Benno à l’heure des comptes : Après le chant de la victoire, le chantage entre alliés


La veille d’une élection présidentielle est toujours le moment le plus difficile pour un président de la République qui est candidat à sa propre succession. C’est le temps de la surenchère, pour ne pas dire du chantage. Le score de moins de 50 % obtenu par Benno Bokk Yakaar aux dernières législatives place cette coalition sur le fil du rasoir à quelques encablures de 2019. En plus de devoir satisfaire les desiderata de ses camarades de parti, Macky Sall est obligé de composer avec ses alliés, principalement, l’Alliance des forces de progrès et le Parti socialiste. Or, ces deux formations politiques, qui comptaient de nombreux élus locaux au sortir des locales de mars 2009, se considèrent toujours comme des victimes des élections de 2014 quand la boulimie supposée de l’Apr les avait chassés de la plupart des collectivités qu’ils dirigeaient jusque-là.

C’est ainsi que l’Afp et le Ps ont perdu des mairies de ville aussi stratégiques que Guédiawaye et Pikine, tombées dans l’escarcelle de l’Apr. Idem pour Kaolack ou encore Louga. Si le parti présidentiel n’a pas éjecté les socialistes de la tête de Dakar, c’est à cause de la mise sur pied des listes de Taxawu Ndakaru sous la houlette de Khalifa Sall.

Comme si le leader de la coalition était attendu à ce tournant, les alliés, depuis quelques jours, balancent des phrases sous le mode de l’ironie et de la mise en garde. Cela, après que Macky Sall a, via un communiqué signé de Seydou Guèye, recadré les responsables de l’Apr qui lui aurait prêté des colportages contre Niasse et Tanor à l’occasion de l’audience accordée samedi passé aux dirigeants du parti marron-beige à Dakar.

« C’est vrai que nous ne sommes pas satisfaits de notre alliance au sein de Benno Bokk Yakaar. C’est normal car tous les compagnonnages sont ainsi faits », déclare Aminata Mbengue Ndiaye depuis Louga. Et dire que la ministre de l’Elevage n’était pas contente de la manière dont Moustapha Diop l’avait battue en 2014.   

« Le Président Niasse nous demande de faire  notre priorité les élections locales de 2019 et la Présidentielle de 2024 », ajoute le ministre progressiste Alioune Sarr. En d’autres termes, l’Afp et le Ps aident Macky à se faire réélire et, en contrepartie, ce dernier leur « rétrocède » leurs mairies en 2019.

Qui plus est, le quota accordé aux alliés dans le gouvernement et à l’Assemblée nationale est une autre pomme de discorde. L’Alliance des forces de progrès ne compte plus qu’un seul ministre dans l’équipe dirigée par Boun Abdallah Dionne.  « La portion réservée à l’Afp est injuste, Niasse ne mérite pas ça…l’Afp était dans une parfaite légitimité de pouvoir réclamer les positions qu’elle avait », râlait Zator Mbaye au lendemain des investitures pour les législatives de juillet 2017.

Moussa Bocar Thiam du Ps embouche la même trompette suite au remaniement de septembre passé : « Ce nouveau gouvernement ne reflète pas la poids politique du Ps…. On s’attendait à avoir un minimum de cinq ministres socialistes. Nous sommes vraiment très surpris de voir qu’on se retrouve avec deux ministres, le Pit un, l’Afp un et la Ld un », explique Moussa Bocar Thiam.

Comme pour ajouter à la confusion, Ousmane Tanor Dieng a , cette semaine, expliqué que le Ps ne s’est pas encore prononcé sur la question de la candidature alors qu’on croyait ce débat tranché depuis l’exclusion de Khalifa Sall et Cie.

En définitive, avant tout soutien pour la présidentielle, il est exigé de Macky Sall des gages. Comme si le fait de diriger l’Assemblée nationale et le Haut conseil des collectivités territoriales ne suffit pas à ses alliés pour être dans le meilleur des mondes au sein de Benno Bokk Yakaar. 
Samedi 20 Janvier 2018




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