Les multiples mensonges de Nafissatou Diallo


Les multiples mensonges de Nafissatou Diallo

 

En quelques jours, la plaignante est passée de l'image d'une «employée modèle» à celle d'une manipulatrice.

 
Les premiers indices sur une «double vie» de la femme de chambre du Sofitel sont apparus rapidement. Ont-ils été exploités convenablement? Ce n'est pas évident. Dans la semaine qui suit l'arrestation de DSK, les autorités apprennent, par une conversation enregistrée, qu'un homme disant connaître Nafissatou Diallo a eu un échange avec un autre homme soupçonné de trafic de drogue. De quoi, déjà, les alerter sérieusement. Mais l'écheveau est compliqué à démêler. Ce n'est que mercredi dernier qu'ils reçoivent la traduction d'une autre conversation, selon le New York Times . Sur cette bande, au lendemain de l'agression présumée, l'employée du Sofitel, qui s'exprime en fulani, un dialecte de Guinée, lâche à son interlocuteur, détenu dans un centre pour immigrants illégaux en Arizona: «Ne t'en fais pas, ce type a beaucoup d'argent. Je sais ce que je fais.» La jeune femme, veuve et mère d'une fille de 15 ans, aurait en fait épousé religieusement, il y a plus d'un an, ce Gambien rencontré dans le Bronx, d'après Le Journal du dimanche .
 
La crédibilité de «l'employée modèle» du Sofitel est alors sérieusement entamée et l'accusation contrainte de le dire publiquement vendredi. Les enquêteurs se sont aussi aperçus, d'après le quotidien new-yorkais, que divers dépôts sur le compte bancaire de Nafissatou Diallo avoisinaient les 100.000 dollars depuis deux ans et qu'elle ne possédait pas moins de cinq abonnements téléphoniques. Les vérifications sur les mouvements financiers ou les fréquentations de la jeune Guinéenne auraient-ils pu aller plus vite? «Tout prend du temps», soupire un policier. Ce week-end, c'était même le portrait d'une quasi-prostituée «habituée à avoir des relations tarifées avec des clients du Sofitel» que dressait le tabloïd New York Post qui ajoutait, citant cette fois-ci une source proche de l'accusation, que la Guinéenne a continué à recevoir des hommes dans l'hôtel de Brooklyn où elle a été mise à l'abri, notamment des clients du Sofitel.
 
«Sortez d'ici, sortez d'ici!»
Une variante dans le récit de l'agression supposée a beaucoup perturbé les enquêteurs. Après avoir plusieurs fois expliqué être restée prostrée dans un recoin de l'hôtel, attendant que le client quitte la suite 2806 pour prévenir ses supérieurs, l'employée a finalement raconté, le 28 juin, qu'elle avait nettoyé une autre chambre avant de se confier. Une version qui ne serait d'ailleurs pas totalement corroborée par l'analyse de sa carte magnétique d'accès aux chambres. Le récit de son immigration aux États-Unis a, lui aussi, beaucoup fluctué. Au début, Nafissatou Diallo avait expliqué qu'elle et son premier mari avaient subi les exactions de l'armée guinéenne et qu'elle-même avait été violée. Puis, devant les enquêteurs, elle admettra que ses détails lui ont été suggérés pour renforcer sa demande d'asile déposée en 2004. Elle avait même appris par cœur le récit qui était enregistré sur une cassette. D'autres mensonges sont aussi révélés: des revenus minorés pour conserver son logement social, un enfant qui n'était pas le sien déclaré à charge.
 
Outre ces fluctuations, guère surprenantes pour une réfugiée politique qui savait son dossier bancal, ce sont surtout les liens entre Nafissatou Diallo et l'équipe du procureur qui se sont distendus. Dans les premiers temps, la jeune femme aurait bien collaboré. Mais, le 9 juin, une audition aurait mal tourné. Sa fille, qui l'accompagnait, aurait même entendu des cris -«Sortez d'ici, sortez d'ici!»- provenant des bureaux. Ce qu'ont démenti les autorités. Le dernier rendez-vous, le mardi 28 juin, semble avoir été épouvantable. La confiance était rompue.
Lundi 4 Juillet 2011




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