![Du statut pénal des anciens ministres et des contrevérités distillées par Wade et ses partisans Du statut pénal des anciens ministres et des contrevérités distillées par Wade et ses partisans](https://www.dakaractu.com/photo/art/default/4361339-6572932.jpg?v=1339152672)
Madické Niang, Souleymane Ndéné Ndiaye, Ousmane Ngom menacent de ne pas déférer à la convocation d'un juge "ordinaire" au motif qu'ils ne sont justiciables que devant la Haute Cour de Justice. Ils tendent également à faire croire que la cour de répression de l'enrichissement illicite est liberticide et viole les droits de l'homme. Ont-ils raison ? La réponse est négative et ce genre d'affirmation fait partie du tissu de contrevérités diffusé à longueur de semaine dans les médias par des individus qui semblent apeurés. Pourquoi ? Un petit rappel des textes s'impose.
Rappel des textes nationaux
Article 101 constitution du Sénégal :
"Le Président de la République n'est responsable des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison. Il ne peut être mis en accusation que par les deux assemblées, statuant par un vote identique au scrutin secret, à la majorité des trois cinquièmes des membres les composant ; il est jugé par la Haute Cour de Justice.
Le Premier Ministre et les autres membres du Gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où ils ont été commis. Ils sont jugés par la Haute Cour de Justice. La procédure définie ci-dessus leur est applicable, ainsi qu'à leurs complices, dans le cas de complot contre la sûreté de l'Etat. Dans les cas prévus au présent alinéa, la Haute Cour est liée par la définition des crimes et délits ainsi que par la détermination des peines, telles qu'elles résultent des lois pénales en vigueur au moment où les faits ont été commis."
Article 7 de l'actuelle loi sur la Cour de répression de l’enrichissement illicite
«Lorsque les faits constitutifs de l’enrichissement illicite concernent une personne bénéficiant d’une immunité ou d’un privilège de juridiction, le procureur spécial transmet le dossier à l’autorité compétente aux fins de l’exercice des poursuites par les voies légales».
Rappelons que cette loi (loi 81-53 du 10 juillet 1981) devrait être mise à jour avec la Création de la Cour de répression des crimes économiques et financiers pour sans doute les raisons que nous avons développées dans un article (http://www.socialisme-republiquesn.org/economie/des-crimes-économiques/1576-sénégal-qui-a-peur-de-la-cour-de-répression-des-crimes-économiques-et-financiers).
Rappel des textes internationaux
Il ne faut pas oublier que le Sénégal a ratifié un certain nombre de conventions internationales qui ont une force supérieure aux lois nationales et qui garantissent les droits de la défense.
La convention de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption applicable au Sénégal définit l'enrichissement illicite comme étant « l’augmentation substantielle des biens d’un agent public ou de toute autre personne que celui-ci ne peut justifier au regard de ses revenus».
De même, la convention des Nations Unies contre la corruption ratifiée par le Sénégal définit en son article 20 l'enrichissement illicite comme étant « une augmentation substantielle du patrimoine d'un agent public que celui-ci ne peut raisonnablement justifier par rapport à des revenus légitimes » et lui confère le caractère d'une infraction pénale.
D'ailleurs, le détournement de derniers publics cause de l'enrichissement illicite est en soi une atteinte aux droits de l'homme selon la Convention des Nations Unies contre la corruption.
Encore une fois (http://www.socialisme-republiquesn.org/economie/des-crimes-économiques/1576-sénégal-qui-a-peur-de-la-cour-de-répression-des-crimes-économiques-et-financiers), ces conventions garantissent les droits de la défense et la présomption d'innocence. Mais elles permettent également aux Etats signataires de mettre en œuvre les instruments appropriés pour rechercher, poursuivre et juger effectivement les criminels économiques.
Donc il appartient de manière évidente aux personnes soupçonnées d'enrichissement illicite de prouver l'origine de l'accroissement subit et disproportionné de la valeur de leur patrimoine.
C'est ce que prévoient certaines dispositions figurant dans le code général des impôts sénégalais relatif au train de vie et personne ne les a jamais attaquées devant les tribunaux. Il ne s'agit donc point de renversement de charge de la preuve mais de présomptions qui supportent la preuve contraire. Si un présumé enrichi illicite ne peut pas prouver sa richesse subite, il doit effectivement rendre compte devant les tribunaux. Et puis, c'est tout.
Contrairement aux élucubrations de Abdoulaye Wade et de ses affidés, la Cour dite de répression des crimes économiques et financiers ou de l'enrichissement illicite n'a donc rien d'un Guantanamo ou d'un tribunal militaire. En l'état actuel du droit positif sénégalais, ses décisions sont susceptibles de recours devant la Cour de cassation.
L'enrichissement illicite relève du droit pénal commun. Il s'agit d'un délit inséré dans le code pénal sénégalais et relève donc des tribunaux répressifs ordinaires sauf effectivement privilège de juridiction. Ni plus ni moins.
Quid des convocations des anciens Ministres devant les tribunaux ordinaires ?
Certains partisans du régime de Wade citent en référence l'article 7 de l'actuelle loi sur l'enrichissement illicite précité pour bomber le torse et défier l'autorité publique prétendant ne plus vouloir répondre aux convocations de la police judiciaire lors des enquêtes préliminaires ordonnées par un procureur de la République.
Ils se trompent lourdement parce que ces individus oublient ou font semblant d'oublier les principes de bases de leurs cours de droits (bon nombre d'entre eux sont des avocats). En effet le privilège de juridiction cesse avec la durée de leur mandat de Ministre ou de député. Cela est clair et constant en droit pénal.
Pour celles ou ceux du grand public à qui cette règle peut paraître incompréhensible (en l'absence de décisions jurisprudentielles sénégalaises publiquement connues) ou qui pensent que les textes sénégalais sont imprécis (alors qu'il n'en est rien) nous les renvoyons au droit français qui a inspiré notre droit pénal.
Ainsi par exemple, le Conseil constitutionnel français a rappelé plusieurs fois que le statut pénal du Président de la République et des Ministres ne confère un privilège de juridiction que pendant la durée du mandat (cf. par exemple Conseil constitutionnel décision du 22 janvier 1999). A l'expiration de son mandat, le Président redevient un simple citoyen et peut être poursuivi dans les conditions de droit commun. Cela explique que le Président Chirac ait été attrait devant les tribunaux ordinaires pour emplois fictifs après la fin de son mandat. Ce principe du droit vaut également pour les Ministres.
D'ailleurs en France, la responsabilité pénale des Ministres en fonction peut-être engagée même devant les tribunaux ordinaires pour les actes commis mais qui sont sans lien avec leurs fonctions. Il aurait dû en être ainsi au Sénégal d'ailleurs pour le saccage de journaux qui aurait été commandité par Farba Senghor Ministre car il s'agissait d'actes manifestement détachables de ses fonctions.
Il n y a donc rien d'exceptionnel dans le fait de poursuivre les délinquants économiques, fussent-ils anciens Ministres, et de leur appliquer les règles du droit pénal sénégalais relatives à l'enrichissement illicite.
Sachons donc raison garder et laissons la justice faire son travail d'autant plus que pour le moment, les investigations ne porteraient que sur les rapports d'audits qui avaient été établis durant le régime de Wade mais que ce dernier avait, semble-t-il, rangé dans des tiroirs. Si les anciens dignitaires du régime de Wade n'ont rien à se reprocher, ils ne gagnent rien à envahir les médias pour "faire du bruit". A moins que…
Ibrahima Ndiaye
Socialisme et République
http://www.socialisme-republiquesn.org
Rappel des textes nationaux
Article 101 constitution du Sénégal :
"Le Président de la République n'est responsable des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison. Il ne peut être mis en accusation que par les deux assemblées, statuant par un vote identique au scrutin secret, à la majorité des trois cinquièmes des membres les composant ; il est jugé par la Haute Cour de Justice.
Le Premier Ministre et les autres membres du Gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où ils ont été commis. Ils sont jugés par la Haute Cour de Justice. La procédure définie ci-dessus leur est applicable, ainsi qu'à leurs complices, dans le cas de complot contre la sûreté de l'Etat. Dans les cas prévus au présent alinéa, la Haute Cour est liée par la définition des crimes et délits ainsi que par la détermination des peines, telles qu'elles résultent des lois pénales en vigueur au moment où les faits ont été commis."
Article 7 de l'actuelle loi sur la Cour de répression de l’enrichissement illicite
«Lorsque les faits constitutifs de l’enrichissement illicite concernent une personne bénéficiant d’une immunité ou d’un privilège de juridiction, le procureur spécial transmet le dossier à l’autorité compétente aux fins de l’exercice des poursuites par les voies légales».
Rappelons que cette loi (loi 81-53 du 10 juillet 1981) devrait être mise à jour avec la Création de la Cour de répression des crimes économiques et financiers pour sans doute les raisons que nous avons développées dans un article (http://www.socialisme-republiquesn.org/economie/des-crimes-économiques/1576-sénégal-qui-a-peur-de-la-cour-de-répression-des-crimes-économiques-et-financiers).
Rappel des textes internationaux
Il ne faut pas oublier que le Sénégal a ratifié un certain nombre de conventions internationales qui ont une force supérieure aux lois nationales et qui garantissent les droits de la défense.
La convention de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption applicable au Sénégal définit l'enrichissement illicite comme étant « l’augmentation substantielle des biens d’un agent public ou de toute autre personne que celui-ci ne peut justifier au regard de ses revenus».
De même, la convention des Nations Unies contre la corruption ratifiée par le Sénégal définit en son article 20 l'enrichissement illicite comme étant « une augmentation substantielle du patrimoine d'un agent public que celui-ci ne peut raisonnablement justifier par rapport à des revenus légitimes » et lui confère le caractère d'une infraction pénale.
D'ailleurs, le détournement de derniers publics cause de l'enrichissement illicite est en soi une atteinte aux droits de l'homme selon la Convention des Nations Unies contre la corruption.
Encore une fois (http://www.socialisme-republiquesn.org/economie/des-crimes-économiques/1576-sénégal-qui-a-peur-de-la-cour-de-répression-des-crimes-économiques-et-financiers), ces conventions garantissent les droits de la défense et la présomption d'innocence. Mais elles permettent également aux Etats signataires de mettre en œuvre les instruments appropriés pour rechercher, poursuivre et juger effectivement les criminels économiques.
Donc il appartient de manière évidente aux personnes soupçonnées d'enrichissement illicite de prouver l'origine de l'accroissement subit et disproportionné de la valeur de leur patrimoine.
C'est ce que prévoient certaines dispositions figurant dans le code général des impôts sénégalais relatif au train de vie et personne ne les a jamais attaquées devant les tribunaux. Il ne s'agit donc point de renversement de charge de la preuve mais de présomptions qui supportent la preuve contraire. Si un présumé enrichi illicite ne peut pas prouver sa richesse subite, il doit effectivement rendre compte devant les tribunaux. Et puis, c'est tout.
Contrairement aux élucubrations de Abdoulaye Wade et de ses affidés, la Cour dite de répression des crimes économiques et financiers ou de l'enrichissement illicite n'a donc rien d'un Guantanamo ou d'un tribunal militaire. En l'état actuel du droit positif sénégalais, ses décisions sont susceptibles de recours devant la Cour de cassation.
L'enrichissement illicite relève du droit pénal commun. Il s'agit d'un délit inséré dans le code pénal sénégalais et relève donc des tribunaux répressifs ordinaires sauf effectivement privilège de juridiction. Ni plus ni moins.
Quid des convocations des anciens Ministres devant les tribunaux ordinaires ?
Certains partisans du régime de Wade citent en référence l'article 7 de l'actuelle loi sur l'enrichissement illicite précité pour bomber le torse et défier l'autorité publique prétendant ne plus vouloir répondre aux convocations de la police judiciaire lors des enquêtes préliminaires ordonnées par un procureur de la République.
Ils se trompent lourdement parce que ces individus oublient ou font semblant d'oublier les principes de bases de leurs cours de droits (bon nombre d'entre eux sont des avocats). En effet le privilège de juridiction cesse avec la durée de leur mandat de Ministre ou de député. Cela est clair et constant en droit pénal.
Pour celles ou ceux du grand public à qui cette règle peut paraître incompréhensible (en l'absence de décisions jurisprudentielles sénégalaises publiquement connues) ou qui pensent que les textes sénégalais sont imprécis (alors qu'il n'en est rien) nous les renvoyons au droit français qui a inspiré notre droit pénal.
Ainsi par exemple, le Conseil constitutionnel français a rappelé plusieurs fois que le statut pénal du Président de la République et des Ministres ne confère un privilège de juridiction que pendant la durée du mandat (cf. par exemple Conseil constitutionnel décision du 22 janvier 1999). A l'expiration de son mandat, le Président redevient un simple citoyen et peut être poursuivi dans les conditions de droit commun. Cela explique que le Président Chirac ait été attrait devant les tribunaux ordinaires pour emplois fictifs après la fin de son mandat. Ce principe du droit vaut également pour les Ministres.
D'ailleurs en France, la responsabilité pénale des Ministres en fonction peut-être engagée même devant les tribunaux ordinaires pour les actes commis mais qui sont sans lien avec leurs fonctions. Il aurait dû en être ainsi au Sénégal d'ailleurs pour le saccage de journaux qui aurait été commandité par Farba Senghor Ministre car il s'agissait d'actes manifestement détachables de ses fonctions.
Il n y a donc rien d'exceptionnel dans le fait de poursuivre les délinquants économiques, fussent-ils anciens Ministres, et de leur appliquer les règles du droit pénal sénégalais relatives à l'enrichissement illicite.
Sachons donc raison garder et laissons la justice faire son travail d'autant plus que pour le moment, les investigations ne porteraient que sur les rapports d'audits qui avaient été établis durant le régime de Wade mais que ce dernier avait, semble-t-il, rangé dans des tiroirs. Si les anciens dignitaires du régime de Wade n'ont rien à se reprocher, ils ne gagnent rien à envahir les médias pour "faire du bruit". A moins que…
Ibrahima Ndiaye
Socialisme et République
http://www.socialisme-republiquesn.org
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