Au nom de l'Islam ? Non !

Décidément l’actualité peut être déroutante. En effet au moment où le monde musulman s’embrase pour « dénoncer » un film blasphématoire ; le musée du Louvre à Paris inaugure son département grandiose consacré aux arts de l’Islam.
Ainsi, alors qu’est célébrée la spécificité humaine la plus exaltante à savoir la création artistique ; le comportement le plus sanguinaire de l’être humain, le terrorisme s’illustre aussi avec l’attentat-suicide qui a fait une dizaine de morts ce même jour (18 Septembre) au Pakistan, « au nom de l’Islam » ?
Comme si la religion universelle synonyme de paix, de tolérance et de fraternité pouvait cautionner l’ignorance, la bêtise et le crime. Oui, au nom des religions, carnage et désolation ont ravagé presque tous les continents, et notamment l’Europe pendant des siècles. Car le fanatisme est aussi sans frontières ni dans l’espace ni dans le temps et il peut être autre que religieux.
Même si rien ne peut justifier le terrorisme, tous les terrorismes ; il y a bien des réalités qui permettent de comprendre pourquoi la manipulation des foules est si facile et particulièrement de nos jours avec l’INTERNET.
Car il s’agit bien de manipulation car personne n’a vu le film « l’Innocence des Musulmans » dont seul un extrait de quinze minutes a été « fuité » dans l’INTERNET. Et, chose curieuse, cela fait plusieurs semaines voire des mois sans que cela ne suscite aucune réaction. Quand et comment la bombe de la colère musulmane a-t-elle été déclenchée ? Il y a là une tâche urgente pour les Etats du monde entier, ceux qui refusent de soutenir le terrorisme, à mener l’enquête.
Autant les promoteurs du « film » que ceux qui ont décidé, après cogitation, de mobiliser les foules fanatisées dans le monde musulman ont des objectifs politiques. Qu’ils l’affirment ou non.
En tout cas la politique internationale, le terrorisme et l’islamophobie font irruption dans la campagne électorale américaine dominée jusqu’ici par les questions économiques avec la crise qui perdure.
Par ailleurs la poussée de fièvre dans le monde musulman pourrait reléguer au second plan et la guerre civile en Syrie et le bras de fer entre la communauté internationale et l’Iran sur la question nucléaire.
Pour l’heure cependant, personne ne bénéficie vraiment de la nouvelle situation ainsi créée. En ce qui concerne les candidats à l’élection présidentielle américaine, le républicain MITT ROMNEY a parlé trop vite et mal. Il a critiqué l’Administration OBAMA à tort et son attitude lui a été reprochée par presque tous les médias (majoritairement démocrates) et même certains Républicains.
Car lorsqu’il y a mort d’hommes (l’ambassadeur américain en Lybie et trois de ses collaborateurs), la Nation fait bloc.
Obama s’est montré ferme et a envoyé des navires militaires au large de la Lybie. Toutefois cette crise qui arrive à la fin de son mandat, avec les images de ses photos et effigies brûlées dans les capitales de beaucoup de pays musulmans est signe d’un échec. Celui de sa main tendue à l’Islam lors de son célèbre discours du Caire.
Mais n’est-ce pas là l’objectif des ultras et pour ne pas les nommer des Salafistes qui tirent les ficelles dans cette affaire ? L’avènement de OBAMA et son discours du Caire avaient eu un écho favorable dans le monde musulman. Il y a ensuite la liquidation de BEN LADEN qui a été un coup fatal porté aux Ultras et terroristes islamistes qui sont, depuis, en perdition.
Cependant ces seuls actes ne suffisent pas à semer paix et ouverture d’esprit dans des pays où vivent des dizaines de millions de personnes en proie à la misère, à l’ignorance et à la désespérance. Le terreau est fertile pour les manipulateurs, les gourous et tous les marchands d’illusions.
Evidemment le seul développement économique ne suffit pas pour éradiquer le fanatisme ; autrement il n’existerait plus en Occident. Alors qu’il fait encore des ravages aux ETATS UNIS où « Suprémacistes blancs », KU KLUX KLAN et évangélistes de toutes chapelles sévissent encore.
Néanmoins il demeure l’enjeu des enjeux. Dans les pays musulmans et notamment les pays arabes, il y a des richesses exceptionnelles captées par un nombre restreint de personnes. Les inégalités sociables et l’absence de démocratie ont déjà permis l’éclosion du « Printemps arabe » ; mais cette révolution a, elle-même, été prise en otage par les Islamistes qui, il est vrai, ont été les seuls ou les plus actifs, sur le terrain social pendant les années de dictature.
Il y a aussi et surtout le terrorisme à la fois religieux (mental) et physique (occupation des rues, violences etc.) qu’ils ont su exercer pour s’imposer. Les Fascistes européens du siècle dernier avaient usé des mêmes stratagèmes pour bâtir des régimes liberticides.
Les pays post Printemps arabe sont encore à la croisée des chemins avec des Islamistes au pouvoir mais pas encore omnipotents. Avancent-ils masqués ? Non ! Ils ont un objectif clair qui est celui d’instaurer la CHARIA ; ce qui n’est pas du goût de fortes minorités voire de réelles majorités dans certains pays.
Ce qui apparait donc à travers cette flambée de violence qui déchire le monde islamique de Tunis à Jakarta c’est d’abord et avant tout une réalité politique nébuleuse. Avec des manipulateurs Salafistes identifiés et des fanatiques de toutes obédiences, force obscure charriée par l’ignorance et la haine.
Il appartient donc à tous les hommes de foi authentique ou simplement de bonne foi de s’engager dans le combat contre les manipulateurs et les fanatiques d’où qu’ils viennent. Les USA doivent balayer devant leurs propres portes en éduquant plus et mieux les jeunes citoyens pour les éloigner des griffes des idéologies extrémistes. Vaste programme dans un pays où la liberté d’expression garantie par le Premier Amendement à la Constitution est un refuge inexpugnable pour les provocateurs de tout acabit.
Les pays musulmans aussi doivent oser dénoncer la bêtise d’organiser des manifestations absurdes contre un film qui n’en est pas un et dont le seul but est de susciter la colère des musulmans. Tous les Humanistes sont interpellés et ont l’obligation morale et politique de faire barrage au terrorisme tout court qu’il soit intellectuel ou autre.
MOUHAMADOU M.DIA
Professeur de Philosophie - Journaliste