(ENQUÊTE) TOUBA À DEUX MOIS DU MAGAL / Deux forages sans pompe, 3 châteaux d'eau qui menacent ruine, un éclairage public presque nul, une somme fantomatique de 150 millions, des zones inondables à foison...


'' De mémoire d'homme, l'on ne se rappelle pas un magal sans problème d'eau... '' La boutade est de Serigne Ousmane Mbacké, coordonnateur du Grand Magal de Touba et il aime le ressasser pour que nul n'en ignore. Son plaidoyer, malgré son caractère répétitif qui dure depuis plus de 5 ans, n'a toujours pas trouvé solution. C'est presque devenu chez lui une hantise et le Mbacké-Mbacké se demande encore s'il ne faudra pas  aborder la problème autrement pour définitivement le résoudre.

C'est d'ailleurs lui qui accompagnera le nouveau gouverneur de Diourbel dans sa tournée du mercredi 21 août 2019. Une visite de prospection qui est censée  permettre aux autorités d'identifier les difficultés majeures à quelques semaines du 18 Safar. La situation est pour l'instant alarmante avec au moins deux forages en panne, faute de pompes. En fait, il s'agissait de trois forages et c'est in extremis avant la fête de l'Aïd-El-Kébir, que la solution a été trouvée pour le forage de Darou Khadim dont la pompe était calibrée 75.  L'exécutif régional de signaler que l'espoir de voir les deux autres fonctionner à nouveau réside dans l'effort que fournira la structure, ''Touba Ca Kanam'', qui s'est engagée, dit-il, à trouver les pompes 92 ( ou 75)  et 18 en question, respectivement, pour '' Rahmatoul Ahad '' et '' Bagdad '' ( soit une dépense de plus de 18 millions de francs).  

Autant dire que l'État est en passe de se départir de la gestion des forages. D'ailleurs, une autorité administrative de la place n'aura pas manqué de le signifier au comité d'organisation du Grand Magal et à ses partenaires lors d'une réunion déroulée à la préfecture de Mbacké, à l'abri de la presse. Il faut aussi dire que beaucoup de forages souffrent à cause  du fait qu'il n'y a pas de conducteurs et de murs de clôture. Autres cas spécifiques : l'état de délabrement avancé de trois châteaux d'eau. Afin de ne courir aucun risque d'effondrement qui pourrait porter préjudice au bien-être des populations, il a été prévu de procéder à leur destruction très prochainement sans ( véritablement)  qu'une date n'ait été donnée. 

Au moment où ces lignes sont écrites, une grande partie de Touba est déjà confrontée à un problème d'eau. Ainsi, pour les besoins du magal, le gouverneur compte voir fonctionnel l'ensemble des 29 forages existants et s'engage à aller chercher 100 camions-citernes et 80 bâches souples. Seulement, font régulièrement remarquer les autorités religieuses de Touba et Serigne Ousmane Mbacké Gaïndé Fatma en premier, '' les camions ne sont généralement que d'une piètre utilité à cause de leur immobilité confrontés qu'ils sont aux bouchons ( et bientôt aux zones inondables), mais encore à cause de l'irresponsabilité de certains chauffeurs qui manquent de boucler les circuits à eux assignés. Ce qui fait que beaucoup de cibles attendent toujours désespérément. 

UN ÉCLAIRAGE PUBLIC PRESQUE NUL

En plus de problème d'eau, Touba a aussi un déficit d'éclairage public qui dépasse largement le seuil du tolérable pour une localité qui compte pas moins de 2 millions de personnes. Quand Dakaractu a cherché de savoir le nombre de lampadaires défectueux dans la cité religieuse de Touba, il a été confronté à un sacré blocage, celui d'avoir le bon chiffre. Ni la mairie, ni la Société nationale de distribution de l'électricité n'ont voulu nous le donner. À défaut de pouvoir les compter (ces lampadaires),  nous avons pu, tant bien que mal,  identifier les artères qui sont  dans l'obscurité depuis plusieurs mois. L'axe Darou Marnane/Ndamatou, le tronçon Mbacké-Touba, la route dite de l'héliport, les 2X2V Rocade Est, les lignes qui partent de la Grande Mosquée qui rallient respectivement Aaliyah, Route de Dahira Djoloff, Forage Ndiouga Kébé, Université... en font partie. Le même constat est fait le long de la  corniche :  aucune lueur !


Quand nous avons interrogé Ibrahima Kâ, chargé de l'éclairage public au niveau de la municipalité, il se limitera à imputer les dysfonctionnements à  '' l'Acte 3 de la décentralisation '' qui a ( laconiquement)  confié, selon lui,  l'éclairage public à la mairie alors que les moyens financiers sont donnés à la Senelec. D'ailleurs, se posera t-il la question de savoir à quoi ont servi les 150 millions donnés l'année dernière à la société d'électricité de Touba par le DG  Makhtar Cissé. Pour lui, c'est clair, l'argent n'a pas été investi, si libéré, dans l'éclairage de Touba, "sinon, jamais la cité n'aurait été confrontée à une telle obscurité."

ZONES INONDABLES À FOISON

Malgré les réels efforts de l'État et l'appel récemment lancé par le Khalife Général des Mourides à l'endroit des populations, les invitant à déboucher les canaux d'évacuation d'eaux de pluie bouchés par les ordures... Touba , au vu des premiers dégâts causés par les premières averses, n'est pas à l'abri d'inondations. D'ailleurs, les zones jadis en proie à ces inondations, présentent déjà les signes montrant qu'elles peuvent être englouties à tout moment si les pluies s'accentuaient. Si le magal de 2019 est en mesure d'échapper à l'hivernage prochain, celui de 2020 ne le pourra certainement pas. D'où l'urgence de trouver de solutions durables dès maintenant.

"Au Sénégal, on sait identifier les problèmes et même inventer les solutions. Seulement, quand il s'agit d'appliquer ces solutions à ces problèmes, tout le monde est abonné absent '', nous largue un chef religieux dont une partie de la concession est sous les eaux...
Jeudi 22 Août 2019




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