Zoom sur la belle fête « avortée » de la Gambie : Gagner une élection est une chose. Disposer du pouvoir en est toute une autre ! (par Amadou Tidiane THIEELLO)


Zoom sur la belle fête « avortée » de la Gambie : Gagner une élection est une chose. Disposer du pouvoir en est toute une autre ! (par Amadou Tidiane THIEELLO)
Ce qui se passe en Gambie est inédit, spectaculaire et historique. YahyaJammeh se dédit de la façonla plus éhontée sous les yeux du monde entier. Déjà que sa défaite est encore suspendue sur toutes les lèvres, le président gambien revient sur celle-ci. Jammeh est imprévisible !
Les gens se sont vitelaissés emporter par leurs sentiments en croyant que Jammeh allait céder le pouvoir si facilement. Les sursauts, l’euphorie et les « ouf » de soulagement ont connus la durée d’une rose. Si la défaite de Jammeh était prévisible selon certaines voies autorisées, force est d’admettre, que son « WakhWahèt » sans vergogne est plus qu’une surprise, il est un véritable coup de tonnerre.
Toutefois une lecture minutieuse de l’évolution de la situation postélectorale en Gambie présageait une pareille duperie, notamment le refus de Jammeh de rencontrer le nouveau président Adama Barrow dans le cadre d’échanges, le non accès de ce dernier aux médias officiels de la Gambie,le refus de sortie à Jammeh du territoire gambien, entre autres «alertes» signifiants.
En outre, couper un cordon ombilical de 22ans n’est pas chose aisée.Jammeh a su tissé des relations fortes avec l’armée et les autres composantes complices. L’urgence autour de laquelle il fallait consacrer toutes les forces et les énergies, c’était comment faire pour que s’opère la transition du POUVOIR entre Jammeh et Barrow. Mais les acteurs internes et externes c’est-à-dire les Etats ont trop fait confiance à la déclaration officielle du dictateur reconnaissant sa défaite et félicitant son adversaire. Hélas, comme pour dire qu’en politique, la bonne foi est un mythe, une utopie et que les déclarations n’engagent qu’à ceux qui y croient.
Adama Barrow est élu mais ne dispose pas du véritable pouvoir, manifestement celui-ci se trouve essentiellement entre les mains de Jammeh. Le fait qu’il n’y aitpas eu aussi d’anticipation sur les mécanismes à procéder pour que s’effectue le plus rapidement possible une entente franche entre Barrow et Jammeh avant la fameuse passation de service, renseigne quoique relativement sur la défaite inattendue de ce dernier.
Pourquoi ce revirement ?
YahyaJammeh a sûrement reçu des pressions internes doublée de sa volonté personnelle pour confisquer le pouvoir. Il est conscient que tôt ou tard, il sera traduit que ce soit devant la justice nationale ou internationale, surtout que le président Barrow a réitéré récemment qu’il n’a jamais dit que Jammeh ne serait pas poursuivi par la justice. N’est-ce pas par peur et par crainte de se voir ses amis et lui traqués et trainés par les juridictions que Jammeh s’est « ré intronisé » si brusquement ?  A cela s’ajoute les nombreuses sorties de beaucoup de défenseurs et d’activistes des droits de l’homme qui demandaient voire soutenaient avec rigueur et fermeté son jugement. Paradoxalement, la leçon qu’on peut en tirer est qu’il ne faut jamais menacer un dictateur aussi coriace avant la passation de service, du moins avant qu’il ne cède toute parcelle si petite de pouvoir soit-elle !
Aujourd’hui, c’est le peuple gambien tout entier qui doit prendre sa responsabilité, en l’occurrence la jeunesse. Ce peuple est en train d’assister une situation inédite de son histoire politique, laquelle va nécessairement impacter sur l’avenir politique de la Gambie. Ce peuple ne doit attendre de qui que ce soit une quelconque aide ou intervention. Le respect de la volonté populaire est un impératif. Quand le peuple s’exprime,  surtout si l’occasion ne l’est pas toujours donnée, il faut se plier à sa décision. Cette énième forfaiture de Jammeh n’est que la goutte d’eau qui va faire déborder le vase.
Par ailleurs, l’Union Africaine, les Organisations non gouvernementales, la société civile, le Sénégal ne doivent pas rester indifférents face à cette crisespectaculaire que vit la Gambie. Il faut agir et vite !
La position sans équivoque de l’Etat du Sénégal, dont la teneur est la suivante, est à saluer.  
"Le Sénégal rejette et condamne fermement cette déclaration", selon un communiqué de son ministre des Affaires étrangères MankeurNdiaye. Il "exige que le président sortant respecte sans condition le choix démocratique librement exprimé par le peuple gambien, qu'il organise la transmission pacifique du pouvoir et qu'il assure la sécurité et l'intégrité physique du président nouvellement élu".
Bref,des pratiques de ce genre ne font que ternir l’image de l’Afrique et sont à l’origine des considérations du genre qu’ « elle n’est pas encore entrée dans l’histoire !» 
 
Amadou Tidiane THIEELLO
thiellotidjane@gmail.com
Science PO Sanar/ Université Gaston Berger de Saint-Louis.
Samedi 10 Décembre 2016




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