« Mahamat Bidon était une porte vers l’enfer... »


Les témoins-victimes des exactions du régime de Habré entre 1982 et 1990 continuent de vouloir lever un coin du voile sur ces années sombres du Tchad. Hier, Outman Moussa, postier de son état, a été devant la barre des CAE pour rapporter leur vécu.

Pour ce deuxième témoin, cela n’a pas été une partie de plaisir pour l’avocat commis de la défense. Me Mounir Ballal n’ayant pas réussi à prendre le témoin à défaut sur la chronologie et la vraisemblance des fait relatés par Outman  Moussa, a essayé une autre tactique. S’intéresser aux motivations de la création de l’association de ce dernier, plus de deux décennies après les faits. « 22ans après vous avez senti le devoir de créer une association de victimes. Pourquoi pas à l’avènement de la 4ème république en 1991, par exemple? » Lui a-t-il demandé. «  J’avais la peur au ventre. Je ne vous le cache pas! »,  s’est justifié le témoin. S’en prenant à la contribution d’institutions dans la création de cette association, il a réussi à faire dire au témoin qu’il a assisté par trois ou quatre fois à des ateliers de réunion « où Reed Broody informait les victimes sur la conduite à tenir ». Pas de contact avec Amnesty International par contre.

Outman Moussa, receveur à la poste de Abéché, a également eu droit à sa part “de déboires”, comme l’a qualifié la défense. Il a ressenti la frayeur de sa vie après avoir ouvert une correspondance anonyme glissée délibérément par l’indicateur de la DDS, Hissein Faraj. Pris sur le fait, le préfet d’alors avait heureusement reconnu l’agent espion et avait relâché Outman. Une lettre factice dans laquelle les opposants à Habré établis au Soudan le remerciaient pour sa contribution de 10 Millions de francs. « Jai commencé à trembler quand j’ai lu, a-t-il déclaré. Mais la configuration d’alors était telle que les liens quelque minimes qu’ils soient, pouvaient se révéler compromettants. Outman Moussa est neveu d’Idriss, ministre (hadjarai) des affaires étrangères de Habré. Ce qui lui a valu, un passage en prison à N’Djaména, après son arrestation le 15 Janvier 1989. « J’avais entendu parler de Mahamat Bidon. Pour moi, c’était une porte vers l’enfer. Je ne pensais pas pouvoir m’en sortir », a-t-il déclaré, racontant son face-à-face avec l’exécuteur de la brigade spéciale d’intervention rapide (BSIR). Il sera relâché le 23 Mars, avec la consigne de ne pas dire ce qu’il a vu ou entendu. Comme ce qu’il est advenu de ces cinq co-détenus.
Devant la barre, il a violé cet ordre. « Mahamat Bidon partait avec les gens et ne revenait pas avec... » A-t-il déclaré, sur du fait que la consigne venait forcément de Habré. A la question de Me Ballal sur la légèreté d’une telle accusation, il est resté ferme. « Je le confirme et re confirme », a-t-il conclu... 
Jeudi 1 Octobre 2015




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