Libye : le CNT amadoue l'entourage de Kadhafi pour le capturer

Selon Hicham Bouhagiar, membre de l'appareil militaire du Conseil de transition, le colonel se trouve soit à Bani Walid, soit à Syrte.


Libye : le CNT amadoue l'entourage de Kadhafi pour le capturer

Les nouveaux chefs militaires libyens font appel à des informateurs issus de l'entourage de Muammar Kadhafi pour localiser l'ancien "guide" en fuite, tout en prenant ses derniers bastions en étau pour les contraindre à la reddition. Hicham Bouhagiar, membre de l'appareil militaire qui appuie le Conseil national de transition (CNT) au pouvoir, supervise la traque lancée contre le fugitif, qui a dû quitter son palais fortifié de Tripoli après six mois de révolte. Selon lui, le colonel Kadhafi se trouve soit dans la région de Bani Walid, au sud-est de la capitale, soit dans sa ville natale de Syrte, à 450 km à l'est de Tripoli.

"Il y a des groupes qui le recherchent et qui essaient aussi d'intercepter ses appels. Il n'utilise évidemment pas de téléphone, mais nous connaissons des gens qui en utilisent autour de lui", dit-il. "En général, nous retrouvons beaucoup de gens qui ne font pas partie de son premier cercle, mais du deuxième ou du troisième, et nous leur parlons, poursuit Hicham Bouhagiar. Certains savent que le régime s'écroule et veulent s'assurer que cela ne tourne pas mal pour eux. (...) Ils veulent conclure des accords. C'est pour cela que nous avons créé la liste blanche. Tous ceux qui nous aident y sont inscrits."

Plus coriace que Saddam Hussein

Hicham Bouhagiar appartenait à un groupe d'opposition en exil, le Front national pour le salut de la Libye. Il a suivi un entraînement avec des forces spéciales au Soudan et en Irak dans les années 1980 puis a fait des études de commerce aux États-Unis avant de revenir créer une firme textile en Libye. Après le succès des révolutions tunisienne et égyptienne, il a rejoint le soulèvement libyen, prenant la tête des forces rebelles qui ont atteint Tripoli à partir du djebel Nefoussa. Il commande à présent des groupes de combattants bien entraînés qui ont pour tâche de traquer Muammar Kadhafi. Il a montré des rapports confidentiels indiquant numéros de téléphone, emplacements et cartes Google liés à des cibles.

Le colonel Kadhafi, issu d'un clan bédouin, pourrait se dérober aux recherches plus longtemps que ne l'a fait l'Irakien Saddam Hussein, arrêté par l'armée américaine alors qu'il se cachait dans un réduit souterrain près de sa ville natale de Tikrit quelques mois après sa chute, estime Hicham Bouhagiar. "Oui, Kadhafi pourrait vivre dans un trou. Il est fier d'être celui qui vit sous une tente. C'est un révolutionnaire de type stalinien, qui tentera de survivre n'importe où. Mais je ne crois pas qu'on mettra longtemps à le trouver. C'est le dernier épisode. Après avoir perdu Tripoli, il ne va plus avoir d'argent (...), ses moyens de ravitaillement sont vraiment coupés."

Quatre zones encore sous contrôle

Hicham Bouhagiar cite quatre zones encore sous le contrôle des kadhafistes - Tarhouna, Syrte et Bani Walid dans le nord, Sabha dans le sud - dont les nouveaux dirigeants du pays espèrent s'emparer par la négociation plutôt que par la force. "Les révolutionnaires sont déjà en force dans ces secteurs", fait-il valoir. "Certains disent que Syrte est l'endroit le plus difficile (à prendre) parce que c'est le lieu de naissance de Kadhafi, mais je ne le crois pas. Il me semble qu'à Syrte c'est moitié-moitié entre ceux qui sont vraiment engagés avec lui (...) et les 50 % restants qui savent que Kadhafi est néfaste au pays et qu'il doit partir", dit-il.

Le principal défi à relever est de gagner la confiance des habitants dans les secteurs pro-Kadhafi. "Ce n'est pas facile, car ils sont sous l'influence des médias de Kadhafi depuis 40 ans. Aujourd'hui, nous essayons de leur expliquer que nous ne sommes pas des terroristes et voulons le bien du pays." Quant au risque d'une campagne de sabotages montée par des loyalistes, que certains craignent de voir orchestrer un chaos comme celui qui a succédé durant des années à la chute de Saddam Hussein en Irak, Hicham Bouhagiar le prend au sérieux : "C'est possible, mais nous nous y préparons aussi, nous créons des unités dont nous avons la certitude qu'on ne peut pas les infiltrer. Nous mettons aussi sur pied notre centre de renseignement. Nous n'avons jamais fait cela, c'était une prérogative de Kadhafi ou de son gouvernement."

( Le point ) 

Mercredi 31 Août 2011




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