Mouvement
pour le Fédéralisme
et la Démocratie Constitutionnels
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La paix selon la mafia, c’est aussi la paix !
En Casamance, il y a désormais, d’un côté, ceux qui sont pour la paix et, de l’autre, ceux qui sont pour la paix. Oui ! Vous avez bien lu ! Il y a désormais, en Casamance, d’un côté, ceux qui sont pour la paix et, de l’autre, ceux qui sont pour la paix. Car, dans cette région Sud du Sénégal, la paix selon la mafia, c’est aussi la paix. Et pour cause !
C’était le samedi 20 avril 2013. Fidèles à nous-mêmes, parce que conséquents avec nous-mêmes, nous avions convenu, des personnes ressources et nous, d’une rencontre, entre, d’une part, lesdites personnes ressources et, d’autre part, trois chefs de guerre de ATIKA, la branche armée du Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance (MFDC). En effet, nous nous disions que, puisque tout le monde parle ‘‘paix en Casamance’’ ; puisque tout le monde convient de la nécessité d’une telle paix, qui, donc, mieux que les combattants du MFDC, pour en parler de manière autrement plus vraie, plus authentique, avant d’aviser conséquemment et en toute responsabilité ?
En tout cas, c’était sans compter avec la toute-puissance d’éléments de l’establishment casamançais et des fossoyeurs de la paix disséminés partout, jusqu’au cœur même du maquis casamançais, quoique leur attitude, ici, contraste plutôt d’avec l’instrumentalisation dont a fait l’objet l’ex-chef de guerre de la faction sud-est du maquis casamançais, Ousmane Niantang DIATTA, et que les téléspectateurs ont pu découvrir, le 17 avril 2013, au journal de 20 heures de la télévision nationale RTS. En effet, ce soir-là, l’ex-chef du maquis sud-est de la Casamance, qui n’a plus aucune emprise sur sa désormais ex-faction depuis bientôt deux ans (il y serait même interdit de séjour), se fendait d’un appel au cessez-le-feu unilatéral, le troisième du genre selon lui, en « sa qualité », tenez-vous bien, « de chef d’état-major général de ATIKA ».
Aussi, ce rendez-vous stratégique du 20 avril 2013 était-il manqué in extremis, même si, pour nous, il ne fut qu’une partie remise, simplement parce que la paix en valait la chandelle.
Or, faut-il le rappeler, lorsqu’en août 2012, il nous avait été donné de tout entreprendre pour la libération des militaires et gendarmes enlevés puis détenus pendant près d’un an par ATIKA, quelle ne fut notre stupéfaction quand nous découvrîmes que nombre d’entre les acteurs (politiques ou sociaux) de la Casamance, qui passaient jusqu’alors pour d’irréductibles adversaires ou ennemis, étaient en réalité de fieffés collaborateurs dans leur combat funeste pour la promotion d’un conflit, celui qui oppose l’Etat au MFDC depuis 1982 ? C’est que nous nous trouvions, soudain, comme en territoire inconnu ; ou, plus exactement, sur un terrain miné.
En effet, nous avions redécouvert, à nos dépens, que tout homme était avant tout un homme, et que seul le processus de sa rencontre d’avec lui-même, en toutes circonstances, peut faire de lui un peu plus ou un peu moins que l’homme qu’il est. Ainsi, donc, le maquis casamançais, toutes factions confondues, recèle-t-il des hommes ; pas des sous-hommes, encore moins des surhommes, mais des hommes, et rien que des hommes.
L’establishment casamançais l’a d’autant mieux compris qu’il s’est offert des familiarités sulfureuses et redoutablement tentaculaires au sein du maquis casamançais. Ce qui fait que, présentement, quel que soit le raccourci dont vous vous serez servis dans votre comptabilité « macabre », vous trouverez, nécessairement, (i) à son actif, au moins :
-L’enlèvement et la prise en otage de militaires et gendarmes, fin 2011, par ATIKA, avec comme objectif, à terme, et sous peine de les faire tuer, d’user de ce levier terroriste pour obtenir, des autorités sénégalaises, l’implication de Sant’Egidio comme le médiateur (supposé indiqué) entre l’Etat et le MFDC, dans le cadre de négociations dites de paix.
-Le « cadeau empoisonné » que représente l’offre apparente de Salif SADIO à l’Etat, quant à la volonté présumé du chef de guerre de ATIKA d’aller à la table de négociations, en vue d’y négocier « une indépendance de la Casamance ». En réalité, ce « cadeau empoisonné » porte la signature de l’establishment casamançais.
(ii) Et à son passif, entre autres :
-Un certain nombre « d’erreurs qui risquent de perdre Macky SALL », pour reprendre la « Une » de Sud Quotidien N°5994 du lundi 22 avril 2013. Il y est notamment décrit, en substance, comment des personnes dites ressources, dont nombre d’éléments éminents de l’establishment casamançais, après avoir « séduit » avec succès le président de la République, nouvellement élu, travaillent à sa perte.
-Le fait, surtout, que l’establishment casamançais ait « offert » Salif SADIO au président Macky SALL, tout en se gardant, bien volontiers, et à dessein, de lui « offrir » les autres chefs de guerre de ATIKA, tels que César Atoute BADIATE, Ibrahima SANE, Ousmane Kompasse BODIAN, Paul Assine DIATTA, … Pis, l’establishment casamançais éprouve, de nos jours, un malin plaisir à inverser les rôles, notamment pour accuser le chef de l’Etat de faire peu de cas de l’existence comme tels de ces autres chefs de guerre de ATIKA et, ainsi, de refuser de leur tendre la main.
-La culture, encore et toujours, dans l’imaginaire d’éléments du maquis casamançais comme Salif SADIO, de l’idée qu’une indépendance négociée de la Casamance est possible, et que notamment la Communauté Sant’Egidio serait disposée ou prédisposée pour le montage, à cet effet, d’une table de négociations.
Certes, mes sorties acerbes et réitératives contre l’option ‘‘Sant’Egidio’’, telle qu’elle est brandie par l’establishment casamançais pour solutionner le « problème casamançais », s’inscrivent dans une seule et même logique et selon la même constance. Elles n’en incitent pas moins à des interrogations certainement légitimes, du genre : Pourquoi Biagui « le catholique » s’insurge-t-il à ce point contre l’option ‘‘Sant’Egidio’’ ?
Je veux être clair, le catholique que je prétends être n’éprouve, à titre personnel, aucune espèce d’aversion d’aucune sorte envers la Communauté Sant’Egidio en tant que telle. Et ce, d’autant plus que cette dernière revendique – et c’est là tout l’enjeu ! – sa part de catholicité. Mieux, le catholique que je prétends être attend, exige même, de cette communauté catholique, des actes ou actions rigoureusement catholiques, et rien que cela ; y compris, a fortiori, lorsque ces derniers peuvent déteindre durablement, voire de manière grave ou dangereuse, sur le processus de paix en Casamance.
En l’occurrence, le catholique que je prétends être accuse Sant’Egidio d’avoir péché par omission, et de continuer à s’y exercer, à des fins occultes, notamment en ne daignant pas déclarer – à l’intention de ceux des nôtres qui lui font appel, parce que, précisément, ils attendent d’elle qu’elle leur fournisse, à bon droit, l’indépendance de la Casamance – que non seulement elle n’en a guère le pouvoir, mais que, de toute manière ou de tout évidence, l’indépendance ne se négocie pas ; pas plus d’ailleurs qu’elle ne se donne. Elle s’arrache, politiquement ou militairement.
Le catholique que je prétends être accuse également Sant’Egidio d’avoir péché en parole, et de continuer à s’y essayer, notamment en revendiquant une prétendue levée d’un mandat d’arrêt qui n’a jamais existé formellement, à savoir le prétendu mandat d’arrêt contre Salif SADIO. Pis, Sant’Egidio feint ainsi d’ignorer que Salif SADIO ainsi que tous les autres chefs de guerre de ATIKA sont potentiellement sous le coup de la loi ; que par conséquent ils ne sont pas libres de mouvement sur toute l’étendue du territoire national ; et ce, aussi longtemps que n’interviendra pas un véritable accord de paix, parce que négocié et formel.
Le catholique que je prétends être accuse encore Sant’Egidio d’avoir péché en acte, et de continuer à s’y évertuer, en ayant pris acte, pour ainsi dire, de ce que le « fruit » en l’occurrence est mûr, par le fait exclusif d’autres acteurs qu’elle, quant à la résolution du conflit en Casamance ; alors que, au même moment, elle se veut la seule ONG (organisation non-gouvernementale) à même d’en assurer la récolte. En lieu et place, donc, de tous autres acteurs réels ou potentiels. Qui plus est, pas un mot de sa part en ce qui concerne le rôle qu’ont pu jouer ou que pourraient jouer à l’avenir les « Assises Nationales », qui passent, pourtant, de nos jours, pour la référence d’entre les références, en particulier dans le nécessaire processus de réforme de l’Etat sénégalais et de refonte de ses institutions, seule véritable voie susceptible, du moins selon nous, de nous conduire inexorablement vers une démocratie sénégalaise véritablement apaisée, dans le cadre d’un Sénégal « UN » et « PLURIEL ». En fait, un autre Sénégal, où une autre Casamance serait possible, au même titre cependant qu’une autre possible région naturelle du Fleuve, une autre possible région naturelle des Niayes, une autre possible région naturelle du Ferlo, une autre possible région naturelle du Sine-Saloum et une autre possible région naturelle du Sénégal Oriental.
Ne serait-ce donc pas un péché d’orgueil ou de suffisance que de s’adjuger, en l’occurrence, une prééminence, ainsi que de vouloir se substituer, indûment, aux « Assises Nationales », plutôt que de leur venir en appui, du moins si besoin en était ? Et, de surcroît, quand au même moment l’on ignore pratiquement tout des réalités nationales sénégalaises, en particulier casamançaises ?
En tout état de cause, aux affidés de Sant’Egidio qui, dans l’édition suscitée de Sud Quotidien, préconisaient « la tenue d’Assises nationales sur le statut de la Casamance », nous leur souhaitons la bienvenue dans la famille de l’indépendantisme casamançais et, surtout, nous leur disons : Oui à l’idée d’Assises nationales ! « Soixante-dix fois sept fois » oui ! Mais des Assises nationales qui, pour être telles, et seulement pour être telles, devront traiter du problème national qu’est le « problème casamançais », de manière résolument volontaire et objective, pour ensuite lui trouver une solution nationale, conformément à l’idée bien admise selon laquelle la Casamance est une partie intégrante de la Nation. Or, donc, les Casamançais, toutes Socio-Cultures et obédiences confondues, nous ont affirmé, solennellement, lors des Assises Casamanço-Casamançaises pour la Paix Définitive en Casamance du 1er septembre au 6 octobre 2002 à Ziguinchor, que, pour eux, la Casamance n’était une partie intégrante de la Nation sénégalaise que parce que toutes les autres régions naturelles du Sénégal (Le Fleuve, Les Niayes, Le Ferlo, Le Sine-Saloum et Le Sénégal Oriental) étaient aussi, chacune, et tout autant, une partie intégrante de la Nation sénégalaise.
En d’autres termes, les Casamançais avaient exigé, et exigent aujourd’hui encore, la réhabilitation des régions naturelles du Sénégal en tant que telles, en réponse précisément à la Question nationale, dont la crise en Casamance n’est qu’un dramatique pendant.
C’est donc en écho à ce cri du cœur des Casamançais que, faudrait-il encore le rappeler, mes amis et moi œuvrons, sans relâche, d’une part, à la réhabilitation comme telles des régions naturelles du Sénégal (qui n’est guère une fin en soi) et, d’autre part, à l’érection de ces dernières en provinces autonomes (avec à leur tête une haute autorité exécutive, juridiquement, financièrement et techniquement autonome), en vue de faire d’elles – et c’est là à la fois tout l’enjeu et tout l’intérêt ! – de véritables capitales économiques émergentes, en tant que pôles socioéconomiques, industriels, technologiques, parfaitement intégrés à l’économie nationale et sous-régionale voire continentale et mondiale.
Aussi, assurément, le président Macky SALL n’en pense-t-il pas moins. En témoigne, fort opportunément, son « concept de développement territorial », qui pourrait faire l’objet, selon le vœu même du chef de l’Etat, d’une expérimentation contrôlée en Casamance, avant de l’étendre aux autres régions du pays.
Les bonnes causes ont ceci de commun, en ce qu’elles ont le mérite, souvent, de réunir les bonnes idées. La volonté décentraliste du président Macky SALL en est manifestement une, qui rencontre, ici, et sans conteste, la nôtre. Celle-ci se présente cependant, ainsi que nous l’avons souvent dit et redit, comme « une volonté politique d’obliger l’administration à retourner à la maison », et avec elle les régions naturelles du Sénégal qui doivent trouver là les moyens utiles pour faire face à la prépotence de l’Etat. C’est cela la décentralisation véritable. Or, quand, en ce qui nous concerne, nous entendons ‘‘décentralisation’’, nous pensons ‘‘démocratisation’’ ou ‘‘démocratie’’, et vice et versa.
C’est que, en réalité, la décentralisation n’étant pas une simple opération de déconcentration ou de délocalisation, et l’administration par son truchement étant rentrée à la maison, l’émergence d’autorités locales élues, à compétence locale, s’impose, qui soient dotées en cela d’organes locaux indépendants tant du point de vue de leur fonctionnement que vis-à-vis des autorités centrales. A ce titre, et seulement à ce titre, la décentralisation s’identifie à la démocratie. Mieux, pour qu’elle s’accomplisse véritablement, la démocratie ne saurait faire l’économie du nécessaire recours aux mécanismes de la décentralisation. Et inversement !
L’on comprendra alors, aisément, que la décentralisation de type fédéral, telle que nous l’appelons de nos vœux, dans le cadre notamment d’une profonde réforme de l’Etat sénégalais et d’une refonte totale de ses institutions, ne puisse être autre qu’une mutualisation féconde de systèmes démocratiques propres aux entités concernées, en l’occurrence l’Etat et les régions naturelles du Sénégal érigées en provinces autonomes.
Ne nous méprenons pas, l’autonomie des régions naturelles du Sénégal est à ce prix, qui sous-tend une libre administration de ces dernières par des autorités régionales ou provinciales élues. Mais une autonomie à la fois, et seulement à la fois, juridique, financière et technique, garantie comme telle par la Constitution.
C’est donc là tout l’enjeu de l’autonomie (juridique, financière et technique) des régions naturelles du Sénégal dans l’administration des affaires locales, que, du reste, et sous aucun prétexte, nous ne saurions nous lasser d’appeler de nos vœux. Car elles existent, les affaires locales, et elles ont généralement pour noms : Travaux publics, Tourisme, Réseaux locaux de transport, Production, transport et distribution d’énergie, Artisanat, Pêche, Forêt, Industrie, Agriculture, Elevage, Commerce intérieur, Domaine, Aménagement du territoire, Environnement et gestion des ressources naturelles, Santé, Population et action sociale, Jeunesse, Sports et loisirs, Culture, Education, Planification, Urbanisme et habitat…
Méconnaître cela, notamment dans l’exécution du nécessaire chantier de réforme de l’Etat sénégalais et de refonte de ses institutions, serait faire fausse route. Ou, à tout le moins, ce serait prendre le risque de faire perdurer ad vitam aeternam la crise casamançaise. A Dieu ne plaise qu’une telle éventualité se produise !
Dakar, le 29 avril 2013.
Jean-Marie François BIAGUI
Président du Mouvement pour le Fédéralisme
et la Démocratie Constitutionnels (MFDC)
pour le Fédéralisme
et la Démocratie Constitutionnels
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La paix selon la mafia, c’est aussi la paix !
En Casamance, il y a désormais, d’un côté, ceux qui sont pour la paix et, de l’autre, ceux qui sont pour la paix. Oui ! Vous avez bien lu ! Il y a désormais, en Casamance, d’un côté, ceux qui sont pour la paix et, de l’autre, ceux qui sont pour la paix. Car, dans cette région Sud du Sénégal, la paix selon la mafia, c’est aussi la paix. Et pour cause !
C’était le samedi 20 avril 2013. Fidèles à nous-mêmes, parce que conséquents avec nous-mêmes, nous avions convenu, des personnes ressources et nous, d’une rencontre, entre, d’une part, lesdites personnes ressources et, d’autre part, trois chefs de guerre de ATIKA, la branche armée du Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance (MFDC). En effet, nous nous disions que, puisque tout le monde parle ‘‘paix en Casamance’’ ; puisque tout le monde convient de la nécessité d’une telle paix, qui, donc, mieux que les combattants du MFDC, pour en parler de manière autrement plus vraie, plus authentique, avant d’aviser conséquemment et en toute responsabilité ?
En tout cas, c’était sans compter avec la toute-puissance d’éléments de l’establishment casamançais et des fossoyeurs de la paix disséminés partout, jusqu’au cœur même du maquis casamançais, quoique leur attitude, ici, contraste plutôt d’avec l’instrumentalisation dont a fait l’objet l’ex-chef de guerre de la faction sud-est du maquis casamançais, Ousmane Niantang DIATTA, et que les téléspectateurs ont pu découvrir, le 17 avril 2013, au journal de 20 heures de la télévision nationale RTS. En effet, ce soir-là, l’ex-chef du maquis sud-est de la Casamance, qui n’a plus aucune emprise sur sa désormais ex-faction depuis bientôt deux ans (il y serait même interdit de séjour), se fendait d’un appel au cessez-le-feu unilatéral, le troisième du genre selon lui, en « sa qualité », tenez-vous bien, « de chef d’état-major général de ATIKA ».
Aussi, ce rendez-vous stratégique du 20 avril 2013 était-il manqué in extremis, même si, pour nous, il ne fut qu’une partie remise, simplement parce que la paix en valait la chandelle.
Or, faut-il le rappeler, lorsqu’en août 2012, il nous avait été donné de tout entreprendre pour la libération des militaires et gendarmes enlevés puis détenus pendant près d’un an par ATIKA, quelle ne fut notre stupéfaction quand nous découvrîmes que nombre d’entre les acteurs (politiques ou sociaux) de la Casamance, qui passaient jusqu’alors pour d’irréductibles adversaires ou ennemis, étaient en réalité de fieffés collaborateurs dans leur combat funeste pour la promotion d’un conflit, celui qui oppose l’Etat au MFDC depuis 1982 ? C’est que nous nous trouvions, soudain, comme en territoire inconnu ; ou, plus exactement, sur un terrain miné.
En effet, nous avions redécouvert, à nos dépens, que tout homme était avant tout un homme, et que seul le processus de sa rencontre d’avec lui-même, en toutes circonstances, peut faire de lui un peu plus ou un peu moins que l’homme qu’il est. Ainsi, donc, le maquis casamançais, toutes factions confondues, recèle-t-il des hommes ; pas des sous-hommes, encore moins des surhommes, mais des hommes, et rien que des hommes.
L’establishment casamançais l’a d’autant mieux compris qu’il s’est offert des familiarités sulfureuses et redoutablement tentaculaires au sein du maquis casamançais. Ce qui fait que, présentement, quel que soit le raccourci dont vous vous serez servis dans votre comptabilité « macabre », vous trouverez, nécessairement, (i) à son actif, au moins :
-L’enlèvement et la prise en otage de militaires et gendarmes, fin 2011, par ATIKA, avec comme objectif, à terme, et sous peine de les faire tuer, d’user de ce levier terroriste pour obtenir, des autorités sénégalaises, l’implication de Sant’Egidio comme le médiateur (supposé indiqué) entre l’Etat et le MFDC, dans le cadre de négociations dites de paix.
-Le « cadeau empoisonné » que représente l’offre apparente de Salif SADIO à l’Etat, quant à la volonté présumé du chef de guerre de ATIKA d’aller à la table de négociations, en vue d’y négocier « une indépendance de la Casamance ». En réalité, ce « cadeau empoisonné » porte la signature de l’establishment casamançais.
(ii) Et à son passif, entre autres :
-Un certain nombre « d’erreurs qui risquent de perdre Macky SALL », pour reprendre la « Une » de Sud Quotidien N°5994 du lundi 22 avril 2013. Il y est notamment décrit, en substance, comment des personnes dites ressources, dont nombre d’éléments éminents de l’establishment casamançais, après avoir « séduit » avec succès le président de la République, nouvellement élu, travaillent à sa perte.
-Le fait, surtout, que l’establishment casamançais ait « offert » Salif SADIO au président Macky SALL, tout en se gardant, bien volontiers, et à dessein, de lui « offrir » les autres chefs de guerre de ATIKA, tels que César Atoute BADIATE, Ibrahima SANE, Ousmane Kompasse BODIAN, Paul Assine DIATTA, … Pis, l’establishment casamançais éprouve, de nos jours, un malin plaisir à inverser les rôles, notamment pour accuser le chef de l’Etat de faire peu de cas de l’existence comme tels de ces autres chefs de guerre de ATIKA et, ainsi, de refuser de leur tendre la main.
-La culture, encore et toujours, dans l’imaginaire d’éléments du maquis casamançais comme Salif SADIO, de l’idée qu’une indépendance négociée de la Casamance est possible, et que notamment la Communauté Sant’Egidio serait disposée ou prédisposée pour le montage, à cet effet, d’une table de négociations.
Certes, mes sorties acerbes et réitératives contre l’option ‘‘Sant’Egidio’’, telle qu’elle est brandie par l’establishment casamançais pour solutionner le « problème casamançais », s’inscrivent dans une seule et même logique et selon la même constance. Elles n’en incitent pas moins à des interrogations certainement légitimes, du genre : Pourquoi Biagui « le catholique » s’insurge-t-il à ce point contre l’option ‘‘Sant’Egidio’’ ?
Je veux être clair, le catholique que je prétends être n’éprouve, à titre personnel, aucune espèce d’aversion d’aucune sorte envers la Communauté Sant’Egidio en tant que telle. Et ce, d’autant plus que cette dernière revendique – et c’est là tout l’enjeu ! – sa part de catholicité. Mieux, le catholique que je prétends être attend, exige même, de cette communauté catholique, des actes ou actions rigoureusement catholiques, et rien que cela ; y compris, a fortiori, lorsque ces derniers peuvent déteindre durablement, voire de manière grave ou dangereuse, sur le processus de paix en Casamance.
En l’occurrence, le catholique que je prétends être accuse Sant’Egidio d’avoir péché par omission, et de continuer à s’y exercer, à des fins occultes, notamment en ne daignant pas déclarer – à l’intention de ceux des nôtres qui lui font appel, parce que, précisément, ils attendent d’elle qu’elle leur fournisse, à bon droit, l’indépendance de la Casamance – que non seulement elle n’en a guère le pouvoir, mais que, de toute manière ou de tout évidence, l’indépendance ne se négocie pas ; pas plus d’ailleurs qu’elle ne se donne. Elle s’arrache, politiquement ou militairement.
Le catholique que je prétends être accuse également Sant’Egidio d’avoir péché en parole, et de continuer à s’y essayer, notamment en revendiquant une prétendue levée d’un mandat d’arrêt qui n’a jamais existé formellement, à savoir le prétendu mandat d’arrêt contre Salif SADIO. Pis, Sant’Egidio feint ainsi d’ignorer que Salif SADIO ainsi que tous les autres chefs de guerre de ATIKA sont potentiellement sous le coup de la loi ; que par conséquent ils ne sont pas libres de mouvement sur toute l’étendue du territoire national ; et ce, aussi longtemps que n’interviendra pas un véritable accord de paix, parce que négocié et formel.
Le catholique que je prétends être accuse encore Sant’Egidio d’avoir péché en acte, et de continuer à s’y évertuer, en ayant pris acte, pour ainsi dire, de ce que le « fruit » en l’occurrence est mûr, par le fait exclusif d’autres acteurs qu’elle, quant à la résolution du conflit en Casamance ; alors que, au même moment, elle se veut la seule ONG (organisation non-gouvernementale) à même d’en assurer la récolte. En lieu et place, donc, de tous autres acteurs réels ou potentiels. Qui plus est, pas un mot de sa part en ce qui concerne le rôle qu’ont pu jouer ou que pourraient jouer à l’avenir les « Assises Nationales », qui passent, pourtant, de nos jours, pour la référence d’entre les références, en particulier dans le nécessaire processus de réforme de l’Etat sénégalais et de refonte de ses institutions, seule véritable voie susceptible, du moins selon nous, de nous conduire inexorablement vers une démocratie sénégalaise véritablement apaisée, dans le cadre d’un Sénégal « UN » et « PLURIEL ». En fait, un autre Sénégal, où une autre Casamance serait possible, au même titre cependant qu’une autre possible région naturelle du Fleuve, une autre possible région naturelle des Niayes, une autre possible région naturelle du Ferlo, une autre possible région naturelle du Sine-Saloum et une autre possible région naturelle du Sénégal Oriental.
Ne serait-ce donc pas un péché d’orgueil ou de suffisance que de s’adjuger, en l’occurrence, une prééminence, ainsi que de vouloir se substituer, indûment, aux « Assises Nationales », plutôt que de leur venir en appui, du moins si besoin en était ? Et, de surcroît, quand au même moment l’on ignore pratiquement tout des réalités nationales sénégalaises, en particulier casamançaises ?
En tout état de cause, aux affidés de Sant’Egidio qui, dans l’édition suscitée de Sud Quotidien, préconisaient « la tenue d’Assises nationales sur le statut de la Casamance », nous leur souhaitons la bienvenue dans la famille de l’indépendantisme casamançais et, surtout, nous leur disons : Oui à l’idée d’Assises nationales ! « Soixante-dix fois sept fois » oui ! Mais des Assises nationales qui, pour être telles, et seulement pour être telles, devront traiter du problème national qu’est le « problème casamançais », de manière résolument volontaire et objective, pour ensuite lui trouver une solution nationale, conformément à l’idée bien admise selon laquelle la Casamance est une partie intégrante de la Nation. Or, donc, les Casamançais, toutes Socio-Cultures et obédiences confondues, nous ont affirmé, solennellement, lors des Assises Casamanço-Casamançaises pour la Paix Définitive en Casamance du 1er septembre au 6 octobre 2002 à Ziguinchor, que, pour eux, la Casamance n’était une partie intégrante de la Nation sénégalaise que parce que toutes les autres régions naturelles du Sénégal (Le Fleuve, Les Niayes, Le Ferlo, Le Sine-Saloum et Le Sénégal Oriental) étaient aussi, chacune, et tout autant, une partie intégrante de la Nation sénégalaise.
En d’autres termes, les Casamançais avaient exigé, et exigent aujourd’hui encore, la réhabilitation des régions naturelles du Sénégal en tant que telles, en réponse précisément à la Question nationale, dont la crise en Casamance n’est qu’un dramatique pendant.
C’est donc en écho à ce cri du cœur des Casamançais que, faudrait-il encore le rappeler, mes amis et moi œuvrons, sans relâche, d’une part, à la réhabilitation comme telles des régions naturelles du Sénégal (qui n’est guère une fin en soi) et, d’autre part, à l’érection de ces dernières en provinces autonomes (avec à leur tête une haute autorité exécutive, juridiquement, financièrement et techniquement autonome), en vue de faire d’elles – et c’est là à la fois tout l’enjeu et tout l’intérêt ! – de véritables capitales économiques émergentes, en tant que pôles socioéconomiques, industriels, technologiques, parfaitement intégrés à l’économie nationale et sous-régionale voire continentale et mondiale.
Aussi, assurément, le président Macky SALL n’en pense-t-il pas moins. En témoigne, fort opportunément, son « concept de développement territorial », qui pourrait faire l’objet, selon le vœu même du chef de l’Etat, d’une expérimentation contrôlée en Casamance, avant de l’étendre aux autres régions du pays.
Les bonnes causes ont ceci de commun, en ce qu’elles ont le mérite, souvent, de réunir les bonnes idées. La volonté décentraliste du président Macky SALL en est manifestement une, qui rencontre, ici, et sans conteste, la nôtre. Celle-ci se présente cependant, ainsi que nous l’avons souvent dit et redit, comme « une volonté politique d’obliger l’administration à retourner à la maison », et avec elle les régions naturelles du Sénégal qui doivent trouver là les moyens utiles pour faire face à la prépotence de l’Etat. C’est cela la décentralisation véritable. Or, quand, en ce qui nous concerne, nous entendons ‘‘décentralisation’’, nous pensons ‘‘démocratisation’’ ou ‘‘démocratie’’, et vice et versa.
C’est que, en réalité, la décentralisation n’étant pas une simple opération de déconcentration ou de délocalisation, et l’administration par son truchement étant rentrée à la maison, l’émergence d’autorités locales élues, à compétence locale, s’impose, qui soient dotées en cela d’organes locaux indépendants tant du point de vue de leur fonctionnement que vis-à-vis des autorités centrales. A ce titre, et seulement à ce titre, la décentralisation s’identifie à la démocratie. Mieux, pour qu’elle s’accomplisse véritablement, la démocratie ne saurait faire l’économie du nécessaire recours aux mécanismes de la décentralisation. Et inversement !
L’on comprendra alors, aisément, que la décentralisation de type fédéral, telle que nous l’appelons de nos vœux, dans le cadre notamment d’une profonde réforme de l’Etat sénégalais et d’une refonte totale de ses institutions, ne puisse être autre qu’une mutualisation féconde de systèmes démocratiques propres aux entités concernées, en l’occurrence l’Etat et les régions naturelles du Sénégal érigées en provinces autonomes.
Ne nous méprenons pas, l’autonomie des régions naturelles du Sénégal est à ce prix, qui sous-tend une libre administration de ces dernières par des autorités régionales ou provinciales élues. Mais une autonomie à la fois, et seulement à la fois, juridique, financière et technique, garantie comme telle par la Constitution.
C’est donc là tout l’enjeu de l’autonomie (juridique, financière et technique) des régions naturelles du Sénégal dans l’administration des affaires locales, que, du reste, et sous aucun prétexte, nous ne saurions nous lasser d’appeler de nos vœux. Car elles existent, les affaires locales, et elles ont généralement pour noms : Travaux publics, Tourisme, Réseaux locaux de transport, Production, transport et distribution d’énergie, Artisanat, Pêche, Forêt, Industrie, Agriculture, Elevage, Commerce intérieur, Domaine, Aménagement du territoire, Environnement et gestion des ressources naturelles, Santé, Population et action sociale, Jeunesse, Sports et loisirs, Culture, Education, Planification, Urbanisme et habitat…
Méconnaître cela, notamment dans l’exécution du nécessaire chantier de réforme de l’Etat sénégalais et de refonte de ses institutions, serait faire fausse route. Ou, à tout le moins, ce serait prendre le risque de faire perdurer ad vitam aeternam la crise casamançaise. A Dieu ne plaise qu’une telle éventualité se produise !
Dakar, le 29 avril 2013.
Jean-Marie François BIAGUI
Président du Mouvement pour le Fédéralisme
et la Démocratie Constitutionnels (MFDC)
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