Jugé pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et apologie du terrorisme : Mamadou Diaou risque au moins un an de prison.


Agé de 22 ans, Mamadou Diaou a comparu ce mercredi 17 mars devant la Chambre criminelle à formation spéciale pour des faits liés au terrorisme. De nationalité française, il lui est reproché l'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et apologie du terrorisme. Des faits que l'accusé, vêtu d'un blouson de couleur bleu et blanc, a niés.

Le jeune français arrêté le 12 août 2016 à l'aéroport de Dakar a expliqué son séjour par des raisons touristiques. « Si je voulais me rendre en Syrie, je ne serais pas venu au Sénégal », a-t-il ainsi tenté de réfuter la thèse selon laquelle il devait passer par le Sénégal pour aller en Syrie, en Irak ou en Libye où se battaient des jihadistes.

Il a été aussi retenu lors de l'enquête préliminaire, que le candidat à l'hégire qu'il est supposé être, devait visiter la Mauritanie, la Guinée et le Mali. Un projet qu'il a balayé du revers de la main. Par contre, il ne nie pas avoir fait la connaissance de Ibrahima Ndiaye sur Facebook. Mais à l'en croire, ses discussions avec ce sénégalais n'avaient pas pour objet un quelconque projet de voyage en Syrie.

Interrogé de manière successive par les magistrats siégeant à la chambre criminelle sur ses fréquentations électroniques, Mamadou Diaou a reconnu avoir été membre d'un groupe sur Telegram appelé « News Kalifa ». Une plateforme où étaient diffusées à longueur de journée des contenus violents. Son intérêt pour ce genre de contenu, il l'explique par la curiosité.

Selon lui, entre 2014 et 2015, c'est ce genre d'informations qui dominait l'actualité. Pour autant, se justifie-t-il, ce qu'il regardait n'était pas en adéquation avec sa vision de l'Islam. À l'en croire, il ne doit y avoir de contrainte en Islam. Il a, dans cet ordre d'idées, contesté avoir déclamé que « la France est un pays de mécréants » comme l'a mentionné l'enquête préliminaire.

Par ailleurs, l'accusé qui se présente comme un musulman pratiquant, a prétendu avoir une connaissance très vague de l'Islam. Tout au plus, peut il énumérer les piliers de l'Islam qui, selon sa compréhension sont « la profession de foi, la prière, le jeune, la zakat et le hadj ». 

Sa connaissance limitée de l'Islam, il le justifie par un défaut d'instruction coranique. « Je n'en avais pas l'opportunité », s'est-il justifié. Pourtant, il a eu à fréquenter des prêcheurs radicaux en France alors qu'il n'avait que 15 ans. En effet, il a été établi qu'il avait dans son cercle d'amis un certain Yanis Ziari, condamné à 12 ans pour avoir tenté de mener des actions terroristes sur le sol français.

Mais Mamadou Diaou affirme devant la Cour criminelle qu'il n'a jamais été question de parler radicalisme avec l'un des frères Ziari dont leur dernier contact remonte à 2016. « S'il l'avait fait, j'aurais arrêté de le fréquenter », a-t-il essayé de convaincre. Il dit d'ailleurs ignorer la signification de ce mot. Dans la même veine, l'accusé affirme « entendre parler du jihad » qui, selon sa compréhension, est un effort personnel pour devenir meilleur.

De sa perception de ce qui se passe en Syrie, en Irak et en Libye, il dira que c'est un conflit politique qui oppose des musulmans. « Des musulmans se tuent entre eux », déplore Mamadou Diaou qui refuse de ranger les uns dans le camp des musulmans et les autres dans celui des mécréants. Questionné à ce propos par le représentant du ministere public, il a soutenu qu'un musulman n'a pas à se battre pour ce genre de causes.

Cependant, il n'ignore pas qui est Abou Bakr Al Baghdadi non sans préciser que ce qu'il retient du défunt chef de l'Etat islamique, c'est qu'il était un « terroriste ». un autre nom du terrorisme qui lui parle, c'est « Ben Laden ». Sa culture des figures du terrorisme se limite à ces deux noms.
Ces arguments avancés par Mamadou Diaou pour se sortir d'affaire n'ont pas convaincu le représentant du ministère public.

Revenant sur la procédure qui a abouti à l'arrestation du français d'origine malienne au Sénégal, il a rappelé que ce dernier a été appréhendé car « suivi et signalé ». Ensuite, le substitut du procureur convoque des faits qui ont attiré son attention. De l'avis du parquet, les images dont le caractère violent ne souffre d'aucune ambiguïté plaident contre l'accusé. 

L'attention du représentant du parquet, tel qu'il l'a fait savoir, est particulièrement attirée par des messages trouvés dans l'appareil de Mamadou Diaou par les enquêteurs. Ces messages qui étaient destinés à la famille de l'accusé une fois qu'il aura mis le pied en terre d'Islam, faisait allusion à son intention d'émigrer et de combattre. « Je suis parti chercher une maison au Paradis car la vie d'ici bas n'a aucune valeur, ne soyez pas triste pour moi, soyez heureux pour moi », aurait-il écrit.

Ecartant l'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste en raison du principe de rétroactivité de la loi, la loi punissant ce crime a été révisé en novembre 2016 alors que le mis en cause est arrêté en août de la même année, il a requis la condamnation de l'accusé pour apologie du terrorisme punie d'une peine d'un an à cinq ans de prison. En sus d'une amende d'un million de francs, il a aussi demandé la confiscation du téléphone de l'accusé car les faits incriminés ont été produits à travers cet outil.

L'avocat de la défense a pris le contrepied du parquet en soutenant qu'il n'y a pas de preuves matérielles contre son client. Dans sa plaidoirie, la robe noire de faire savoir que la lettre qu'aurait rédigée Mamadou Diaou à l'intention de sa famille n'a jamais été envoyée. En conséquence, l'avocat estime que l'intention n'a pas été traduite en acte. Il a demandé la relaxe pour son client qui risque au minimum un an de prison. Après une pause de 10 minutes, le tribunal a mis l'affaire en délibéré au 29 avril.

L'autre affaire qui devait passer devant la chambre criminelle et qui concerne des arabes maliens supposés liés aux auteurs des attentats de Grand Bassam a été reportée au 23 mars, sur demande de la défense. 
Mercredi 17 Mars 2021




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