MÉDECINE A TOUBA : pharmacies-clando et « soigne-tout » en roue libre...


MÉDECINE A TOUBA : pharmacies-clando et « soigne-tout » en roue libre...
Touba, capitale religieuse mais aussi Touba, refuge par excellence des clandestins. Une vérité peu reluisante, mais une vérité crue! 

L’on a déjà beaucoup épilogué sur les véhicules immatriculés en République Islamique de Mauritanie, dits « Rim », qui circulent librement sans document valable dans le périmètre communal. 

Seulement, il reste à découvrir le milieu le plus pollué par la clandestinité : celui de la médecine. Pas moins de 400 petites pharmacies clandestines sont éparpillées entre le marché Ocass et les autres mini-centres de commerce de la cité religieuse, en plus des « soigne-tout » qui inondent le tronçon M'backé-Touba. Ce système fonctionne au nez et à la barbe des vrais médecins et pharmaciens qui n’ont que les yeux pour constater les choses se dérouler.  

 

Le million ou les deux millions d’âmes qui vivent dans la ville de Touba ne peinent point à se soigner. L’offre en médicaments, parfois de véritables placebo, est largement supérieure à la demande. Face aux consultations et traitements proposés par l’hôpital, il y a à suffisance d’autres services à portée de toutes les bourses proposés par des "médecins-miracles"  qui prétendent tout soigner. 

 Des médecins soignent-tout 

Ces gens peuvent s’appeler Aladji Kékéré, Aladji Salam Salam, Ahmed Fall Nar, Serigne Niang, Docteur Yalatif, Albarka, Serigne Abdoulaye Sidibé, Baye Mansa, Serigne Karamoko… La liste est très loin d‘être exhaustive. Ces médecins « soigne-tout » sont sollicités à tel enseigne qu’ils ont réduit leur temps de consultation. 

Pour Kékéré et Salam-Salam, par exemple, ils consultent trois jours de la semaine et à des heures précises. Les tickets de consultation sont à un nombre limité. Ce qui justifie la ruée. Leur tarification, très abordable, participe aussi à leur offrir une grande clientèle. Un tour devant leur « officine » suffit pour se rendre compte du fort taux de fréquentation. Par des bandes annonces diffusées à travers les radios locales (jamais les radios nationales ne sont concernées), ces hommes vantent leur expertise pour le moins spéciale. Guérir des maladies comme la tuberculose, le diabète, l’hypertension artérielle, la cataracte, le tétanos, l’inaptitude sexuelle, la rhinite… est comme un jeu d’enfant pour eux. Certains disent même, quand ils sont entre quatre murs, qu’ils sont en mesure de soigner le Sida. Nul n’a encore, cependant, déclaré avoir un remède contre Ebola, peut-être est-ce parce que ce fléau n’est pas encore chez nous.

 Des pharmaciens analphabètes

Les pharmacies clandestines pullulent dans Touba. Elles ne sont pas loin du demi millier de commerces du genre et qui exercent en toute tranquillité, impunément. Ces pharmacies appartiennent à des commerçants très connus qui vendent ces médicaments autant qu’ils le font avec les denrées alimentaires dans leurs autres boutiques. Parfois, les deux types de marchandises se disputent les étals. 

Et pour se procurer une médecine, nul besoin de présenter une ordonnance. Il suffit de connaître le nom du médicament recherché et de disposer de la somme requise pour se le procurer. Ces pharmacies sont, pour certaines d’entre elles, mieux dotées que les pharmacies dites légales. Elles s’approvisionnent par le biais de cargaisons frauduleuses, à l’image de ce réseau de trafic de médicaments de 11 millions de francs démantelé en 2010 par la gendarmerie de Diourbel. Il s‘agissait dans cette sinistre affaire, d’une cargaison de 250 cartons transportées par un véhicule appartenant à la société Ecopharm. Si cette affaire est restée encore dans les mémoires, c’est que dans le deal figurait un vrai pharmacien. En fait, sans que l’on ne puisse désigner du doigt ceux qui le font, le business est devenu tellement juteux que de «vrais» pharmaciens ont, personnellement, financé des pharmacies clandestines pour ne pas disparaître.  

Ce qu'il faut cependant redouter dans ce commerce dévoyé, réside dans la qualité parfois douteuse des produits vendus à la sauvette, mais ô combien prisée par les populations locales peu regardantes sur la fraîcheur et l'origine de ce qu'on leur propose. C'est vrai que la crise est passée par là, mais Touba mérite plus et mieux!
Samedi 3 Janvier 2015




Dans la même rubrique :