Ma réaction aux félicitations/interrogations du camarade Issa Basse.


Ma réaction aux félicitations/interrogations du camarade Issa Basse.
Le  camarade Issa Basse a fait preuve d’une maîtrise étonnante de l’expression en Wolof dans son texte.
En  effet, le Wolof, dans l’expression, a une culture de «l’allusion », pour gommer toutes les aspérités du langage qui risquent de gêner une bonne communication.
D’où l’expression « wolof du wax, dey leep », astucieusement utilisée dans le «  daxx  guinar, wax sa soxla », ou, « parler de quelqu’un en sa présence en faisant comme si l’on s’adressait à un autre ».
C’est ainsi qu’en commentant ma nomination aux fonctions de PCA à la Miferso,  Issa a su aborder, mine de rien, à  travers trois questionnements,  les questions d’actualité qui font un vif débat dans les médiats sur le sujet.
C’est d’abord, pourquoi ce choix porté sur moi, un retraité, à une  fonction qui se trouve dans un secteur  (minier) hors de mes compétences (agronome) ?
Ensuite, n’est ce pas une manifestation de la politique de « partage de gâteau », et/ou  de « transhumance » ?
Enfin, Sène ne va-t-il pas rendre le tablier pour ronger tranquillement son «  fromage », comme cela  est supposé être « la marque de fabrique des politiciens » qui s’agitent, et la motivation des transhumants?
Pour le premier questionnement, il me semble qu’il y a  trois  aspects à prendre en compte ; c’est celui de la légitimité du choix, et celui de sa pertinence.
En effet, le choix porté en ma personne pour exercer les fonctions de PCA  dans une entreprise publique d’un secteur quelconque de notre Economie relève exclusivement des prérogatives du Président de la République, qui, au regard des dispositions en vigueur de la Constitution héritée de Wade, « nomme aux emplois civils et militaires », sans en référer à quiconque où à quelle institution que ce soit.  Tant que ces dispositions constitutionnelles restent en vigueur, il est incongru de s’interroger sur cet aspect du sujet.
Pour qu’il n’en soit plus ainsi, il faudrait, comme je n’ai cessé de le faire, continuer à exiger l’adoption du Projet de réforme des Institutions proposé par la CNRI.
Pour ce qui est du second aspect du sujet, consiste à mettre en exergue ma situation de « retraité »  qui devait laisser la place au plus « jeunes ».
Cette interrogation rentre en contradiction avec les souhaits largement partagés de faire recours à l’expérience du «  troisième âge », dans des secteurs et ou des fonctions où leur expertise avérée semble nécessaire. 
Parmi ces fonctions, celles de Conseillers Techniques et de PCA sont les plus appropriées.
Pourquoi donc mettre ce besoin en opposition avec les besoins de promotion des jeunes, sans l’encadrement desquels par des plus anciens, serait une aventure sans lendemain ?
Pour le troisième aspect, l’on semble oublier que je ne suis pas seulement d’Agronome de profession, mais aussi Agro-éconmiste, doté de solides compétences en Economie et   d’une logue expérience d’administration de Services publiques au niveau régional et national, sans jamais avoir traîné de « casseroles » tout le long de ma carrière. 
Ce n’est pas pour rien que, dans la hiérarchie de la Fonction publique, je suis   « Ingénieur Agronome  Principal de Classe Exceptionnelle » ; ce qui en est la  plus haute hiérarchie.
Donc, s’interroger sur la pertinence du choix porté par le Président de la République serait, ou bien  ne pas me connaître professionnellement et au plan étique, soit ignorer quelles sont les fonctions d’un PCA, qui ne requièrent  qu’une compétence en Administration de grands Services publics, d’une étique et d’une moralité avérées.  Cette fonction est différente de celle d’un Directeur, qui requiert aussi des compétences  professionnelles avérées dans le secteur d’activité où  il exerce cette fonction.
Ainsi, ce premier questionnement ne peut, au mieux,  n‘être fondé que par un manque d’information de ce qui est en jeu dans ma nomination, et au pire, une tentative maladroite de porter le discrédit sur ma personne.
Pour ce qui est du second questionnement, il me semble être l’expression d’une véritable « culture culinaire » de la gestion de la chose publique, perçue comme un gâteau à  se partager une fois au pouvoir.
C’est ne voir dans la gestion de la chose publique que les avantages matériels et moraux qui y sont inhérents, et occulter les responsabilités publiques qu’elle confère.  C’est à l’aune de ces responsabilités que les avantages matériels et moraux sont mesurés.
 Ceux qui sacrifient les premiers pour abuser des seconds, ne devraient pas être perçus comme la norme, mais l’exception contre laquelle des sanctions exemplaires devraient être exigées par les citoyens qui les  financent en contrepartie d’un service public attendu.
Pour ce faire, la « traque des biens supposés  mal acquis », et l’OFNAC, sont des instruments redoubles pour tout dépositaire d’une Fonction publique dans l’éradication de  cette « culture culinaire » de la gestion de la Chose publique.
Malheureusement, le retard pris dans l’adoption du Projet de Réforme des Institutions soumis par la CNRI au Président de la République, masque, aux yeux de l’opinion, toute la portée révolutionnaire de cette rupture dans la manière dont la Chose publique est gérée jusque là.
C’est cela  qui a fait que des Sénégalais, dont malheureusement certains dans notre Parti, n’ont pas encore pris conscience de ce tournant, et continuent de voir les dépositaires du Service public avec les mêmes  « yeux » qu’au paravent.
C’est cela qui a motivé ce vif débat sur la transhumance encours, dans lequel, certains ont vu  ma nomination, comme une forme de «  transhumance ».
En fait, de quoi s’agit- il ?
 La « transhumance », au plan politique, est aujourd’hui assimilée au  fait de quitter son Parti qui a perdu le pouvoir, pour rejoindre celui du vainqueur.
Au Sénégal, il est salutaire que depuis longtemps, la morale et l’étique condamnent cette pratique qui est  perçue comme une perversion du champ politique.
Sa persistance relève, à mon sens, de trois considérations distinctes.
 En effet, il y a dans notre pays, comme ailleurs dans le monde, des « légitimistes » qui sont constitués de personnes dont la situation de rente dont elles jouissent,  les obligent à être toujours du côté du pouvoir.
 Il y a d’autres, qui dans l’opposition, rendent les tabliers pour rallier le camp du pouvoir juste pour des motifs de carrière.
 Et  enfin, il y a d’autres qui rejoignent le camp de la victoire à la recherche d’une impunité.
Pour toutes ces trois catégories,  la «  culture culinaire » de la gestion des Affaires  publiques est la chose  la  mieux partagée.
Mais qu’en gagne le pouvoir qui les reçoit ?
 Certes , la « transhumance »  affaibli  politiquement  son adversaire  qui  en est   victime,  mais, le bénéficiaire  est  perdant électoralement,  comme l’expérience l’a montré sous Diouf et  sous Wade,  du fait du rejet, largement partagé par l’opinion,  d’un tel comportement politique.
Les « transhumants » portent en bandoulière leur discrédit dans les rangs du pouvoir hôte.
De sorte que, paradoxalement, c’est le pouvoir qui en bénéficie pour stabiliser son règne, qui crée, de cette manière, en même temps,  les conditions de son rejet par les populations.
Mais  ce qui est regrettable dans ces débats, c’est l’amalgame qui est délibérément entretenu entre la «  transhumance », et la stratégie d’alliance pour accéder au pouvoir.
En effet, autant la « transhumance » est largement rejetée par notre peuple, autant il est convaincu qu’il n’est plus possible d’accéder  démocratiquement et de façon transparente au pouvoir, et de gouverner dans la stabilité et la paix,  que par un jeu d’alliance politique  la plus large possible autour des préoccupations des Sénégalais, face aux défis qu’ils ont à relever à chaque étape de l’évolution du monde.
Cette nécessité de rassemblement des forces vives de la Nation n’est pas encore suffisamment intériorisée, malgré les acquis démocratiques et sociaux  qu’elle a fait engranger à notre peuple. Et c’est sur ce retard que prospèrent les « accusations d’entrisme » et/ou de ralliement ».
En effet, aucun Parti politique, pris isolément, ne peut se prévaloir de ces conquêtes, mais elles  sont  toutes attribuées, volontiers, au Gouvernement de coalition entre le PS, PDS et le PIT de 1991, à la  CA.2000 constituée par  le Pôle de Gauche et le PDS avec l’alternance démocratique de  2000,  aux Assises Nationales de 2008,  au M23 de 2010, et à BBY en 2012.
Incontestablement, notre peuple a engrangé des avancées certaines à chacune de ces étapes de son évolution, en se donnant les moyens politiques et organisationnels, en termes de rassemblement, pour surmonter, au sein du nouveau pouvoir, les dérives ou autres tentations de préservation du statu quo contre lequel il s’est battu. 
D’où,  tout le danger de l’amalgame,  entretenu par les véritables adversaires des changements,  entre «  transhumance », «  entrisme »,  « ralliement » et «  politique de large rassemblement ».
Enfin, le troisième questionnement s’adresse directement à ma morale et à mon étique en politique.
Ceux qui ne me connaissent pas peuvent certes se poser des questions, mais ceux avec qui j’ai cheminé le long de mes 40 ans de militantisme  dans le PAI/PIT, et au sein du mouvement syndical, me surprennent qu’ils pissent un seul instant effleurer une telle idée me concernant.
Je ne parle pas de mes interventions durant la clandestinité et la semi clandestinité durant lesquelles l’usage de « nom d’emprunt » pour signer mes textes  me mettait sous abri,  face à l’adversaire politique. 
Mais, je rappelle seulement mes foncions de Directeur du Service Semencier National à partir de 1990, durant lesquelles tous mes articles ont été signés à mon nom.
  Cela  m’avait valu une réaction épidermique de Pierre Jacquemeau, Directeur, à l’époque,  de la Caisse Centrale de Coopération  Economique Française à Dakar, outré par mes critiques dans la presse, sur ses déclarations concernant la privatisation de la filière riz.
  Il ne pouvait pas supporter qu’un Directeur dont le Service bénéficie de son financement, puisse avoir l’outrecuidance de le critiquer ouvertement, et exigeait  mon limogeage à mon Ministre qui l’éconduit poliment.
 Le Ministre lui avait répondu que le débat public que lui-même avait initié ne pouvait pas laisser  un homme libre comme Ibrahima Sène, sans exprimer  publiquement son opinion, et que cela n’a rien à voir avec ses fonctions.
 Pour toute réponse, Jacquemeau  nous coupa les vivres, mais n’a pas  pu empêcher le Service Semencier de fonctionner correctement, grâce au soutien des  Ministres  de l’Agriculture et des Finances de l’époque.
De même , est ce que mes fonctions de Directeur de Cabinet de Ministre sous Wade m’avaient empêcher de critiquer publiquement ses dérives naissance vers un pouvoir despotique ?
Donc, croire qu’un poste de responsabilité dans une Fonction publique peut être un moyen pour me « faire rendre le tablier »,  ou «  briser ma plume », c’est peine perdue. Et je ne peux croire  que difficilement,  qu’il y ait dans notre Parti des gens qui puissent le croire.
Ce n’est pas à mon âge que l’on puisse me changer. Je me  suis fait sien,  l’adage Maure qui dit «  Si le Chameau change de mode d’alimentation qui l’a fait grandir et rendu fort et robuste, il signe en même temps son arrêt de mort prochaine ». On ne change pas un cheval qui gagne. Or mon cheval, ce sont mes convictions portées dans un engagement politique au sein du PIT. Le reste n’est que pure médisance et méchanceté gratuite.
  
  Ibrahima SENE PIT/SENEGAL/CDS.
                                                                                          Dakar le 3 Mai 2015
 
 
 
 
 
 
Dimanche 3 Mai 2015




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