines de mots, mais le Huffington Post a souhaité en savoir plus sur ces femmes qui se convertissent à l'islam en France.

Il n'existe aucune statistique officielle sur le nombre de conversions à l'islam en France, encore moins de chiffres précis sur le nombre de femmes qui passent le pas. Toutefois, une dizaine de personnes se convertiraient à l'islam chaque jour en France, selon des chiffres de Didier Leschi, ancien chef du bureau des cultes au ministère de l'intérieur interrogé par La Croix en 2006. Soit 3.600 convertis par an environ, "selon les remontées que nous font les responsables associatifs musulmans", expliquait Didier Leschi (contacté par le Huffington Post, le bureau des cultes n'a pas souhaité confirmer ces chiffres). Il s'agirait "en majorité d'hommes de moins de 40 ans", indiquait Le Monde dans un article publié en septembre 2007.

Pour comparaison, près de 5.200 Britanniques dont 75% de femmes, se seraient convertis à l’Islam en 2011 selon une étude réalisée par des chercheurs britanniques. Selon l'enquête, un quart de ces femmes ont été attirées par le statut que cette religion leur confère. Ces reconverties reprocheraient notamment à la société britannique l’abus de l’alcool et une trop grande liberté sexuelle parmi les jeunes. De manière plus générale, elle se sentirait ainsi protéger "des bouleversements socioculturels qu’a connus la Grande-Bretagne au cours des dernières décennies". En France, des raisons similaires semblent animer les femmes converties à l'islam.

Loïc Le Pape est sociologue et chercheur associé à l'IREMAM (Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman:

"Une grande partie des conversions échappe aux mosquées, notamment celles des femmes, qui se font le plus souvent dans l'intimité, dans la sphère privée, avec de petits cercles d’inter-connaissances, parfois même des réseaux exclusivement féminins. De manière générale, les femmes fréquentent moins les mosquées que les hommes. En France, il s'agit souvent de vieilles mosquées où la place des femmes est réduite à la portion congrue, où elle n'ont pas d'espaces réservés. On peut d'ailleurs formuler l'hypothèse que plus on construit de mosquées plus les femmes les fréquenteront.
On peut distinguer plusieurs types de conversions. D'abord les femmes "mystiques", très peu nombreuses, qui se convertissent au Soufisme et exercent leur nouvelle religion dans des conféries féminines. Ensuite, la conversion "amoureuse", c'était le cas de la plupart de celles que j'ai rencontrées. Pas nécessairement pour se marier car elle n'ont absolument pas besoin de se convertir, mais comme un cadeau, une preuve d'amour. C'est davantage un échange intime qu'un fait religieux. Par la conversion, on signifie à l'autre qu'on est très attaché à lui. Enfin, j'ai rencontré des jeunes femmes très interessées par le monde arabe, la langue, les voyages... Elles s'étaient converties dans une démarche plus spirituelle que religieuse. Je n'ai pas travaillé dans des endroits où la pression sociale est forte, mais il y a selon moi très peu de conversions imposées.

Les femmes que j'ai interrogées avaient quasiment toutes fait le choix de se voiler. Elles avaient pris le voile après s'être converties, parfois plusieurs années après. La plupart sont "accommodantes", et disent 'je porte le voile dans l'espace public, mais je l'enlève en arrivant au boulot, si on me le demande'. D'autres mettent le voile de manière plus intransigeante et sont obligées d'organiser leur vie en fonction de ce choix. Elles deviennent mères au foyer, travailleurs indépendants, auto-entrepreneurs. Cela les coupe d'une partie du monde du travail, mais pas de leur vie sociale.

Les commentaires négatifs qui sont faits sur ces conversions renvoient à une peur et une meconnaissance historiques de l'islam. Mais cela renvoie surtout à la question du libre-arbitre de la femme dans la société. C'est un réflexe archaïque significatif de la distinction entre hommes et femmes. Tout comme il y a quelques décennies on considérait de manière négative les femmes qui travaillaient, aujourd'hui on a du mal à considérer de manière positive les femmes qui font le choix conscient de l'islam. Au-delà de l'aspect religieux, c'est la continuité d'une vision de la femme inférieure à l'homme, de la femme qui a du mal à prendre des décisions et à les assumer. Concernant la burqa, plusieurs études montrent que les femmes qui la portent sont majoritairement converties."

Géraldine Mossière est anthropologue et professeure adjointe à l’Université de Montréal. Elle a étudié les trajectoires de femmes converties à l'islam en France et au Québec. Elle est citée sur le site de la Communauté Francophone de confession musulmane:

"C’est par conviction que ces femmes adhèrent à l’islam et les raisons qui motivent cette décision sont fort différentes. (...) Elles se placent en marge de leur groupe d’origine et adoptent une identité très stigmatisée dans leur milieu. Elles savent très bien que cet acte les marginalisera.
Le statut de la femme n’est plus le même et peut-être que cela ne convient pas à toutes (...). Les femmes converties avec lesquelles je me suis entretenue m’ont pour la plupart présenté leur rôle de mère et d’épouse comme un idéal qui les satisfait. (...) Les nouvelles musulmanes inversent l’argument des féministes en considérant que les femmes en Occident sont devenues des objets, des faire-valoir. Elles se sentent au contraire beaucoup plus libérées, car le voile leur permet de sortir du mode de communication dominant fondé sur la séduction. Elles peuvent ainsi s’exprimer en tant qu’être humain, tout en valorisant leur féminité, comme épouse et mère.

En France, les motifs de la conversion naissent au cours des interactions entre les immigrants de confession musulmane et les Français 'de souche' dans les banlieues. (...) Elles affirment que le catholicisme ne répondait pas à leur quête de sens. La question de la Trinité ou l’idée que Dieu puisse avoir un fils leur paraissent inconcevables et aberrantes. Au contraire, l’islam leur apporte des réponses: c’est une religion rationnelle où tout est expliqué, justifié et codifié.

C’est une religion qui se pratique sur une base quotidienne, ce qui (...) requiert tout un apprentissage. Au début, les converties ne portent pas le voile, ne font pas leurs cinq prières à heures fixes et ne respectent pas toutes les prescriptions alimentaires. Mais, peu à peu, elles intègrent ces pratiques et respectent les prescriptions. À force de lire le Coran et de côtoyer la communauté musulmane, elles en viennent à porter le voile, chose que plusieurs se promettaient de ne jamais faire au moment de leur conversion. Je tiens d’ailleurs à souligner qu’aucune ne dit s’être voilée à la demande de son mari."

Audrey Robin a publié en 2008 Les filles de banlieue populaire : footballeuses et garçonnes de cité : mauvais genre ou nouveau genre?, une enquête sur la masculinisation des filles de banlieue:

"Beaucoup des jeunes femmes que j'ai rencontrées ont choisi le football, d'autres ont choisi de se convertir. Parfois les deux. Il s'agissait d'appartenir à un groupe, comme d'autres écoutent du rock'n'roll. Cela rassure, confère une identité.
Même s'il s'agit de façons de faire très différentes, ces filles qui se masculinisent en adoptant les codes des garçons font écho à celles qui se convertissent: elles veulent se faire respecter par les hommes, ne plus apparaître comme inférieures à leurs yeux."

La conversion à l'islam, comment ça marche ?

Diam's explique sa conversion dans son livre, dont un extrait a été publié par Le Nouvel Obs': "Je connaissais la façon dont cela devait se passer. Il me faudrait réciter le témoignage de foi que j'avais déjà appris par cœur et ce, devant témoin, puis me laver entièrement le corps, comme une purification. Ce n'était pas plus compliqué, puisqu'on entre en islam avec son cœur. Sauf que je n'avais pas de témoin! Je me disais alors que Dieu me suffirait.

Alors, comme une évidence, je me souviens m'être mise au milieu de la plage, j'ai levé la tête vers le ciel et pris Dieu à témoin: "O, mon Dieu, sois témoin que je veux me convertir à l'islam. J'ai lu Ton livre et je suis prête à tout suivre et tout pratiquer, pardonne-moi pour mon passé car je ne savais pas. Sois témoin que je dis du plus profond de mon cœur: "Achhadou an La illaha illa LLAH, Wa achhadou ana Mouhammad Rassoul Allah." Et, comme j'avais pu lire la traduction dans le petit livre sur la prière, j'ai récité aussi en français: "Je témoigne que rien n'est digne d'être adoré à part Allah et je témoigne que Mouhammed est le Messager d'Allah" J'ai alors vécu un moment de ferveur et de sincérité qui m'a transportée au-delà des mots. Après cela, je me sentais musulmane, j'étais musulmane."

Pour se convertir à l'islam, il n'existe effectivement pas de passages obligés tels que le baptême chrétien ou le Mikvé juif, deux rites immuables précédés de formalités officielles (ici et là). Concrètement, le wannabe-musulman doit prononcer devant témoins la chahada -la profession de foi de l'islam citée par Diam's- pour se convertir. Il devra ensuite pratiquer les piliers de l'islam -ou tout au moins accepter leur obligation- parmi lesquels les cinq prières quotidiennes, le jeûne du mois de ramadan, l'aumône aux plus pauvres, et le pèlerinage à La Mecque au moins une fois dans sa vie.
Lundi 1 Octobre 2012




1.Posté par olala le 02/10/2012 11:15
bravo!!!!maintenant parlez-nous des conversions au christianisme par souci d'équité......tout celaa çà nous rapporte quoi?la domination de gens paresseux au senegal...les marabouts peuvent sourire....le senegal ne se developpera jamais avec des prières seulement...au travail citoyens!!!!!!

2.Posté par bibi le 02/10/2012 16:07
(regardez notre diaporama en bas de page) il est où le diaporama ?



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