De notre participation aux jeux Olympiques de Londres... Et si le Sénégal manquait de culture sportive ?


De notre participation aux jeux Olympiques de Londres... Et si le Sénégal manquait de culture sportive ?
Les jeux de la 15 ème olympiade de l’ère moderne se ferment à Londres et ce n’est moins l’absence de médaille de la délégation sénégalaise à ces joutes internationales qui préoccupe que le comportement de nos athlètes avant et pendant ces compétitions qui interpelle. Notre prestation d’ensemble pose la lancinante problématique du management du sport dans notre pays et la gestion des carrières des athlètes sénégalais. Le sport de haut niveau exige de la part de ses acteurs : discipline, endurance, concentration, rigueur, organisation, bref professionnalisme.
Le sport, faut-il le rappeler, phénomène social, occupe dans la vie des nations une place chaque jour plus grande, concernant partout toutes les souches de la société. L’on dit bien souvent que l’essor du sport est un indice de vitalité d’un peuple. Il est un système de pratiques doublé d’un système de représentations et de valeurs dont la fonction est de doter toute société de visions du monde et de modes de comportement.
Le sport moderne répond historiquement à la création d’une morale dans les rapports conflictuels et combatifs qu’inventent les sociétés, et où se sont affaissées les valeurs religieuses et les solidarités traditionnelles. Comprendre le sport (ou un sport), c’est le saisir en tant qu’objet total, à travers le système des relations qu’il entretient avec la culture et la société qui lui donne du sens.
Je ne peux m’empêcher de refaire encore dans ma tête le film que nous a offert la délégation sénégalaise lors de la remise symbolique, officielle du drapeau national en vue des joutes olympiques de Londres 2012. Ce jour, devant le petit écran, je fus totalement abasourdi tant le spectacle qui se déroulait devant mes yeux paraissait totalement invraisemblable, déplacé pour le monde sportif sénégalais, bref pour le Sénégal dans son entièreté.
Comment peut- on laisser cette jeune athlète, porte drapeau national, Hortense Diedhiou nous faire ce cinéma et devant les plus hautes autorités de ce pays ? A cet instant solennel, il ne fut pas dans son rôle de convoquer dans son discours la crise casamançaise surtout avec la manière dont elle s’y est prise. Pourquoi laisser Hortense Diedhiou se prononcer de la sorte sur le plus vieux conflit armé de ce monde ? Qui l’a préparé à un tel discours ? Qui a autorisé ce dérapage ? Pensent-ils que la voix de cette athlète à la carrière débutante peut porter là où celle d’un illustre fils de la Casamance en l’occurrence Pierre Goudiaby Atepa pour exemple n’a pas encore eu l’effet escompté ?
Je peux comprendre et accepter qu’elle ait une franche pensée pour la Casamance, comme du reste tous les sénégalais et amis du Sénégal, mais ni le moment, ni le contexte ne prêtaient à une telle prestation. A quelques jours du démarrage officiel des JO tous les athlètes sérieux du monde au sein de délégations responsables et hautement professionnelles sont concentrés sur l’essentiel : le sportif rien que le sportif !pour « aller plus vite, monter plus haut et être les plus forts ». Hortense paye ici, de par sa jeunesse donc son inexpérience, l’amateurisme, les errements de dirigeants sportifs en manque de culture sportive. Les responsables sportifs avec au premier plan le ministère et la fédération sénégalaise d’athlétisme avaient le devoir d’accompagner et de valider le discours de Hortense même si sa volonté fût autre .Il suffit juste avec diplomatie mais fermeté de lui faire comprendre que le moment était à la concentration ; de la débarrasser du superflu pour augmenter ses chances de médaille ; avec ce sésame sa voix aurait certainement plus porté avec plus d’échos et peut être pour toujours. Hélas et malheureusement on laissa et /ou encouragea l’athlète au divertissement pour qu’elle se retrouve éliminée des jeux dès sa première sortie.
C’est difficilement que je vais évoquer le cas Amy Mbacké Thiam qui, révéla depuis Londres le jour de son entrée en matière n’espérer aucune médaille pour ne s’être pas bien préparée ; elle a préféré battre campagne pour les élections reconnait-elle. Le lendemain, sur un quotidien, elle avoua avoir triché et annonça sa retraite sportive pour vraiment faire carrière dans la politique. Quel gâchis !
Voilà ce que l’on devient quand on se permet, des années plus tôt, publiquement et impunément d’insulter le président de sa propre fédération. Je me rappelle que Amadou Dia Ba, notre seul médaillé olympique, s’est toujours plaint de la gestion de la carrière de la championne après Edmonton.

Quand est- ce- que, sportifs sénégalais et amis du sport, allons-nous nous remettre en cause pour reconnaitre qu’on doit absolument travailler pour espérer figurer dans le concert des nations qui existent dans le sport ?
Assurément, il n’est point exagéré d’affirmer qu’il y’a un manque criard au Sénégal de culture sportive voire de culture de la gagne ! Sinon comment comprendre qu’on puisse fêter en grandes pompes juste l’anniversaire d’une victoire si lointaine contre la France du football. C’est un aveu d’impuissance, de complexe, de faiblesse vis à vis d’un pays souverain comme le Sénégal et devant le monde entier. C’est à se demander si nous portons une ambition pour notre sport. Avons-nous sénégalais été fabriqués pour ne jamais mériter de battre la France ?
Qu’est- ce qu’il y a de si exceptionnel à remporter un match de poule même face à une équipe championne du monde. Pour la petite histoire nous rappelons que L’Algérie en 1982 a battu par 2 buts à zéro la RFA future finaliste du même mondial , le Cameroun de Milla et des frères Biyik , en 1990, a dominé l’Argentine du grand Maradona détenteur d’alors du trophée mondial et last but not least ce même Cameroun de Samuel Eto’o même endeuillé en cours de compétition a tenu la dragée haute à l’équipe de France championne du monde en finale de la coupe intercontinentale et en match amical toujours au stade de France avec un but de Mboma qui est resté dans les annales . Aucun de ces pays précités ne s’en est autant enorgueilli et chacune de ces nations a remporté la coupe d’Afrique des nations en plus des jeux olympiques (football) pour le Cameroun. On a encore rien gagné au niveau africain voire mondial dans le football et pour toutes les catégories ; même la Gambie a remporté le trophée continental.
Je me permets de m’arrêter à cette fameuse soirée anniversaire de la victoire des lions sur la France ; manifestation organisée et diffusée par un groupe de presse et qui fut le théâtre d’inédites manipulations et d’intoxications.
A cette soirée ELhadj Diouf se gaussa s’être couché après 3 heures du matin la veille du match contre la France. Certainement il en fut de même pour les autres matchs du Sénégal à ce mondial et qu’il ne fut pas le seul à découcher. Seulement il a oublié d’avouer que cet acte notoire d’indiscipline nous a valu notre élimination par manque de fraicheur face à une équipe turque largement à notre portée. Nous lui faisons remarquer que du fait de ses écarts de conduite il n’a jamais su reproduire sur un terrain ses éclats de 2002 ni en sélection, ni en club et qu’il n’a jamais su accomplir une carrière sportive à la dimension de son talent et à l’image de ses cadets Eto’o et Drogba. Les seules vraies performances dans la vie s’inscrivent dans la durée avec humilité et discipline mais pas dans l’indiscipline qui est l’ennemi premier du sportif surtout de haut niveau. La gravité de ces aveux est à mesurer à l’aune de l’impact négatif qu’ils peuvent susciter chez tous ces jeunes qui se déploient tous les jours sur les terrains de football du Sénégal et d’Afrique et qui peut être le portent en estime. Et pourtant, il fut chaudement applaudi par 2 ministres de la république présents à la cérémonie dont l’un déclara séance tenante que le footballeur avait toujours sa place dans notre équipe nationale de football. Que ce dernier, musicien, puisse défendre publiquement et contre l’avis général son ami footballeur privé d’un voyage pour s’être autorisé une virée nocturne la veille d’un match international nous laisse de marbre ; devenu ministre de la république, il n’est plus dans son rôle de tenir un tel comportement à une soirée publique. En effet ses relations avec le double ballon d’or africain sont personnelles et relèvent du privé ; l’Etat est impersonnel , impartial , le sport universel .Cette soirée montre à suffisance l’état du sport dans notre pays où l’on invite pour les fêter à la primature et au palais toute une journée , deux jeunes lutteurs pour motif qu’ils se sont insultés et dits des insanités devant le monde entier la veille .

Toutefois et heureusement, à ces JO, le tableau ne fut pas totalement sombre. L’éclairci nous est venu de l’équipe olympique de football qui servit de vitrine au travail accompli par l’institut Diambars depuis des années. Je ne crois pas au messie ou aux générations spontanées ; seul le travail bien fait paye. Il faudrait remonter à la CAN 2000 pour voir une équipe sénégalaise de football aussi joueuse, avec un projet de jeu, une maîtrise et une discipline technico-tactique ; cette équipe fut le prolongement de cette magnifique génération de la Jeanne d’arc de Dakar finaliste africaine deux années plus tôt.
Pour toutes les dernières campagnes africaines, de loin le Sénégal fut meilleur sur le papier mais toujours nous peinons à produire du jeu et à le concrétiser sur le terrain. Je ne conçois point une équipe sénégalaise compétitive sans une base locale qu’il nous est difficile d’appréhender si on ne joue pas au football dans une bonne partie du pays. Aujourd’hui, à Kaolack, Fatick, Diourbel, Thiès et Louga, il n’existe pas de club dans l’élite du football sénégalais. L’une des plus belles équipes que le Sénégal ait connu et qui nous a valu un match mémorable contre le Zimbabwe avait une base locale très large. Pour l’histoire à ce match, Pape Fall, Racine Kane, ELhadji Keita et karim Sèye nous vinrent de la SEIB de Diourbel ; Cheikh Seck, Amadou Diop capitaine et Moussa Diop Quénum du Jaraff de Dakar ; Roger Mendy, Sadio Demba, Joseph Koto de la Vieille dame ; Samba Fall de la linguère de Saint-Louis et Cheikh Tidiane Fall de l’ASFA en plus des « sénéfs » Oumar Guèye Sène, Mamadou Tew, Thierno Youm et Jules François Bocandé. Cette équipe cacha une forêt de talents locaux de la dimension de Ass Birane Cissé , Amadou Moustapha Sarr , Salif Diagne , Ibrahima Diakhaby , Ibrahima Guissé , Babacar Thiam , Alassane Seck , Lamine Sylla Karanté , Aba Gueye , Abdallah Sakhely , Pelé etc. ; Cette dernière décennie le football égyptien , avec une base essentiellement locale régna au niveau africain.
Excellence, Président de le République, avant même les infrastructures, le seul chantier qui vaille dans ce pays porte sur le « modèle sénégalais » incarné par « l’homosenegalensis » qui, proprement, pose problème. L’Afrique, malheureusement, est d’abord malade de ses enfants qui la maintiennent encore dans une précarité absolue. Le sport, au même titre que la santé et l’éducation, est un secteur prioritaire pour deux raisons très simples. En plus des retombées économiques énormes qu’il peut engendrer (industrie du sport), le développement du sport permet :
D’abord de diminuer significativement la morbi-mortalité dans notre pays ; ainsi vous aurez moins de décés et de malades du diabète, de l’Hta, d’insuffisance rénale, d’AVC etc. En plus de lutter ici contre l’absentéisme à l’école et au travail (ce qui impacte positivement sur notre économie), vous réduirez considérablement les dépenses en soins de santé.
Ensuite de former des femmes et des hommes de valeurs, éminents cadres et dignes fils de ce pays de la dimension de feu le juge Kéba Mbaye, Abib Thiam, Youssou Ndiaye ou Mansour Sy souris.
Pour Alain Ehrenberg, le sport revêt une optique égalitariste : « n’importe qui peut devenir quelqu’un », il est aussi un « fait social total » car il peut mettre en branle la totalité de la société, qu’il engage toutes ses dimensions (politique, économique…), et implique, en même temps, les diverses formes de la vie quotidienne des agents qui la composent (pratiques, représentations, style de vie…)
L’Etat doit inciter et encourager la population surtout sa jeunesse à la pratique sportive et créer les meilleures conditions d’épanouissement de nos athlètes. Pour se faire :
Redynamiser le sport dans les écoles et les universités. A l’élémentaire nous compétitions tous les mercredi matin et les meilleurs se retrouvaient dans une capitale régionale dans le cadre d’un festival national ; l’UASSU fut un excellent moyen de détection de jeunes talents surtout dans l’athlétisme.
Assister et accompagner le mouvement Navétanes, qui du reste, fait partie des associations de masse les mieux structurées du pays. C’est l’organisation qui mobilise le plus la jeunesse mais elle est laissée à elle-même. L’Etat par une approche inclusive et intégrée comprenant les ministères de la jeunesse, de la santé et de l’intérieur, et en collaboration avec l’ONCAV au niveau des zones et ODCAV, va jouer un rôle capital dans la sensibilisation et la formation de tous les acteurs ; ce qui participera également à endiguer la violence dans le milieu. Les Navétanes ont toujours servi de vivier pour le football national via les clubs d’élite.
Aller vers l’érection d’une ville à vocation sportive. Du fait de sa position stratégique mais surtout en raison des infrastructures déjà disponibles (3 stades , CNEPS , Polytechnique , ENSA , ENOA , Camps militaires ) , Thiès peut valablement jouer ce rôle pour devenir dès lors le centre de recherche, d’expérimentation et d’application des politiques sportives nationales. L’INSEPS sera délocalisé au profit d’une faculté des sports rattachée à l’Université de Thiès. Logée dans l’actuel CNEPS, la faculté va former aux différents métiers du sport suivant le système LMD. De plus sera créé sur le même site un pôle pluridisciplinaire spécialisé dans la gestion de carrières sportives qui aura d’abord un rôle de détection , d’encadrement et de suivi de jeunes talents sportifs ; ensuite ce même pôle va orienter et accompagner les anciens sportifs dans leur reconversion en entraîneurs , dirigeants , agents de joueurs , journalistes sportifs etc. Enfin Thiès va abriter aussi un centre incubateur qui hébergera et accompagnera des porteurs de projet dans le domaine du sport.
Promouvoir l’initiative privée dans le sport en faisant des facilités aux investisseurs pour démultiplier l’exemple de l’institut Diambars. Ici l’Etat veillera à un équilibre du maillage national et aura un droit de regard sur les curricula de formations académique et sportive en plus de suivre la traçabilité du parcours des pensionnaires.
Inciter les collectivités locales au parrainage, à la gestion de clubs de ville ou de région. En cela je rejoins totalement le député Abdoulaye Makhtar Diop
De concert avec les fédérations et ligues, aller vers des fusions et concentrations pour l’émergence de grands clubs capables de jouer les grands rôles en Afrique. Je ne pense pas pertinent de développer ASC TOURE KOUNDA et NiARRY TALLY pour que le STADE DE MBOUR et la JEANNE D’ARC meurent. Est-ce qu’il ne serait pas plus intéressant que l’arc OUAKAM-NGOR –YOFF ait un seul club fort (ASC LEBOUGUI par exemple) vu le potentiel humain des 3 villages réunis en plus des infrastructures qu’offre le stade de Ngor ? Pensons-nous que la zone des sicaps puisse regrouper en son sein 3 clubs compétitifs ?
Créer une agence d’aide à la promotion du sport. Après avoir défini une politique sportive, formé des techniciens et encadreurs, doté en infrastructures de base, l’Etat doit encourager, faciliter, encadrer les investissements dans le sport. L’agence va servir d’interface entre le milieu sportif et les sponsors. Pour le compte des clubs, ligues et fédérations et suivant les priorités, l’agence devra attirer et intéresser les futurs mécènes. Une régulation s’impose à ce niveau. Je ne comprendrai jamais que les sponsors investissent 100 ou 200 millions sur un seul combat de lutte qui ne nous vaudra jamais une reconnaissance internationale au moment où des clubs sénégalais déclarent forfaits à des compétitions africaines pour défaut de moyens. Cette manne financière fait au moins le budget annuel de 3 clubs sénégalais. Que l’on ne m’oppose pas l’argument de la visibilité ou de la rentabilité, je suis favorable au « Sponsoring patriotique » surtout pour les sociétés nationales.
Il me faudrait tout un registre pour coucher mes idées sur le sport mais je vais m’en arrêter là de peur de paraître davantage impertinent. Je laisse aux initiés et techniciens le soin de me corriger et d’approfondir la réflexion. Je m’excuse pour mon intrusion dans un domaine qui n’est pas forcément mien mais où je me sens moins mauvais. L’ami du sport que je suis qui y ait grandi et subi des influences au point de lui consacrer sa thèse de doctorat (sujet : « Etude de quelques indicateurs des adaptations de l’organisme à l’effort pendant le jeûne du ramadan »), a seulement voulu apporter ici sa modeste contribution dans un domaine qui lui semble prioritaire pour redresser notre cher Sénégal. L’essentiel dans la vie étant de ne point tomber mais plutôt de se redresser à chaque fois qu’on tombe. Par le sport, on y arrive.
Sportivement !
Dr Mamadou Badara Seck
TEL : 776501276

Vendredi 10 Août 2012
Docteur Mamadou Badara Seck




1.Posté par Deuggg le 11/08/2012 06:36
Tres bel article. Rien a dire d'accord a 100%.



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