Mort du maréchal Idriss Déby Itno : Qui est le grand perdant? La France ou le Sahel ?

Arrivé au pouvoir le 02 décembre 1990 après le renversement du régime du président Hissène Habré à l’issue d’une sanglante répression de l'opposition politique et des groupes ethniques, le président Idriss Déby est tombé au front en défendant l’intégrité de son territoire. Une mort qui dit tout sur l’engagement de l’ex président Tchadien, qui avait déjà réussi à vendre à la France l’idée selon laquelle la préoccupante question de la lutte contre l’avancée djihadiste dans le Sahel ne pouvait pas prospérer sans lui ou de son apport. Ce qui amène Dakaractu à s’interroger sur : Qui sera le grand perdant de la mort du président Idriss Déby entre le Sahel et la France.


S’il y a un grand perdant dans la mort du président tchadien Idriss Déby c’est plutôt la France. Car son engagement avec le maréchal Idriss Déby Itno pour combattre l’avancée djihadiste dans le Sahel est tel qu’on ne plus parler aujourd’hui de lutte contre le terrorisme dans le Sahel sans évoquer le Tchad. C’est du moins l’avis de Momar Ndiongue, spécialiste des questions politiques.

 

« Le plus grand perdant dans cette affaire c'est la France. Il y a certains qui le considéraient comme un allié essentiel  dans la lutte contre le terrorisme. Idriss Déby avait réussi à vendre à la France l'idée selon laquelle sans lui, la lutte contre le terrorisme au Sahel ne peut prospérer. D'ailleurs vous avez entendu le communiqué officiel du gouvernement français qui déplore la mort d'un allié très utile, très important. Cela veut tout simplement dire que la France est très peu soucieuse des questions de démocratie et de bonne gouvernance. Quelqu'un comme Idriss Déby quand bien même il a pu faire grand chose pour lutter contre le terrorisme et pour  freiner son expansion au Sahel, c'était quand même un dictateur notoire. Des questions de gouvernance aussi, il s'en fichait pas mal. Mais tout cela n'avait pas empêché la France de l'adouber. Ceux qui disent que la France est dans une logique d'impérialiste et peu lui importe le sort de notre pays, ont toujours raison », souligne Momar Diongue. 

 

 

Même si une nouvelle page de l’histoire politique du Tchad semble ouverte aujourd’hui, avec la mort au front du maréchal Idriss Déby Itno, l’analyste politique rappelle que l’ex président Tchadien a réussi à bâtir une armée très puissante. Ce qui veut dire que la relève peut bien être assurée, si toutefois la transition est bien assurée pour la nouvelle équipe.  

                       

« C'est vrai qu'Idriss Deby n'est plus là, mais il a réussi à bâtir une armée très aguerrie. Ce n'est pas parce que tout simplement il a disparu, que l'armée Tchadienne va perdre toutes les qualités et toute l'expérience qu'elle a eu déjà à capitaliser depuis des décennies et des décennies. Je crois que si le pays est stable, (d'ailleurs c'est ce qu'il faut souhaiter pour le pays), et que la transition puisse être réussie, qu'un homme soit élu dans un processus démocratique, d'où la légitimité et la légalité ne souffriront d'aucun doute, je ne doute pas sur la capacité de l'armée Tchadienne à pouvoir faire face aux vagues terroristes comme ça a été le cas jusque-là. Donc le premier pari, c'est la réussite de la transition, gage de la stabilité du pays, le pouvoir. Si cela est gagné, l'armée continuera à faire son travail normalement. », a précisé notre interlocuteur.  

 

Toutefois le journaliste doublé d’analyste politique précise que la mort du président Tchadien est une perte pour le Sahel. Mais cette perte peut être compensée une fois que la transition réussira. Car, estime toujours Momar Ndiongue, le maréchal Idriss Déby Itno n’était pas le seul combattant à faire face à l’avancée djihadiste dans le pays.

 

« D'une certaine manière, c'est une grande perte pour le Sahel, parce qu'Idriss était un président de la République qui n'hésitait pas à aller au front pour faire face aux rebelles et à l'avancée djihadiste. De ce point de vue, on ne trouve pas dans le Sahel ou dans la sous-région, un chef d'État qui a pu avoir ce degré d'engagement d'Idriss Déby jusqu'à monter au combat pour accompagner les troupes. Mais encore une fois, cette perte doit être compensée une fois que la transition réussira et qu'il y aura la stabilité au Tchad. C'est une question d'armée. Ce n'est pas un seul homme et quelles que soient la bravoure et l'expérience du président Deby, ce n'était pas lui seul qui faisait face aux avancées terroristes. Il y a une très bonne armée qui est aguerrie, qui a accumulé beaucoup d'expérience, qui connaît le terrain et c'est sur cette base là qu'il s'était appuyé. Maintenant si le pays reste stable et que l'armée trouve un bon commandement, sans qu'il y ait de division en son sein, je ne doute pas que l'armée puisse exercer correctement son travail pour faire face efficacement à l'avancée djihadiste dans le pays », a conclu Momar Ndiongue.

 

Une question qui restera longtemps discutée, si l’on sait que l’avancée des troupes djihadistes dans le Sahel continuera encore de mobiliser les gouvernants et les combattants, français et africains sur le même terrain miné...

Mercredi 21 Avril 2021




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