Popularisé par des chercheurs dans les années 80, le concept de « modèle islamo-wolof » revient en force dans le débat national avec toutefois une charge politicienne qui n'est pas nécessairement imputable à ses inventeurs. Certes, l'empire du Diolof et la religion musulmane ont été les axes autour desquels une nation sénégalaise s'est construite, au fil de l'histoire.
Mais le fait que le Sénégal soit, au-delà de cette filiation, une nation largement constituée et soudée est non seulement une réalité observable dans le temps mais aussi une évidence au vu des épreuves que nous vivons depuis trois ans. Sinon, comment expliquer la résilience de notre pays face à la violence inouïe d’une entreprise internationale et nationale visant à le désarticuler en vue de le plonger dans un chaos total.
L'échec relatif de cette entreprise conduit aujourd’hui certains de ses théoriciens à sortir du bois. Pour une sorte de bilan d'étape. Comme pour remonter le moral des troupes en débandade, dans l’espoir déraisonnable de les « tenir éveillées ».
Si les premiers concepteurs s'étaient inscrits dans une analyse historique et sociale, leurs épigones utilisent le concept de « modèle islamo-wolof » comme un cocktail Molotov intellectuel. En cela, rien d'original. Ils resservent les lubies éculées remises au goût du jour par un certain Bernard Lugan et qui tiennent en une explication simpliste à souhait des réalités politiques africaines : la bipolarisation entre « pays islamo-wolof » et périphérie non wolof, ou entre musulmans et non musulmans, ou entre agriculteurs et éleveurs, ... pour ne pas dire entre francophones et arabophones ou entre « quatre-communards » et « kaw-kaw ».
Cette fiction est censée infirmer l'existence de véritables nations chez nous et d'enjeux politiques autres que ceux relatifs à l'ethnie et à la religion. La construction nationale en voie de parachèvement au Sénégal est ainsi réduite à une prétendue « domination islamo-wolof » contre laquelle on appelle à une « véritable révolution politique et sociale » des périphéries. Une cagoule trop transparente pour masquer une vaine incitation à une révolte ethnico-religieuse.
Cette fixation sur un soi-disant « modèle islamo-wolof » a pourtant l’avantage de mettre en lumière le véritable enjeu des luttes d’aujourd’hui. Au-delà de l’édification d’une nation sénégalaise, qui est un acquis historique, c’est la trajectoire ascendante du Sénégal depuis l’alternance de l’an 2000 qui est au coeur d’un affrontement complexe dont aucun des acteurs mondiaux n’est absent, même si la plupart s’abritent encore derrière un écran de fumée. Figurant parmi les pays les moins avancés en 2000, le Sénégal est proposé par la Chine, en 2023, pour rejoindre le cercle des nations émergentes des Brics ! Le gaz et le pétrole lui ouvrent des perspectives nouvelles qui, ajoutées à sa longue tradition politique et diplomatique, préfigurent un bouleversement de la donne géostratégique en Afrique de l’ouest. Ce puissant Sénégal qui se profile perturbe les plans de tous ceux pour qui l’Afrique doit demeurer le juteux « ndawal » à se partager entre « grands ». La France bien sûr, mais pas seulement.
Alors, tous les coups sont permis. « Haro sur le Sénégal ! » devient le mot d’ordre international d’une coalition improbable et introuvable de faussaires en tous genres. Quand la démocratie sénégalaise se protège, en appliquant ses lois contre les brûleurs d’universités et de jeunes filles, on parle de « fin du modèle démocratique ». Quand elle réprime, avec les moyens judiciaires universellement reconnus, les incendiaires et les terroristes, on parle de « violation des droits humains » et de « libération des détenus politiques ». On se tait sur les crimes pastéfiens et on veut diaboliser le président Macky Sall dont le seul crime est de s’engager pour garantir la sécurité de son peuple et les principes de l’Etat de droit.
Une démocratie incapable de s’autoprotéger avec succès contre une violence minoritaire ne mériterait pas son nom. C’est en cela que l’épreuve actuelle représente une crise de croissance porteuse de bonnes nouvelles pour la santé et la maturité de notre démocratie. L’avenir de la nation sénégalaise est radieux si et seulement si les véritables patriotes savent distinguer l’essentiel de l’accessoire et se réunir autour d’un projet solide et cohérent d’accélération de l’émergence politique, économique et sociale de notre pays.
A ce propos, le moment est venu de dépoussiérer les drapeaux et les programmes souverainistes de notre jeunesse que la chute du Mur de Berlin a mis un temps sous l’éteignoir. C’est le meilleur service à rendre à la jeunesse consciente d’aujourd’hui pour lui éviter de sombrer dans des gesticulations stériles et de succomber aux manipulations. Les leçons de nos combats d’hier doivent permettre de donner un sens, une expression consciente, aux aspirations actuelles de nos jeunesses et de nos peuples à plus de dignité et moins de pauvreté. Il s’agit de leur éclairer le chemin d’une action utile et efficace dans un environnement international complexe, rempli de pièges mortels. Et de réussir la convergence nécessaire des luttes d’hier et des luttes d’aujourd’hui, contre les diviseurs et les illusionnistes.
Mamadou Bamba NDIAYE
Ancien député
Mais le fait que le Sénégal soit, au-delà de cette filiation, une nation largement constituée et soudée est non seulement une réalité observable dans le temps mais aussi une évidence au vu des épreuves que nous vivons depuis trois ans. Sinon, comment expliquer la résilience de notre pays face à la violence inouïe d’une entreprise internationale et nationale visant à le désarticuler en vue de le plonger dans un chaos total.
L'échec relatif de cette entreprise conduit aujourd’hui certains de ses théoriciens à sortir du bois. Pour une sorte de bilan d'étape. Comme pour remonter le moral des troupes en débandade, dans l’espoir déraisonnable de les « tenir éveillées ».
Si les premiers concepteurs s'étaient inscrits dans une analyse historique et sociale, leurs épigones utilisent le concept de « modèle islamo-wolof » comme un cocktail Molotov intellectuel. En cela, rien d'original. Ils resservent les lubies éculées remises au goût du jour par un certain Bernard Lugan et qui tiennent en une explication simpliste à souhait des réalités politiques africaines : la bipolarisation entre « pays islamo-wolof » et périphérie non wolof, ou entre musulmans et non musulmans, ou entre agriculteurs et éleveurs, ... pour ne pas dire entre francophones et arabophones ou entre « quatre-communards » et « kaw-kaw ».
Cette fiction est censée infirmer l'existence de véritables nations chez nous et d'enjeux politiques autres que ceux relatifs à l'ethnie et à la religion. La construction nationale en voie de parachèvement au Sénégal est ainsi réduite à une prétendue « domination islamo-wolof » contre laquelle on appelle à une « véritable révolution politique et sociale » des périphéries. Une cagoule trop transparente pour masquer une vaine incitation à une révolte ethnico-religieuse.
Cette fixation sur un soi-disant « modèle islamo-wolof » a pourtant l’avantage de mettre en lumière le véritable enjeu des luttes d’aujourd’hui. Au-delà de l’édification d’une nation sénégalaise, qui est un acquis historique, c’est la trajectoire ascendante du Sénégal depuis l’alternance de l’an 2000 qui est au coeur d’un affrontement complexe dont aucun des acteurs mondiaux n’est absent, même si la plupart s’abritent encore derrière un écran de fumée. Figurant parmi les pays les moins avancés en 2000, le Sénégal est proposé par la Chine, en 2023, pour rejoindre le cercle des nations émergentes des Brics ! Le gaz et le pétrole lui ouvrent des perspectives nouvelles qui, ajoutées à sa longue tradition politique et diplomatique, préfigurent un bouleversement de la donne géostratégique en Afrique de l’ouest. Ce puissant Sénégal qui se profile perturbe les plans de tous ceux pour qui l’Afrique doit demeurer le juteux « ndawal » à se partager entre « grands ». La France bien sûr, mais pas seulement.
Alors, tous les coups sont permis. « Haro sur le Sénégal ! » devient le mot d’ordre international d’une coalition improbable et introuvable de faussaires en tous genres. Quand la démocratie sénégalaise se protège, en appliquant ses lois contre les brûleurs d’universités et de jeunes filles, on parle de « fin du modèle démocratique ». Quand elle réprime, avec les moyens judiciaires universellement reconnus, les incendiaires et les terroristes, on parle de « violation des droits humains » et de « libération des détenus politiques ». On se tait sur les crimes pastéfiens et on veut diaboliser le président Macky Sall dont le seul crime est de s’engager pour garantir la sécurité de son peuple et les principes de l’Etat de droit.
Une démocratie incapable de s’autoprotéger avec succès contre une violence minoritaire ne mériterait pas son nom. C’est en cela que l’épreuve actuelle représente une crise de croissance porteuse de bonnes nouvelles pour la santé et la maturité de notre démocratie. L’avenir de la nation sénégalaise est radieux si et seulement si les véritables patriotes savent distinguer l’essentiel de l’accessoire et se réunir autour d’un projet solide et cohérent d’accélération de l’émergence politique, économique et sociale de notre pays.
A ce propos, le moment est venu de dépoussiérer les drapeaux et les programmes souverainistes de notre jeunesse que la chute du Mur de Berlin a mis un temps sous l’éteignoir. C’est le meilleur service à rendre à la jeunesse consciente d’aujourd’hui pour lui éviter de sombrer dans des gesticulations stériles et de succomber aux manipulations. Les leçons de nos combats d’hier doivent permettre de donner un sens, une expression consciente, aux aspirations actuelles de nos jeunesses et de nos peuples à plus de dignité et moins de pauvreté. Il s’agit de leur éclairer le chemin d’une action utile et efficace dans un environnement international complexe, rempli de pièges mortels. Et de réussir la convergence nécessaire des luttes d’hier et des luttes d’aujourd’hui, contre les diviseurs et les illusionnistes.
Mamadou Bamba NDIAYE
Ancien député
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