Vues croisées du Fmi et de la Banque mondiale sur le surendettement du Sénégal : La réélection de Macky Sall est-elle à ce prix ?


Il y a une juxtaposition des vues des jumeaux de Bretton Woods sur la tendance gravement haussière de la dette de l’Etat du Sénégal.
Pas plus tard qu’hier, le Fonds monétaire international (Fmi), à la suite d’une mission de revue dirigée par M.Ali Mansoor, a alerté sur l’augmentation de ladite dette. « Le service de la dette qui était de 24% des recettes en 2014, pourrait atteindre 30% en 2017 », fait remarquer l’institution, un chouia alarmiste, ; qui milite, entre autres mesures, pour la réduction des projets d’investissement financés sur ressources propres qui n’ont pas été évaluées par la banque intégrée de projets et une stricte limitation des financements nets du Trésor aux opérations budgétaires de l’année en cours.  
Pas plus tard qu’au mois d’avril 2017, la Banque mondiale, en marge du lancement du rapport d’Africa’s Pulse, avait attiré l’attention des autorités sénégalaises sur les dangers liés à un tel endettement gonflé par le lancement de projets pharaoniques dans le cadre du Plan Sénégal Émergent. « La dette du Sénégal est soutenable, mais il y a des nuances. Elle ne met pas en danger la stabilité du cadre macro-économique, mais elle coûte cher », avait, dans un langage diplomatiquement codé, déclaré Julio Ricardo Loayza, économiste principal de la Bm.
De son côté, l’Etat se base sur le rehaussement de la notation du crédit souverain du Sénégal par les agences spécialisées pour relativiser la portée de son surendettement. Une certitude s’impose : ce niveau d’endettement dépasse ceux de la Côte d’Ivoire, du Mali ou encore du Burkina Faso.  
Qui plus est, la structure de cette dette, qui est à 10 % des revenus de l’Etat, est telle qu’une augmentation de la valeur du dollar va avoir de graves répercussions sur les capacités du Sénégal à s’acquitter de ses obligations vis-à-vis des institutions financières.   
Il s’y ajoute qu’avec un Programme triennal d’investissements publics (Ptip) 2017-2019 facturé à 4.791, 787 milliards de F Cfa, soit une hausse de 925, 714 milliards de f Cfa comparativement au précédent et comprenant 722 projets et programmes, les services du ministre Amadou Bâ vont devoir beaucoup emprunter.
Même si, dans un passé récent, le ministre Mansour Elimane kane a battu en brèche le jugement de la directrice des opérations de la Banque mondiale Louis Cord à propos de l’opportunité de Train express régional, le coût de projets infrastructurels comme l’autoroute Ila Touba est jugé exorbitant par une certaine opposition qui croit savoir que Macky Sall accélère ainsi la cadence dans le seul but d’avoir un bilan à présenter aux Sénégalais au moment de solliciter une réélection en 2019. Pour mémoire, sous Wade, le Sénégal qui avait bénéficié de l’Initiative d’allègement de la dette multilatérale en faveur des Pays pauvres très endettés (Ppte) a vu son taux d’endettement grimper dangereusement de 20 % en 2006 à près de 43 % en 2012. Des initiatives, à haute teneur politique et sociale, comme le Plan Takal étaient à ce prix.
C’est dire, pour conclure, qu’il urge de poser ce débat afférent à la dette en des termes moins diplomatiques que ceux qu’utilisent le Fmi et la Banque mondiale, afin que les Sénégalais sachent de quoi retourne véritablement tout ce jargon hermétiquement fermé et auquel les profanes n’ont pas accès.
Mercredi 20 Septembre 2017




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