La décision qui a été prise récemment par le Président Macky SALL d’abroger deux décrets, l’un allouant certains avantages aux généraux admis à la retraite et l’autre créant un fonds commun à l’avantage des magistrats, fait l’objet de nombreux commentaires et provoque des réa ctions diverses.
A cet égard, il a été observé que certains soutiennent qu’il y a eu atteinte à un droit acquis, d’autres mus par des raisons politiques l’accusent de manichéisme, et d’autres encore l’invitent à généraliser la mesure pour faire preuve de justice.
Pour tenter de répondre à cette série de questionnements, nous avons en tant que citoyen, pris le parti d’interroger les faits pour en analyser le jeu des causes et les effets.
Concernant l’annulation du décret relatif au fonds commun des magistrats, qui est considérée comme une atteinte à un droit acquis, il convient de rappeler qu’un acquis n’est considéré comme un droit que s’il a un fondement légal et que seul la loi est admise à intervenir dans la procédure pénale.
Or, dans la mesure où, les fonds supprimés devaient provenir essentiellement des amendes infligées aux justiciables, le décret qui l’instituait était d’une illégalité grossière. En effet, un fonds commun ayant une telle origine, introduit par sa seule existence, non pas un conflit d’intérêts, mais une contradiction d’intérêts dans le procès pénal, dès lors qu’il profite aux magistrats.
La contradiction d’intérêt est antinomique à l’équité qui évoque l’idée de bonne justice. Elle fait partie des causes limitées permettant de récuser un juge. Elle est préjudiciable aux droits de la défense dont le respect est considéré par notre Constitution, en son article 9, comme un impératif catégorique. C’est dire que le décret créant le fonds commun des magistrats, n’a jamais eu une existence légale, et que l’acte d’annulation y afférent a été pris pour consacrer au principe du parallélisme des formes.
A tout prendre, il peut être dit que les propos d’un ancien Président de l’Union des Magistrats du Sénégal rapportés par un journal de la place dans sa livraison du jeudi 13 septembre 2012 selon lesquels « … (le fonds commun) donne aux magistrats un intérêt personnel et pécuniaire sur les décisions de justice qu’ils prennent ou les actes judiciaires auxquels ils participent… » montrent que le décret instituant le fonds commun des magistrats était un acte propre à installer dans l’esprit des justiciables un doute raisonnable quant à l’équilibre des procès.
Pour ce qui concerne le décret qui octroyait des avantages pécuniaires aux généraux à la retraite, nous avons la conviction qu’il n’avait pas été rendu en réponse à une sollicitation quelconque, et c’est pourquoi, sans entrer dans des conjectures hasardeuses, nous pouvons dire que personne ne leur fait grief de quoique ce soit dans cette affaire.
Il est de commune notoriété que dans l’armée, l’officier et le général en particulier, est censé incarner l’archétype du soldat, c'est-à-dire cet homme au caractère antique qui, en tout lieu et en toute circonstance, porte en bandoulière l’éthique du chevalier.
Donc, il ne pourrait que subir et non susciter un texte, pouvant porter préjudice à l’homogénéité et à l’efficacité de l’institution militaire.
Le décret en cause portait en lui deux motifs d’annulation aussi graves l’un que l’autre. D’abord il était préjudiciable à l’idéal militaire, et donc à l’efficacité de notre système de défense. En institutionnalisant des avantages et privilèges qui ne sont pas prévus par la réglementation commune, au profit d’une seule catégorie de militaires, l’on introduit inconsciemment la dissociation dans un corps auquel la cohésion est l’une des premières nécessités pour bien accomplir la mission que lui a assignée la Nation.
Dans une telle hypothèse, l’esprit du lucre s’installe, et ce faisant, la foi en l’avancement finit par suppléer à la foi en la patrie pendant que la servitude militaire qui requiert de hautes vertus, devient tout simplement une servitude de cour où seule l’élévation importe même si la turpide doit en être le sol.
Ensuite, l’application d’un décret de cette nature peut provoquer, une fracture dormante dans les rangs de l’armée. L’institution militaire est dans l’Etat, le corps qui répugne le plus tout ce qui ressemble à une injustice à cause de la rugosité du règlement et l’austérité à laquelle le militaire est soumis durant toute sa carrière.
Le Général De Gaulle l’a souligné, le galon n’a plus cette vertu immanente de la tunique de Nessus. Aujourd’hui quasiment tous les officiers ont fait, soit la même école, soit des académies militaires équivalentes. Accorder des privilèges exorbitants non réglementaires, provoque inéluctablement une fracture dans les rangs, ce qui constitue un danger virtuel pour la sécurité nationale.
Au total, il peut être victorieusement soutenu que les décrets d’annulation dont il s’agit, n’ont eu pour but que de rétablir la légalité et de prévenir certaines formes de criminalité.
Souleymane NDIAYE
Officier à la retraite
Docteur en Droit et en Sciences criminelles
A cet égard, il a été observé que certains soutiennent qu’il y a eu atteinte à un droit acquis, d’autres mus par des raisons politiques l’accusent de manichéisme, et d’autres encore l’invitent à généraliser la mesure pour faire preuve de justice.
Pour tenter de répondre à cette série de questionnements, nous avons en tant que citoyen, pris le parti d’interroger les faits pour en analyser le jeu des causes et les effets.
Concernant l’annulation du décret relatif au fonds commun des magistrats, qui est considérée comme une atteinte à un droit acquis, il convient de rappeler qu’un acquis n’est considéré comme un droit que s’il a un fondement légal et que seul la loi est admise à intervenir dans la procédure pénale.
Or, dans la mesure où, les fonds supprimés devaient provenir essentiellement des amendes infligées aux justiciables, le décret qui l’instituait était d’une illégalité grossière. En effet, un fonds commun ayant une telle origine, introduit par sa seule existence, non pas un conflit d’intérêts, mais une contradiction d’intérêts dans le procès pénal, dès lors qu’il profite aux magistrats.
La contradiction d’intérêt est antinomique à l’équité qui évoque l’idée de bonne justice. Elle fait partie des causes limitées permettant de récuser un juge. Elle est préjudiciable aux droits de la défense dont le respect est considéré par notre Constitution, en son article 9, comme un impératif catégorique. C’est dire que le décret créant le fonds commun des magistrats, n’a jamais eu une existence légale, et que l’acte d’annulation y afférent a été pris pour consacrer au principe du parallélisme des formes.
A tout prendre, il peut être dit que les propos d’un ancien Président de l’Union des Magistrats du Sénégal rapportés par un journal de la place dans sa livraison du jeudi 13 septembre 2012 selon lesquels « … (le fonds commun) donne aux magistrats un intérêt personnel et pécuniaire sur les décisions de justice qu’ils prennent ou les actes judiciaires auxquels ils participent… » montrent que le décret instituant le fonds commun des magistrats était un acte propre à installer dans l’esprit des justiciables un doute raisonnable quant à l’équilibre des procès.
Pour ce qui concerne le décret qui octroyait des avantages pécuniaires aux généraux à la retraite, nous avons la conviction qu’il n’avait pas été rendu en réponse à une sollicitation quelconque, et c’est pourquoi, sans entrer dans des conjectures hasardeuses, nous pouvons dire que personne ne leur fait grief de quoique ce soit dans cette affaire.
Il est de commune notoriété que dans l’armée, l’officier et le général en particulier, est censé incarner l’archétype du soldat, c'est-à-dire cet homme au caractère antique qui, en tout lieu et en toute circonstance, porte en bandoulière l’éthique du chevalier.
Donc, il ne pourrait que subir et non susciter un texte, pouvant porter préjudice à l’homogénéité et à l’efficacité de l’institution militaire.
Le décret en cause portait en lui deux motifs d’annulation aussi graves l’un que l’autre. D’abord il était préjudiciable à l’idéal militaire, et donc à l’efficacité de notre système de défense. En institutionnalisant des avantages et privilèges qui ne sont pas prévus par la réglementation commune, au profit d’une seule catégorie de militaires, l’on introduit inconsciemment la dissociation dans un corps auquel la cohésion est l’une des premières nécessités pour bien accomplir la mission que lui a assignée la Nation.
Dans une telle hypothèse, l’esprit du lucre s’installe, et ce faisant, la foi en l’avancement finit par suppléer à la foi en la patrie pendant que la servitude militaire qui requiert de hautes vertus, devient tout simplement une servitude de cour où seule l’élévation importe même si la turpide doit en être le sol.
Ensuite, l’application d’un décret de cette nature peut provoquer, une fracture dormante dans les rangs de l’armée. L’institution militaire est dans l’Etat, le corps qui répugne le plus tout ce qui ressemble à une injustice à cause de la rugosité du règlement et l’austérité à laquelle le militaire est soumis durant toute sa carrière.
Le Général De Gaulle l’a souligné, le galon n’a plus cette vertu immanente de la tunique de Nessus. Aujourd’hui quasiment tous les officiers ont fait, soit la même école, soit des académies militaires équivalentes. Accorder des privilèges exorbitants non réglementaires, provoque inéluctablement une fracture dans les rangs, ce qui constitue un danger virtuel pour la sécurité nationale.
Au total, il peut être victorieusement soutenu que les décrets d’annulation dont il s’agit, n’ont eu pour but que de rétablir la légalité et de prévenir certaines formes de criminalité.
Souleymane NDIAYE
Officier à la retraite
Docteur en Droit et en Sciences criminelles
Autres articles
-
Les nominations en conseil des ministres du Mercredi 24 Avril 2024
-
L'incroyable quête de Gilles, 32 ans, adopté par une Belge, à la recherche de sa mère biologique d'origine sénégalaise !
-
Événements liés aux manifestations de janvier 2021 à février 2024: Une commission d’indemnisation des familles des victimes annoncée
-
Tribunal de Dakar : un chauffeur de DHL se fait passer pour un gendarme pour arnaquer des boutiquiers
-
Sénégal : Paul Pogba était à Tivaouane pour visiter la grande mosquée en chantier…