La perle noire est tombée. Et tomberont avec lui tous les pilleurs, voleurs d’argent public, prête-noms et apprentis financiers qui, par faiblesse, indignité ou cupidité, l’ont aidé dans son entreprise d’accaparement.
C’est son appétit financier insatiable et gargantuesque qui l’a conduit à sa perte. Et l’irresponsabilité de son père l’a aveuglé au point de le pousser hors de toutes les limites de la morale et de l’éthique. Leur attitude envers nous a toujours été basée sur le mépris, l’arrogance et le manque de mesure. Ils se sont tout permis. Ils ont tout pris. Ils sont montés très haut. Sûrement trop haut. Et pour arriver si haut, ils ont marché sur des cadavres. C’est pourquoi toute cette richesse pue si fort. Imaginez toutes les vies que ces centaines de milliards volés auraient pu sauver. Imaginez nos mamans couchées sur des charrettes parcourant les brousses à la recherche d’un hypothétique poste de santé qui, de toute façon, ne pourrait même pas les sauver. Imaginez nos vieux pères laissés dans nos villages, végétant dans les affres de l’indigence et de l’incapacité.
Souvenez-vous des nourrissons morts il y a quelques années dans la crèche de l’hôpital régional de Ziguinchor suite à une coupure d’électricité, pendant que la SENELEC transférait des millions de dollars à des sociétés-écran. Imaginez ces élèves assis à 6 ou 7 par tables, dans des abris de fortunes, ces bicoques basses et branlantes leur servant de classes. Imaginez ces jeunes entassés dans des pirogues, jetés dans la gueule de la mer, en «route vers le sommet » de l’inconnu, poursuivant ailleurs le rêve qu’ils ont été interdits d’avoir chez eux.
Pendant que nous mourions, d’autres vivaient, riaient, festoyaient et levaient le verre de champagne dans leurs yachts et jets privés, à la recherche de paradis fiscaux pour planquer le fruit de nos peines et de notre sueur. Non ! Nous n’aurons aucune faiblesse. Nous voulons aussi en finir avec la société de l’hypocrisie, du masla, des compromissions et de la pitié mal placée.
Nous avons été pillés, violés et violentés. Nous voulons la justice totale. Et rien d’autre. Nous ne voulons ni marchandage ni médiation. La sanction doit être à la hauteur du crime. Les actes que nous posons ne sont pas pour nous-mêmes. Nous les posons pour nos enfants et petits-enfants. Car nous devons bien avoir l’ambition de leur léguer un pays digne et debout, prospère et en progrès continu. Et vous serez sûrement d’accord avec moi si je vous dis que ce rêve ne sera jamais réalité tant que nous aurons à la tête de notre pays des dirigeants voleurs et corrompus. Et de surcroit, incompétents. La pauvreté n’est pas une fatalité. C’est le résultat d’une politique.
Il avait promis de faire de notre pays la perle noire de l’Afrique. Il en a été incapable, en dépit des moyens immenses mobilisés et mis à sa disposition. Il prétendait être le seul à avoir l’intelligence nécessaire pour construire le Sénégal. Il a au contraire utilisé le Sénégal pour se construire une intelligence financière: Elle s’appelle Black Pearl Finance.
Black Pearl Finance (traduisez Perle Noire Finance), est le nom de l’une des sociétés d’intermédiation financière qu’il a créée sur les cendres de la BMCE West Africa Capital Finance. Black Pearl Finance a fait le montage de l’aéroport International de Ndiass. Elle a aussi gagné les marchés les plus juteux de la SENELEC après avoir imaginé, dessiné et mis en œuvre le plan Takkal. C’est une véritable ingénierie financière de la fraude qui a été mise sur pied grâce à Black Pearl (la perle noire). Ils ont utilisé des prête-noms simples et/ou opérationnels et créé des dizaines de sociétés écrans, souvent basées dans les paradis fiscaux des Iles vierges Britanniques, au Panama, au Luxembourg ou à Monaco, etc.
On nous avait tant vanté la grande intelligence de l’ingénieur financier venu de Londres. Le digne héritier de l’Homme le plus intelligent du Caire au Cap et de Dakar à Mogadiscio. On nous avait dit que nous autres, fils et filles de Massamba et de Mademba, n’avions d’autre choix que de nous aplatir devant lui, pour que passe sur nos échines courbées et déformées par les peines et les privations, sa caravane dorée en route vers le sommet de sa glorieuse destinée. Son père lui a donné notre terre (ministère des infrastructures), notre ciel (ministère des transports aériens), nos amis (la coopération internationale) et notre énergie (ministère de l’énergie), avec, cerises sur le gâteau, un titre de Ministre d’Etat.
Il a pris près de 10 années pour monter son empire financier. Il a fallu moins d’une année à nos braves enquêteurs et notre procureur pour démêler l’écheveau et mettre à nue la stratégie frauduleuse.
Je ressens aujourd’hui une grande fierté. Comme des millions de mes compatriotes, j’ai refusé la soumission. Nous avons préféré la mort dans l’honneur à la vie dans le déshonneur. Car c’est ce qu’on nous a appris. Je ne cesserai jamais de chanter et de louer les sénégalais qui se sont levés le 23 juin 2011. Les milliers qui étaient physiquement devant l’Assemblée nationale comme les millions qui y avaient leur cœur. Dans un article que j’avais publié dans la presse le 22 juin 2011, j’appelais les sénégalais à la résistance déterminée et farouche, jusqu’au sacrifice suprême s’il le faut, pour arrêter la spirale destructrice qui mine notre société et jette une ombre sur notre futur. J’avais évoqué la clameur qui s’élevait de tous les coins et recoins du pays, portée par la même volonté de changement et la même ambition de construire notre futur. Le lendemain, j’étais parmi les premiers devant l’assemblée nationale, le drapeau national à la main, déterminé à faire face.
Imaginez seulement ce qui se serait passé si nous étions restés chez nous ce jour là. La loi de Wade serait passée. Wade aurait été réélu grâce à ses 35% du premier tour en mars 2012 et notre pays aurait poursuivi une bien triste trajectoire. Wade serait encore notre Président, et nous serions encore toujours sous la servitude de l’empire financier de la « perle noire ».
Le système qu’ils ont fabriqué n’a pas d’égal en matière de délinquance. Prise illégale d’intérêt, concussion, abus de biens sociaux, transferts massifs de capitaux, évasion fiscale, accaparement, détournement, corruption à grande échelle, etc. Même le colon blanc n’a pas été capable de faire mieux, en plus de deux siècles de présence sur notre terre. Ce qu’ils ont fait est plus grave et plus pernicieux qu’un délit d’initié. Ils ont vampirisé notre économie. Ce sont de vrais pipelines qui ont été plantés au cœur de tous les secteurs de production de richesses de notre pays pour drainer durablement nos maigres ressources vers leurs planques dorées.
Ils apprendront à leurs dépens que la famille et la république ne font pas bon ménage. Cette leçon doit être bien apprise par tous les apprentis sorciers qui ont ou auront la prétention de gérer un Etat et une république sans savoir ce que cela veut dire.
Je demande au Procureur de rester ferme sur sa ligne et d’aller jusqu’au bout. Je veux dire au Ministre de la Justice qu’elle a le soutien de tous les patriotes, et elle l’aura aussi longtemps que son œuvre n’aura d’autre finalité que la sauvegarde de la République. Je veux dire à notre gouvernement que ni la CEDEAO ni une quelconque autre institution régionale ou internationale ne doivent entraver notre marche vers la République de la vertu et de la bonne gouvernance. Certains disent que notre constitution nous oblige à respecter nos engagements internationaux. Soit ! Je refuse toutefois que des obligations légales internationales mal conçues, produites dans des contextes situés et datés, donc peut-être déjà dépassés, prennent le dessus sur des demandes légitimes d’un peuple déterminé à avancer.
Ceux qui me connaissent savent bien que je suis un infatigable militant de l’intégration régionale et africaine. Mais je connais assez bien les limites objectives de la CEDEAO pour accepter qu’elle nous impose les interprétations de juges sortis de je ne sais où. Si les juges de la CEDEAO ne comprennent pas que les droits et libertés de quelques individus ne sont pas plus importants que les droits économiques et sociaux de tout un peuple, c’est qu’ils ne sont plus d’époque.
Aujourd’hui, Black Pearl la perle noire est en prison. Il y retrouvera certains de ses complices. D’autres l’y rejoindront. Et ainsi de suite. Cet acte, je l’espère, servira aussi de leçon à ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui. S’ils ne la retiennent pas, plus tard, ils seront eux aussi traqués, arrêtés et condamnés. Je ne leur souhaite pas un tel sort. Mais c’est à eux de choisir.
Par Cheikh Tidiane DIEYE
Docteur en Etudes du Développement
C’est son appétit financier insatiable et gargantuesque qui l’a conduit à sa perte. Et l’irresponsabilité de son père l’a aveuglé au point de le pousser hors de toutes les limites de la morale et de l’éthique. Leur attitude envers nous a toujours été basée sur le mépris, l’arrogance et le manque de mesure. Ils se sont tout permis. Ils ont tout pris. Ils sont montés très haut. Sûrement trop haut. Et pour arriver si haut, ils ont marché sur des cadavres. C’est pourquoi toute cette richesse pue si fort. Imaginez toutes les vies que ces centaines de milliards volés auraient pu sauver. Imaginez nos mamans couchées sur des charrettes parcourant les brousses à la recherche d’un hypothétique poste de santé qui, de toute façon, ne pourrait même pas les sauver. Imaginez nos vieux pères laissés dans nos villages, végétant dans les affres de l’indigence et de l’incapacité.
Souvenez-vous des nourrissons morts il y a quelques années dans la crèche de l’hôpital régional de Ziguinchor suite à une coupure d’électricité, pendant que la SENELEC transférait des millions de dollars à des sociétés-écran. Imaginez ces élèves assis à 6 ou 7 par tables, dans des abris de fortunes, ces bicoques basses et branlantes leur servant de classes. Imaginez ces jeunes entassés dans des pirogues, jetés dans la gueule de la mer, en «route vers le sommet » de l’inconnu, poursuivant ailleurs le rêve qu’ils ont été interdits d’avoir chez eux.
Pendant que nous mourions, d’autres vivaient, riaient, festoyaient et levaient le verre de champagne dans leurs yachts et jets privés, à la recherche de paradis fiscaux pour planquer le fruit de nos peines et de notre sueur. Non ! Nous n’aurons aucune faiblesse. Nous voulons aussi en finir avec la société de l’hypocrisie, du masla, des compromissions et de la pitié mal placée.
Nous avons été pillés, violés et violentés. Nous voulons la justice totale. Et rien d’autre. Nous ne voulons ni marchandage ni médiation. La sanction doit être à la hauteur du crime. Les actes que nous posons ne sont pas pour nous-mêmes. Nous les posons pour nos enfants et petits-enfants. Car nous devons bien avoir l’ambition de leur léguer un pays digne et debout, prospère et en progrès continu. Et vous serez sûrement d’accord avec moi si je vous dis que ce rêve ne sera jamais réalité tant que nous aurons à la tête de notre pays des dirigeants voleurs et corrompus. Et de surcroit, incompétents. La pauvreté n’est pas une fatalité. C’est le résultat d’une politique.
Il avait promis de faire de notre pays la perle noire de l’Afrique. Il en a été incapable, en dépit des moyens immenses mobilisés et mis à sa disposition. Il prétendait être le seul à avoir l’intelligence nécessaire pour construire le Sénégal. Il a au contraire utilisé le Sénégal pour se construire une intelligence financière: Elle s’appelle Black Pearl Finance.
Black Pearl Finance (traduisez Perle Noire Finance), est le nom de l’une des sociétés d’intermédiation financière qu’il a créée sur les cendres de la BMCE West Africa Capital Finance. Black Pearl Finance a fait le montage de l’aéroport International de Ndiass. Elle a aussi gagné les marchés les plus juteux de la SENELEC après avoir imaginé, dessiné et mis en œuvre le plan Takkal. C’est une véritable ingénierie financière de la fraude qui a été mise sur pied grâce à Black Pearl (la perle noire). Ils ont utilisé des prête-noms simples et/ou opérationnels et créé des dizaines de sociétés écrans, souvent basées dans les paradis fiscaux des Iles vierges Britanniques, au Panama, au Luxembourg ou à Monaco, etc.
On nous avait tant vanté la grande intelligence de l’ingénieur financier venu de Londres. Le digne héritier de l’Homme le plus intelligent du Caire au Cap et de Dakar à Mogadiscio. On nous avait dit que nous autres, fils et filles de Massamba et de Mademba, n’avions d’autre choix que de nous aplatir devant lui, pour que passe sur nos échines courbées et déformées par les peines et les privations, sa caravane dorée en route vers le sommet de sa glorieuse destinée. Son père lui a donné notre terre (ministère des infrastructures), notre ciel (ministère des transports aériens), nos amis (la coopération internationale) et notre énergie (ministère de l’énergie), avec, cerises sur le gâteau, un titre de Ministre d’Etat.
Il a pris près de 10 années pour monter son empire financier. Il a fallu moins d’une année à nos braves enquêteurs et notre procureur pour démêler l’écheveau et mettre à nue la stratégie frauduleuse.
Je ressens aujourd’hui une grande fierté. Comme des millions de mes compatriotes, j’ai refusé la soumission. Nous avons préféré la mort dans l’honneur à la vie dans le déshonneur. Car c’est ce qu’on nous a appris. Je ne cesserai jamais de chanter et de louer les sénégalais qui se sont levés le 23 juin 2011. Les milliers qui étaient physiquement devant l’Assemblée nationale comme les millions qui y avaient leur cœur. Dans un article que j’avais publié dans la presse le 22 juin 2011, j’appelais les sénégalais à la résistance déterminée et farouche, jusqu’au sacrifice suprême s’il le faut, pour arrêter la spirale destructrice qui mine notre société et jette une ombre sur notre futur. J’avais évoqué la clameur qui s’élevait de tous les coins et recoins du pays, portée par la même volonté de changement et la même ambition de construire notre futur. Le lendemain, j’étais parmi les premiers devant l’assemblée nationale, le drapeau national à la main, déterminé à faire face.
Imaginez seulement ce qui se serait passé si nous étions restés chez nous ce jour là. La loi de Wade serait passée. Wade aurait été réélu grâce à ses 35% du premier tour en mars 2012 et notre pays aurait poursuivi une bien triste trajectoire. Wade serait encore notre Président, et nous serions encore toujours sous la servitude de l’empire financier de la « perle noire ».
Le système qu’ils ont fabriqué n’a pas d’égal en matière de délinquance. Prise illégale d’intérêt, concussion, abus de biens sociaux, transferts massifs de capitaux, évasion fiscale, accaparement, détournement, corruption à grande échelle, etc. Même le colon blanc n’a pas été capable de faire mieux, en plus de deux siècles de présence sur notre terre. Ce qu’ils ont fait est plus grave et plus pernicieux qu’un délit d’initié. Ils ont vampirisé notre économie. Ce sont de vrais pipelines qui ont été plantés au cœur de tous les secteurs de production de richesses de notre pays pour drainer durablement nos maigres ressources vers leurs planques dorées.
Ils apprendront à leurs dépens que la famille et la république ne font pas bon ménage. Cette leçon doit être bien apprise par tous les apprentis sorciers qui ont ou auront la prétention de gérer un Etat et une république sans savoir ce que cela veut dire.
Je demande au Procureur de rester ferme sur sa ligne et d’aller jusqu’au bout. Je veux dire au Ministre de la Justice qu’elle a le soutien de tous les patriotes, et elle l’aura aussi longtemps que son œuvre n’aura d’autre finalité que la sauvegarde de la République. Je veux dire à notre gouvernement que ni la CEDEAO ni une quelconque autre institution régionale ou internationale ne doivent entraver notre marche vers la République de la vertu et de la bonne gouvernance. Certains disent que notre constitution nous oblige à respecter nos engagements internationaux. Soit ! Je refuse toutefois que des obligations légales internationales mal conçues, produites dans des contextes situés et datés, donc peut-être déjà dépassés, prennent le dessus sur des demandes légitimes d’un peuple déterminé à avancer.
Ceux qui me connaissent savent bien que je suis un infatigable militant de l’intégration régionale et africaine. Mais je connais assez bien les limites objectives de la CEDEAO pour accepter qu’elle nous impose les interprétations de juges sortis de je ne sais où. Si les juges de la CEDEAO ne comprennent pas que les droits et libertés de quelques individus ne sont pas plus importants que les droits économiques et sociaux de tout un peuple, c’est qu’ils ne sont plus d’époque.
Aujourd’hui, Black Pearl la perle noire est en prison. Il y retrouvera certains de ses complices. D’autres l’y rejoindront. Et ainsi de suite. Cet acte, je l’espère, servira aussi de leçon à ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui. S’ils ne la retiennent pas, plus tard, ils seront eux aussi traqués, arrêtés et condamnés. Je ne leur souhaite pas un tel sort. Mais c’est à eux de choisir.
Par Cheikh Tidiane DIEYE
Docteur en Etudes du Développement
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