Et si les navetanes prenaient deux années sabbatiques pour aller vers l’emploi de masse ?


Et si les navetanes prenaient deux années sabbatiques pour aller vers l’emploi de masse ?
A chaque fois que je vais à Diass, je vois l’engouement des jeunes pour les  navetanes. Il y une vingtaine d’années, les jeunes de l’époque étaient prompts à aller aux champs.
Le spectacle des champs délaissés me fend le cœur. Comment inverser cette tendance ?
Aujourd’hui que l’on parle d’emploi de masse, nous convenons tous qu’il nous faut retourner à l’agriculture. Nous devons revoir les bases de notre économie si nous aspirons à l’émergence voir au développement intégral. Le Président de la République l’a compris et est entrain de mettre en marche les instruments de corrections des contradictions de notre économie encore caractérisée entre autre par :
  • un secteur agricole globalement dépendant de la pluviométrie,
  • un secteur secondaire encore sous l’emprise néfaste de la crise de l’énergie et de la forte insertion non maitrisée du Sénégal à l’économie mondiale,
  • un secteur tertiaire fortement dépendant du commerce de produits importés,
  • une désarticulation entre les secteurs de l’économie nationale,
  • des infrastructures ne prenant pas en compte le nécessaire désenclavement national,
  • une politique sociale d’assistanat loin d’une démarche d’insertion dynamique,
  • un fort endettement de l’État assorti d’une gestion malsaine des ressources publiques,
  • une absence d’une véritable stratégie politique d’emploi de masse.
Une bonne politique de développement national doit d’abord s’articuler autour de la résorption du chômage à travers une vision moderne à articuler autour de projets massifs dans des secteurs pouvant tirer le développement national.
En vérité, dans la situation actuelle du Sénégal, l’État ne peut pas donner dans la fonction publique des emplois massifs au plus grand nombre. Le secteur privé national actuel aussi ne peut pas prendre de sitôt le relais globalement en absorbant beaucoup de monde. Le secteur dit informel commerçant n’est pas la solution globale miracle qui caserait dans la durée toutes ces personnes se débrouillant dans nos  villes.
Notre rapport à l’emploi  au Sénégal procède d’un grand malentendu de l’État employeur, de l’entreprise recruteuse ou de la débrouille individuelle prometteuse.
Aujourd’hui, dans le subconscient surtout juvénile, le rêve se limite à venir à Dakar se débrouiller le temps d’émigrer pour revenir régler les problèmes de la famille élargie. Ce rêve le plus souvent se transforme en mirage ou en cauchemar. Ce rêve d’Occident en soit est  accentué par le fait qu’en face, nous n’offrons pas de sérieuses perspectives d’occupation des populations dans des cadres économiques viables.
Aujourd’hui, les jeunes doivent savoir que l’Occident en crise n’est plus une terre d’accueil. Nous pouvons travailler dans ce pays et nous y épanouir à condition que l’État aussi prenne le taureau par les bonnes cornes.
Pour casser ce schéma, l’État doit inverser le rêve en créant des cadres privés individuels ou sous forme de  coopératives regroupant des personnes qui trouveront un intérêt direct au travail collectif.
Les facteurs bloquant doivent être étudiés et les mécanismes mis en place tant en amont qu’en aval pour permettre l’éclosion des intelligences dans un cadre global planifié et soutenu. Il nous faut passer par cette phase pour demain créer une base privée nationale qui tissera sa toile pour le développement intégral.
Les expériences actuelles des structures de promotion de l’emploi doivent être fédérées pour s’orienter résolument vers des projets collectifs à travers par exemple un schéma de coopératives privées rémunérant elle-même ses propriétaires à accompagner pour à terme aller dans une autonomie totale.
Le rôle de l’État sera d’abord d’identifier avec les acteurs les secteurs porteurs qui doivent faire l’objet d’une large diffusion à travers des projets types. L’État doit aussi créer un cadre institutionnel souple pour permettre l’éclosion du modèle de coopérative privée à l’échelle nationale en l’articulant au schéma économique global de développement autocentré sur nos ressources propres.
À ce titre l’agriculture, la pêche, l’élevage, l’artisanat et les métiers pourraient servir de rampe de lancement du modèle. Les problèmes liés au financement transparent des coopératives privées doivent également être pris en compte dans la réflexion et l’action. Les avis de tous les acteurs doivent être pris dans le cadre d’une sorte d’états généraux de la coopérative privée.
Faut-il créer ex nihilo des coopératives privées ou est-ce qu’il faut partir de la base actuelle des quelques quatre mille ASC qui existent au Sénégal dans le cadre d’une affiliation à l’ONCAV ?
La question est d’autant plus importante que ce réseau d’ASC (que nous connaissons bien pour y avoir travaillé dans notre jeunesse à titre bénévole de 1984 à 1994) nous parait assez intéressant comme réceptacle.
Demain il suffit que chaque ASC ait un ou deux projets économiques de masse dans le cadre de priorité défini par l’État pour enclencher une révolution véritable.
Cependant, il nous faut oser aller vers une ou deux années sabbatiques du mouvement navetane. Nous devons oser ranger les godasses durant une ou deux années pour jeter les bases d’un pacte économique vertueux entre l’État, les banques et l’ONCAV dans un cadre assaini et articulé autour de la question de l’emploi de masse.
Durant ces deux années sabbatiques, nous pourrons jeter les bases d’une action énergique pour résoudre l’emploi de masse à travers des projets de développement.
Pour ne pas aller dans une précipitation hasardeuse, nous pouvons par exemple y aller à travers le chronogramme clair qui prendra en compte les volets ci-dessous :
  • définition du cadre institutionnel
  • identification des projets majeurs par régions
  • Elaboration de projets types
  • formation des acteurs
  • sélection pour démarrage d’une phase test de dix mille projets
  • évaluation
  • généralisation
  • consolidation et généralisation
Ce modèle n’est  pas la baguette magique qui nous fera sortir du chômage global. Il y aura des imperfections. Il s’agira de corriger et de peaufiner le modèle qui nous semble être la voie la mieux indiquée face aux faux espoirs des sources traditionnelles d’absorption du chômage. C’est  un modèle salutaire d’auto prise en charge et de résolution du chômage de la grande masse qui a besoin d’une formation, d’un financement et du suivi des projets mis en œuvre. Le rôle de l’État est  incontournable dans ce dispositif.
Les populations ont besoin d’être mises dans des conditions optimales d’auto-prise en charge progressive à travers surtout des formes d’organisation de type coopératives privées ; une autre piste qui n’a pas été assez explorées à cause d’une vision trop classique des recettes du développement.
La forme coopérative devrait répondre au double souci de décentralisation et de responsabilisation des populations. Ce chantier là-essentiel de la vision coopératrice privée a besoin, pour son lancement global, du concours de l’État central et des structures décentralisées. A terme, ce modèle permettra d’élargir la base entrepreneuriale nationale dans le prochain cinquantenaire. Une bonne part des mécanismes de financement innovants que le Président de la République est entrain de mettre  en place   doivent être alloués à cette démarche stratégique globale qui devra s’articuler autour de cinq régions économiques qui pourraient être par exemple :
  • le nord à vocation rizicole et pastorale,
  • le centre orienté vers les cultures intrants pour l’industrie alimentaire,
  • l’ouest pour la pêche, le tourisme et certains services de pointe,
  • l’est spécialisé surtout dans le sous-secteur minier,
  • le sud, grenier du pays et zone céréalière et fruitière.
Une multitude de coopératives privées de production, de services et de commercialisation adossées à la vocation de ces zones économiques pourraient régler le problème de l’emploi, de la croissance, du déficit des ressources publiques, bref du développement national.
Il suffit de 200 milliards pour financer 40 000 projets à hauteur de 5 millions par projet. Il suffit que chaque projet regroupe 5 personnes pour occuper 200 000 personnes directement. Nous pouvons bel et bien  trouver des niches pour mettre 200 milliards par an pour ce projet salutaire dans lequel le système bancaire et les collectivités locales doivent aussi avoir le rôle à jouer à coté de l’État central.
Il ne s’agira pas de jeter de l’argent par la fenêtre sans préalable comme la formation et l’encadrement. L’idée est noble. Il faudra juste la développer en tirant les leçons des échecs passés des différents programmes et initiatives.
Aujourd’hui, les préalables à ce vaste chantier sont :
  • la démocratisation de l’accès à la terre,
  • la facilitation de l’accès au financement,
  • la formation suivant l’approche par compétence
  • une bonne politique de consommation locale
Cette vision coopérative ou coopératrice n’est pas un simple projet politique. C’est plus large. C’est une question de remise en cause d’une élite qui doit faire preuve de plus d’humilité et n’avoir qu’une vision globale de la souffrance collective à corriger dans un monde qui est et qui sera de plus en plus égoïste.
La question focale de l’emploi est au centre des ordres de priorités définies par le Président Macky Sall. Il appartient à toutes et tous d’apporter des réponses pour résoudre ce problème économique et social pour ne dire simplement de sécurité publique.
L’axe de partenariat avec l’ONCAV peut être une voie, mais cela demande une réflexion claire pour éviter le grand gâchis des simples actions spectaculaires. Ma conviction est qu’une ou deux années sabbatique sans football navetanes peuvent mieux orienter l’action vers l’économique.
A ceux qui diront que le foot peut aller avec l’économique de masse, je répons ceci :
La période la plus propice pour la croissance au Sénégal c’est la saison des pluies et malheureusement c’est cette même période que choisit le Navetane pour canaliser les bras valides vers le foot. Nous n’avons pas assez cultivé nos champs !
Pensons-y un peu et agissons. C’est en cela qu’il faut voir le prétexte de cette réflexion dont les idées forces sont dans mon livre paru en 2011 (Un autre Sénégal est possible : les pistes de la souveraineté économique et sociale).
Après deux années sabbatiques, nous auront assez inculqué l’économique dans les veines des ASC pour ensuite asseoir une cohabitation saine et vertueuse entre sport et emploi de masse.
 
 
 Mamadou NDIONE
Cadre APR
Economiste, Ecrivain,
Spécialiste des questions portuaires et logistiques


 
 
 
 
Jeudi 19 Septembre 2013




1.Posté par I diagne le 19/09/2013 11:18
encore un analyse pertinent vraiment vous etes un grand monsieur le senegal a besoin des gens comme vous, au lieu de passer votre temps a saboter vous faites tout pour donner des idees pertinentes dans le seul but de faire avancer notre cher pays merci monsieur ndione du courage et bonne continuation

2.Posté par BRAVO le 19/09/2013 12:52
Très pertinent, concret et claire.
Bravo M. Ndione. Au moins quelqu'un qui réfléchi, pose le problème mais surtout PROPOSE une piste de réflexion.
Je suis pour une fois très content d'avoir lu un article aussi pertinent. On peux toujours le critiquer ou apporter des améliorations ou réaménagents, mais quoi qu'il en soit vous avez le mérite d'apporter du concret.
Alors bravo M. Ndione !!!

3.Posté par Mamadou le 19/09/2013 13:34
vous avez une bonne vision monsieur Macky devait prendre des personnes comme vous pour le bien du pays

4.Posté par raban le 19/09/2013 15:49
détrompez vous , dés qu'il va etre nommé par macky sall , il va aussitot mettre toutes ses bonnes théories là sous le coussin et s'assoir dessus et vous ne le reconnaitrez plus , d'intellectuel brillant et compétent il va se transformer volontairement en abruti ,

et va se mettre à faire de la politique politicienne comme tous ces hauts cadres et intellectuels qui l'ont précédé dans les gouvernements ou directions , et ça depuis sous senghor en passant par diouf , wade jusquà macky

5.Posté par samba kocc le 19/09/2013 17:41
Nous pouvons allier navétanes et travail . c'est une question de planification.

6.Posté par Abdou Karim Mbaye le 20/09/2013 11:10
Bonjour. Mr Raban utilise le terme abruti qui est une insulte. Je crois qu'il faut lire la contribution de Mr NDIONE qui est d'une pertinence impecable. Au lieu de s'attaquer à ce patriote que je connais bien (qui n'a pas encore 50 ans et qui a déjà écrit 5 livres), il est préférable de lire son article et de donner un avis sur le fond.
Monsieur NDIONE est un intellectuel (qui s'est toujours classé premier à l'école) évolunat dans le secteur privé. Il aurait pu comme beaucoup de cadres du privé rester dans son coin et ne pas se préoccuper de la chose publique. Je crois qu'il mérite plutot des encouragements. Du courage mon frère.

7.Posté par weuza le 23/09/2013 17:51
Des idées pertinentes!!! Félicitation



Dans la même rubrique :

AIDA CHERIE - 22/05/2015