Il faut ignorer les origines lointaines de l’orientalisme, ce « style occidental de domination, de restructuration et d’autorité sur l’Orient », et puis ensuite escamoter la méthode braudéléenne d’analyse historique sur une longue période, pour douter de la pertinence d’une telle assertion. Mais en se fondant sur une autorité scientifique comme Edward Saïd, le déconstructeur de la prose coloniale, l’on peut sans nul doute affirmer sans risque de se tromper que les événements douloureux qui se déroulent présentement en Egypte trouvent leurs racines profondes dans l’esprit colonial et l’impérialisme moderne. L’instantané de l’actualité journalistique nous cache la vérité, il couvre d’un voile noir la profondeur et la causalité historique. Le même Saïd n’affirme-t-il pas avec autorité que «l’histoire est faite par les hommes et les femmes, mais elle peut également être défaite et réécrite, à coups de silences, d’oublis, de formes imposées et de déformations tolérées » ? Il n’est nullement question ici de complot ou de manipulation politique. Même si ces pratiques existent, leur évocation immodérée peut escamoter la réflexion et empêcher du coup d’élargir le fond du débat. La bonne attitude consiste à aller au-delà des « éclats de colère irraisonnée », si tant est que la colère est contrôlable.
« Tout commence avec Bonaparte, continue avec le développement des études orientales et la conquête de l’Afrique du nord ». La faute est à Napoléon devrait-on dire ! Cela peut faire sourire les sceptiques mais Bonaparte a ouvert la voie au colonialisme français et même anglais. Il arriva en Egypte accompagné par une horde de scientifiques, spécialistes de l’Orient, parce qu’il avait le génie maléfique de comprendre que cette contrée à conquérir est une civilisation fondée sur un paradigme différent qu’il fallait traduire interpréter, déformer, renommer et dominer. Ce discours sur l’orient élaboré depuis ces origines napoléoniennes n’a jamais cessé depuis lors d’informer les rapports de domination coloniale et postcoloniale jusqu’au jour d’aujourd’hui. Aucun grand savant du monde occidental n’a pratiquement échappé aux clichés sur l’orient, au point de faire dire à Saïd que « L’orient a été créé par l’Occident ». Les idées les plus fausses, les propos les plus vulgaires, les assertions les plus absurdes ont été dites sur les Arabes et les musulmans. Lisez « La chanson de Roland », les musulmans y sont appelés Sarrasins, c'est-à-dire les descendants d’Abraham qui sont nés hors de Sarah, la femme noble, des « bâtards » en quelque sorte ! Il y est même dit que les Sarrasins sont des félons païens qui adorent le dieu Apollon. Dans « La divine comédie » de Dante Aligheri, le prophète Muhammad (PSL) est décrit de manière innommable et risible. Ceux qui n’ont pas lu « Mahomet et le fanatisme » de Voltaire en ont certainement entendu parler. Cette incapacité à comprendre l’autre a évolué au fil des siècles pour se transmuer en un sentiment de haine indicible. On a tout entendu : « les arabes sont inaptes à la démocratie », « ils ne connaissent que le langage de la force », « l’échec de l’islam politique », « l’islam s’est sécularisé ».
Toutes ces rodomontades sont serinées par des experts en Islam, des néo-orientalistes radicaux qui ont même réussi à inventer ce pseudo-choc des civilisations pour justifier les pires barbaries. La tragédie Egyptienne est un fait colonial, elle n’a rien à voire avec le choc des civilisations. La guerre a été déclarée depuis Napoléon. À moins d’y être contraint l’occident n’acceptera jamais, un autre paradigme culturel à vocation universelle comme l’Islam. L’occident ne peut souffrir un concurrent culturel. Voilà le fond du problème. Il est inscrit dans le « code génétique culturel » de l’occident une graine morbide à se prendre pour le nec plus ultra du monde. Il n’est pas un hasard que les deux grandes théories de la fin de l’histoire viennent de l’occident lors même qu’elles sont élaborées par des philosophes humanistes comme Hegel et son disciple-adversaire Karl Marx.
« L’orient arabe et islamique a été le seul à présenter à l’Europe un défi permanent sur les plans politique, intellectuel et, pour un temps économique » dit Edward Saïd. Le drame des frères musulmans c’est qu’ils se sont toujours positionnés en poste avancé dans le défi culturel. Mouvement religieux anti-colonialiste d’abord, piétiste et social ensuite, ses leaders sont tombés sous les balles du colonisateur anglais dès l’aube de la création de cette « confrérie ». Son fondateur Hassan Al Banna a été froidement assassiné par les colons anglais le 12 février 1949. Des figures charismatiques comme Abdoul Qadr Aoudah et bien d’autres ont été littéralement décapitées. La répression féroce n’a jamais cessé jusqu'à Gamal Abdel Nasser qui a fait embastiller et torturer Zeynab Ghazali pendant des années. Les nombreux appels à libérer le grand idéologue, écrivain profond, poète, critique littéraire et brillant essayiste Saïd Qutb ont laissé de marbre Nasser qui a donné l’ordre de faire pendre l’auteur du fameux Tafsir « A l’ombre du Coran ». Autant dire que les frères musulmans sont habitués au feu. Dans la communauté musulmane Ils sont avec les palestiniens à une position géopolitique qui les exposent aux premiers coups de feu. Tout prêt de l’ennemi, leur seule distraction reste le sifflet mortel des balles. En position de bouclier ils sont soumis à l’épreuve du feu à la place des autres.
Rien à voire avec le régime monarchique saoudien dont le soutien aux putschistes égyptiens ne doit étonner personne. Habitué à la bombance, aux mondanités et autres privautés illicites, il pense naïvement défendre ses intérêts soi disant menacés par des aspirants au changement et à la révolution islamique. Les nourritures terrestres et les biens périssables les empêchent de voir que l’ennemi est commun. Tant que l’Arabie reste saoudienne, elle peut dormir tranquillement, mais le jour où elle voudra être mohammadienne et islamique, la guerre lui sera ouvertement déclarée par l’occident. L’Arabie Saoudite est une cible potentielle dirigée par une dynastie dont le seul mérite est d’avoir eu un père nommé Saoud.
Quant à « l’armée égyptienne » elle n’a qu’à continuer à tirer impunément sur des innocents. Que ne ferait-on pas pour préserver ses privilèges ? Ah que l’homme est vache ! Tuer, manipuler, mentir et même baisser la culotte devant les américains qui ont sponsorisé leur coup de force et qui font semblant de le condamner. A cause des milliards qu’ils reçoivent des Etats-Unis, cette armée est devenue un GIE, un groupement d’intérêt économique, dirigé par des affreux qui sont prêts à tout. Leur mine patibulaire rappelle « Les Affranchis » de Martin Scorsese. Ils sont très dangereux ! Mais on ne peut pas tuer un « peuple ». Les droits de l’hommistes braillards à la langue pendue et les intermittents de la démocratie prêts à déblatérer sur des thèmes préfabriqués par la curie occidentale resteront muets. Ils ne vont pas lever le plus petit doigt ! Quant aux intellectuels nourris à la sève occidentale, incapables de s’allier à la vérité, gavés qu’ils sont au prurit de la mamelle des fabricants d’opinion, complexé jusqu’à la moelle et peureux comme jamais, ils tremblent comme une feuille morte dans leur coin. Rasant les murs, leur haine irraisonnée de l’islamisme et leur colère puérile les réduit à un combat d’arrière-garde, un combat du déshonneur. Intellectuellement paresseux ils ne sortiront jamais de la « bibliothèque coloniale ». Lorsque l’on refuse de comprendre, on devient « un imbécile heureux », content d’ignorer le cours du monde. Ils méritent la polémique savante la plus violente, digne de «Les provinciales » de Blaise Pascal et de « L’éloge de la folie » d’Erasme de Rotterdam.
Nous ne nous permettrons jamais d’injurier ces criminels qui le méritent bien. Nous ne leur lancerons jamais le « fuck you » de l’islamophobe italienne Orriana Fallaci jeté il ya quelques années à la figure de Yasser Arafat, dans un texte haineux intitulé « La rage et l’orgueil ». Comme toutes « les misérables moisissures » elle est aujourd’hui réduite en cendre sous terre emportée par cette faucheuse qui nous rappelle notre périssable condition. Que les militaires égyptiens et tous ceux qui les soutiennent se le tiennent pour dit : « Le monde est un bel endroit qui vaut la peine qu’on se batte pour lui ». Ernest Hemingway avait raison.
Khalifa Touré
« Tout commence avec Bonaparte, continue avec le développement des études orientales et la conquête de l’Afrique du nord ». La faute est à Napoléon devrait-on dire ! Cela peut faire sourire les sceptiques mais Bonaparte a ouvert la voie au colonialisme français et même anglais. Il arriva en Egypte accompagné par une horde de scientifiques, spécialistes de l’Orient, parce qu’il avait le génie maléfique de comprendre que cette contrée à conquérir est une civilisation fondée sur un paradigme différent qu’il fallait traduire interpréter, déformer, renommer et dominer. Ce discours sur l’orient élaboré depuis ces origines napoléoniennes n’a jamais cessé depuis lors d’informer les rapports de domination coloniale et postcoloniale jusqu’au jour d’aujourd’hui. Aucun grand savant du monde occidental n’a pratiquement échappé aux clichés sur l’orient, au point de faire dire à Saïd que « L’orient a été créé par l’Occident ». Les idées les plus fausses, les propos les plus vulgaires, les assertions les plus absurdes ont été dites sur les Arabes et les musulmans. Lisez « La chanson de Roland », les musulmans y sont appelés Sarrasins, c'est-à-dire les descendants d’Abraham qui sont nés hors de Sarah, la femme noble, des « bâtards » en quelque sorte ! Il y est même dit que les Sarrasins sont des félons païens qui adorent le dieu Apollon. Dans « La divine comédie » de Dante Aligheri, le prophète Muhammad (PSL) est décrit de manière innommable et risible. Ceux qui n’ont pas lu « Mahomet et le fanatisme » de Voltaire en ont certainement entendu parler. Cette incapacité à comprendre l’autre a évolué au fil des siècles pour se transmuer en un sentiment de haine indicible. On a tout entendu : « les arabes sont inaptes à la démocratie », « ils ne connaissent que le langage de la force », « l’échec de l’islam politique », « l’islam s’est sécularisé ».
Toutes ces rodomontades sont serinées par des experts en Islam, des néo-orientalistes radicaux qui ont même réussi à inventer ce pseudo-choc des civilisations pour justifier les pires barbaries. La tragédie Egyptienne est un fait colonial, elle n’a rien à voire avec le choc des civilisations. La guerre a été déclarée depuis Napoléon. À moins d’y être contraint l’occident n’acceptera jamais, un autre paradigme culturel à vocation universelle comme l’Islam. L’occident ne peut souffrir un concurrent culturel. Voilà le fond du problème. Il est inscrit dans le « code génétique culturel » de l’occident une graine morbide à se prendre pour le nec plus ultra du monde. Il n’est pas un hasard que les deux grandes théories de la fin de l’histoire viennent de l’occident lors même qu’elles sont élaborées par des philosophes humanistes comme Hegel et son disciple-adversaire Karl Marx.
« L’orient arabe et islamique a été le seul à présenter à l’Europe un défi permanent sur les plans politique, intellectuel et, pour un temps économique » dit Edward Saïd. Le drame des frères musulmans c’est qu’ils se sont toujours positionnés en poste avancé dans le défi culturel. Mouvement religieux anti-colonialiste d’abord, piétiste et social ensuite, ses leaders sont tombés sous les balles du colonisateur anglais dès l’aube de la création de cette « confrérie ». Son fondateur Hassan Al Banna a été froidement assassiné par les colons anglais le 12 février 1949. Des figures charismatiques comme Abdoul Qadr Aoudah et bien d’autres ont été littéralement décapitées. La répression féroce n’a jamais cessé jusqu'à Gamal Abdel Nasser qui a fait embastiller et torturer Zeynab Ghazali pendant des années. Les nombreux appels à libérer le grand idéologue, écrivain profond, poète, critique littéraire et brillant essayiste Saïd Qutb ont laissé de marbre Nasser qui a donné l’ordre de faire pendre l’auteur du fameux Tafsir « A l’ombre du Coran ». Autant dire que les frères musulmans sont habitués au feu. Dans la communauté musulmane Ils sont avec les palestiniens à une position géopolitique qui les exposent aux premiers coups de feu. Tout prêt de l’ennemi, leur seule distraction reste le sifflet mortel des balles. En position de bouclier ils sont soumis à l’épreuve du feu à la place des autres.
Rien à voire avec le régime monarchique saoudien dont le soutien aux putschistes égyptiens ne doit étonner personne. Habitué à la bombance, aux mondanités et autres privautés illicites, il pense naïvement défendre ses intérêts soi disant menacés par des aspirants au changement et à la révolution islamique. Les nourritures terrestres et les biens périssables les empêchent de voir que l’ennemi est commun. Tant que l’Arabie reste saoudienne, elle peut dormir tranquillement, mais le jour où elle voudra être mohammadienne et islamique, la guerre lui sera ouvertement déclarée par l’occident. L’Arabie Saoudite est une cible potentielle dirigée par une dynastie dont le seul mérite est d’avoir eu un père nommé Saoud.
Quant à « l’armée égyptienne » elle n’a qu’à continuer à tirer impunément sur des innocents. Que ne ferait-on pas pour préserver ses privilèges ? Ah que l’homme est vache ! Tuer, manipuler, mentir et même baisser la culotte devant les américains qui ont sponsorisé leur coup de force et qui font semblant de le condamner. A cause des milliards qu’ils reçoivent des Etats-Unis, cette armée est devenue un GIE, un groupement d’intérêt économique, dirigé par des affreux qui sont prêts à tout. Leur mine patibulaire rappelle « Les Affranchis » de Martin Scorsese. Ils sont très dangereux ! Mais on ne peut pas tuer un « peuple ». Les droits de l’hommistes braillards à la langue pendue et les intermittents de la démocratie prêts à déblatérer sur des thèmes préfabriqués par la curie occidentale resteront muets. Ils ne vont pas lever le plus petit doigt ! Quant aux intellectuels nourris à la sève occidentale, incapables de s’allier à la vérité, gavés qu’ils sont au prurit de la mamelle des fabricants d’opinion, complexé jusqu’à la moelle et peureux comme jamais, ils tremblent comme une feuille morte dans leur coin. Rasant les murs, leur haine irraisonnée de l’islamisme et leur colère puérile les réduit à un combat d’arrière-garde, un combat du déshonneur. Intellectuellement paresseux ils ne sortiront jamais de la « bibliothèque coloniale ». Lorsque l’on refuse de comprendre, on devient « un imbécile heureux », content d’ignorer le cours du monde. Ils méritent la polémique savante la plus violente, digne de «Les provinciales » de Blaise Pascal et de « L’éloge de la folie » d’Erasme de Rotterdam.
Nous ne nous permettrons jamais d’injurier ces criminels qui le méritent bien. Nous ne leur lancerons jamais le « fuck you » de l’islamophobe italienne Orriana Fallaci jeté il ya quelques années à la figure de Yasser Arafat, dans un texte haineux intitulé « La rage et l’orgueil ». Comme toutes « les misérables moisissures » elle est aujourd’hui réduite en cendre sous terre emportée par cette faucheuse qui nous rappelle notre périssable condition. Que les militaires égyptiens et tous ceux qui les soutiennent se le tiennent pour dit : « Le monde est un bel endroit qui vaut la peine qu’on se batte pour lui ». Ernest Hemingway avait raison.
Khalifa Touré
Autres articles