Pour l’autosuffisance alimentaire : Et si une des solutions était dans nos prisons ?


Le centre de conférences Internationales Abdou Diouf de Diamniadio abrite du 25 au 27 janvier, la 2e Conférence internationale de Dakar sur l’agriculture, Dakar II. Une occasion pour les dirigeants Africains, pour encore et encore parler de l’autosuffisance alimentaire dans le continent. 

Selon le Rapport mondial sur la crise alimentaire en 2022, jusqu’à 205 millions de personnes à travers le monde pourraient faire face à l’insécurité alimentaire. S’y ajoutent la pénurie d’engrais et la hausse vertigineuse des prix qui plombent la production agricole. Cette crise sans précédent, édifie sur l’urgence pour le continent Africain de mettre fin à sa dépendance alimentaire vis-à-vis de l’extérieur, d’apprendre à se nourrir par lui-même, et mieux encore, de contribuer à nourrir le monde au lieu de continuer à importer l’essentiel de ses produits alimentaires. La Déclaration de Maputo de juillet 2003 avait pourtant souligné que pour transformer le potentiel agricole de l’Afrique en réalité, il faut allouer au moins 10% du budget national à l’agriculture. Au Sénégal, le chef de l’État de relever la part des investissements agricoles dans le budget général d’investissement qui s’élève à 12%. De plus, en deux ans, l’État a augmenté de 75% le financement de la campagne agricole d’hivernage, afin d’accélérer sa marche vers la souveraineté alimentaire.
Dans son allocution d’ouverture, le chef de l’État Macky Sall, président en exercice de l’UA, a invité les partenariats de façon générale, à mieux coordonner les différentes initiatives en direction de l’Afrique pour qu’ils soient en harmonie avec les quatre piliers du Programme détaillé pour le développement de l’agriculture en Afrique. Il faut selon lui, valoriser davantage la recherche, améliorer la mécanisation agricole et la maîtrise de l’eau, et intensifier l’utilisation de méthodes et technologies appropriées, y compris la transformation locale des produits ; Ensuite, élargir les superficies exploitées et d’assurer une gestion durable des terres; Troisièmement, améliorer l’accès des produits aux marchés, en renforçant les infrastructures de désenclavement et d’interconnexion transfrontalière, ainsi que les équipements de stockage, de conservation et de transformation locale; Enfin, soutenir les petits exploitants, notamment les femmes et les jeunes par un encadrement et un financement adaptés à leurs besoins. Il faut le dire et le relever, ces quatre piliers, motivent la création des Domaines Agricoles Communautaires (DAC), des Agropoles et les missions assignées à des directions et agences comme la SAED, la Der/FJ…

Il faut donc une transformation durable des systèmes agricoles, qui doit être accompagnée par une sensible réforme foncière. Mais il est possible d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. Pour ce faire Macky Sall invite ses pairs chefs d’État à choisir « le chemin de l’Afrique des solutions, qui nous met dans la perspective d’une agriculture moderne, et nous conduit, au-delà de la résilience, vers la souveraineté alimentaire. » Selon Antonio Guterres, Secrétaire général des Nations Unies,  « Les gouvernements doivent renforcer la production agricole et investir dans des systèmes alimentaires résilients qui protègent les petits producteurs alimentaires. »  
Au Sénégal, le Président Macky Sall a rappelé son option d’intégrer le volet « souveraineté alimentaire » aux missions et à l’intitulé du Ministère de l’Agriculture et de l’Équipement rural afin d’asseoir l’extension des surfaces cultivées, l’amplification des productions agricoles et horticoles au regard du volume des importations et des modes de consommation du pays. Le Chef de l’État Macky Sall avait insisté sur le caractère interministériel de cette orientation majeure du Plan Sénégal Émergent et a engagé le Ministre en charge de l’Agriculture, sous la supervision du Premier Ministre, d’élaborer avant fin décembre 2022, une Stratégie de souveraineté alimentaire du Sénégal (SAS), consensuelle, pragmatique et durable. Trois départements ministériels, à savoir le Ministère de l’Agriculture, de l’Equipement Rural et de la Souveraineté Alimentaire, le Ministère de la Pêche et de l’Économie Maritime, le Ministre de l’Élevage et de la production animale, sont les trois ministères impliqués dans ce plan stratégique, même si ce sont beaucoup de ministères qui sont, à des degrés différents, appelés à intervenir, et même si un ministère comme celui de la justice, se sentirait à priori exclu. Mais oh que non !
 
 
Du rôle du ministère de la justice
 
En décembre dernier, lors du vote du  budget du ministère de la Justice pour l’exercice 2023, un budget qui a connu une hausse de près 5 milliards, Ismaïla Madior Fall a rappelé la volonté du président de la République de construire de nouvelles infrastructures pénitentiaires. L’objectif étant de décongestionner les prisons actuelles. Au Sénégal, la population pénale est constituée de la population carcérale (prévenus et condamnés) et des écroués. L’effectif de la population carcérale s’élève à 11 576 d’individus en 2019 dont 241 mineurs et 11335 adultes. 4102 soit 35.4 % de cette population carcérale, se trouve à Dakar. En 2019, 36,0% des détenus condamnés le sont pour des peines allant de 1 an 1 jour à 2 ans. 9063 des détenus ont été arrêtés pour vol et recel, 5984 pour Détention-usage de chanvre indien, pour Trafic de drogue 1104 personnes sont en prison, 2458 pour Coups et blessures volontaires, 3149 pour escroquerie. Abus de confiance, Faux et usage de faux. Pour défaut de carnet sanitaire et social-proxénétisme 293, 33 pour Avortement. Ainsi, en 2019, « le vol et le recel » (30,4%) ainsi que « la détention, l’usage et le trafic de drogue » (20,1%) représentent un peu plus de la moitié (50,5%) des cas d’infractions commises par les personnes écrouées au Sénégal. Suivent ensuite les autres types d’infractions (14,1%), « l’escroquerie et l’abus de confiance » (10,6%) et « les coups et blessures volontaires » (8,2%). Cette population constitue donc l’écrasante majorité des détenus qui remplissent les prisons. Pour désengorger les prisons, il est possible de transférer ces catégories de détenus, non pas dans des prisons construites comme celles qui existent aujourd’hui, mais plutôt dans les domaines agricoles communautaires. Il faut dire pour le relever que le PRODAC n’a jusque-là pas réussi à exploiter la totalité des superficies qui lui sont allouées. 4000 ha sont encore disponibles à Keur Momar Sarr, plus de 2000 à Sefa, 1000 à Itato, sans compter les dizaines de milliers d’ha encore non exploités. Rien qu’a SEFA, Keur Momar SARR et Itato, ce sont près de 10 000 ha qui sont disponibles avec déjà des infrastructures. Ces DAC pourraient être transformés en PRISON AGRICOLE.
 
 
Une PRISON AGRICOLE : de quoi il s’agit ?
 
L’idée est de construire une prison dans un domaine agricole. Sur les superficies non exploitées par le PRODAC, le ministère de la justice pourrait construire des dortoirs, des logements pour agents pénitentiaires, une infirmerie, des espaces de jeux et de  loisirs… sur une superficie d’environ 100 ha. Le reste sera entièrement utilisé pour l’agriculture et l’élevage. Ce sera et surtout des lieux de rééducation. 4000 détenus près de la totalité de la population carcérale de Dakar, pourront y être transférés.
Pour l’agriculture, il sera confié à chaque détenu un hectare. On pourrait par exemple dédier le dac de KMS à l’arachide, ou un protocole sera signé avec la SONACOS. On y cultivera deux fois dans l’année sur au moins 4000 ha. Un pourcentage des recettes tirées de la vente de cette arachide, sera logé dans le compte du détenu, le reste sera utilisé par l’administration pour l’entretien des locaux et les primes aux gardes.
Parallèlement, d’autres spéculations y seront développées pour permettre à la prison d’être financièrement et alimentairement autosuffisant.
 Pour l’élevage avec surtout des moutons pour tendre au bout de deux ans vers l’autosuffisance en mouton de Tabaski, il sera confié aux 4000 détenus, 400 000 moutons, à raison de 100 par détenu. Des moutons qui seront engraissés et revendus pour la Tabaski. Ici aussi, un pourcentage des recettes tirées de la vente sera versé aux détenus.
Le même dispositif sera mis en place au bout de deux ans à Itato et dans trois ans à SEFA. Il faut dire qu’après avoir purgé sa peine le détenu aura la liberté de rester et ou de partir...
Jeudi 26 Janvier 2023
Dakaractu




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