Keur Mbaye Fall s’est réveillé sous le choc. Dans la nuit du samedi 20 au dimanche 21 décembre, une scène d’apparence banale entre époux a viré au drame absolu. P.M. Diop, 35 ans, commerçant spécialisé dans la vente de téléphones portables, a mortellement atteint son épouse, Binetou Guèye, 33 ans, d’une balle en pleine tempe. Un coup de feu parti, selon l’observateur , alors qu’il « plaisantait » avec une arme récemment acquise. Le quartier, encore sous le traumatisme, répète en boucle une sentence devenue glaçante : on ne plaisante jamais avec une arme à feu.
Une arme achetée pour se « protéger »
Mariés depuis quatre ans, P.M. Diop et Binetou Guèye vivaient au domicile familial de l’époux, à Keur Mbaye Fall. Connu dans le voisinage sous le surnom de « Diop Portable », le jeune commerçant gérait une boutique de téléphones et s’adonnait parallèlement à l’élevage de moutons, installés sur la terrasse de la maison.
Avec le sentiment d’insécurité grandissant dans la zone, il avait décidé, quelques jours avant le drame, d’acheter une arme à feu à Saly pour la somme de 70 000 FCFA. L’arme sera plus tard identifiée comme un pistolet automatique (PA), muni d’un chargeur de dix cartouches de calibre 9 mm. Le vendeur, lui, demeure introuvable.
Le basculement en quelques secondes
Ce samedi-là, la journée s’achève dans une ambiance ordinaire. Un ami rend visite à P.M. Diop ; tous deux montent sur la terrasse pour admirer les moutons et partager le thé, servi par Binetou Guèye restée au rez-de-chaussée. La nuit tombe lorsque l’ami prend congé, laissant le couple dans l’intimité de leur chambre.
À l’heure du dîner, l’atmosphère est détendue, ponctuée de plaisanteries et de piques, comme le confiera plus tard un proche : « C’était naturel, ils étaient cousins et très complices. » C’est dans ce climat que l’irréparable se produit. P.M. Diop se lève, saisit son pistolet et lance, sur le ton de la plaisanterie :
« Fais gaffe, je suis maintenant un homme armé… »
Il mime alors le geste d’un tireur, pointant l’arme vers la tempe de son épouse. Elle lui répond, inquiète mais sans imaginer l’issue fatale : « Arrête, on ne joue pas avec ça. » Quelques secondes plus tard, un coup de feu retentit. La balle atteint Binetou Guèye à la tempe, la tuant sur le coup.
Une scène d’horreur
Dans la maison, la détonation provoque la stupeur. Certains pensent d’abord à l’explosion d’une bonbonne de gaz. Il est un peu plus de 22h30 lorsque la famille découvre l’horreur : P.M. Diop, figé, l’arme encore fumante à la main, et au sol, le corps sans vie de son épouse, la tête gravement touchée, le mur maculé de sang.
Les cris déchirent la nuit. Effondré, l’époux tente de retourner l’arme contre lui. Il est rapidement maîtrisé et désarmé par ses proches, puis gardé sous surveillance jusqu’à l’arrivée des gendarmes de la Brigade de la Zone franche industrielle.
« Je ne mérite plus de vivre »
Livré aux forces de l’ordre, P.M. Diop est inconsolable. Entre deux sanglots, il supplie qu’on le laisse se suicider pour « rejoindre Binetou ». « Je ne mérite plus de vivre. Elle a tout fait pour moi. Qu’est-ce qui m’est arrivé ? », répète-t-il, sous le regard bouleversé des gendarmes.
Dans ses confidences, il évoque le soutien indéfectible de son épouse. C’est elle, dit-il, qui lui avait remis l’argent de sa tontine pour lancer son commerce en Gambie, une initiative à l’origine de sa réussite actuelle. Un témoignage poignant qui a conduit les enquêteurs à renforcer la surveillance pendant sa garde à vue, afin d’éviter tout passage à l’acte.
Accident ou crime ?
L’enquête devra désormais déterminer la qualification exacte des faits. P.M. Diop soutient avoir d’abord visé un miroir et un téléviseur, avant que le coup ne parte accidentellement. Si cette version est confirmée, il pourrait être poursuivi pour homicide involontaire et détention illégale d’arme à feu.