Tu permets Thierno…


Tu me permets, Thierno, de t’interpeller par voie épistolaire au nom de notre désormais ex compagnonnage politique autour des valeurs qui ont toujours structuré mon engagement.

Je concède et assume avant tout que nous avons une relation solide empreinte d’estime reciproque et de bienveillance. Je vois déjà les relations qu’entretenaient nos deux mères qui ont fait le pari solide d’être ensemble à la vie et à la mort.  Elles ont choisi l’expression la plus pure de la liberté, celle de sceller leur amitié jusqu’à la mort de l’une d'elle ( la mienne ). La liberté de nous séparer et d’être en opposition ( même politique)  nous était  dès lors interdite. Mais hélas......


Cette exigence de fraternité que nous avons héritée de leur relation, je l’ai nourrie. Je l’ai poncée, polie, aiguisée et conservée pour toujours en souvenir à ma défunte mère. Tu en as fait autant. 

Mais à la vérité grand frère  je dois aujourd’hui te dire que ta dernière sortie m’a beaucoup interpellé sur la vanité des hommes et des choses. Finalement à quel frère me fier. Celui qui défendait becs et ongles Macky Sall contre l’opposition et qui jetait  l’anathème sur Idrissa Seck ? Celui qui fait aujourd’hui des appels de pied à Idrissa Seck  et qui appelle à une révolte dans les urnes contre Macky Sall ? 

Hier encore, tu t’empressais d’aller défendre dans les plateaux de télévision et dans les meetings la conviction que Macky Sall était le seul à disposer, avec le Plan Sénégal Emergent d’un projet moral et social bienveillant pour notre pays, équilibré, progressiste et optimiste contrairement à un discours politique de Idrissa Seck confus, déboussolé et taraudé par le désir de pouvoir

Entre l’homme politique déterminé d’hier obsédé par l’idée que l’opposition pouvait conduire notre pays dans un chaos irrémédiable et le  néo opposant  aux propos excessifs , rien dans le parcours ne laisse apparaître un minimum de cohérence, de lisibilité et de stabilité. Je ne souhaiterais pas te voir grossir les rangs  des marchands de sable de notre pays car ces derniers  sont condamnés à la ruine au moindre coup de vent

Je te laisse cependant l’excuse que la période que nous traversons dans notre pays est propice à tous les excès  et  à ce titre les aventuriers explorent les discours anxiogènes en faisant appel aux pulsions populistes et prétendument moralistes.

Dans ton discours  de rupture intervenu à seulement quelques jours du scrutin législatif, tu invites les Thiessois à structurer leur comportement électoral autour des valeurs en jetant l’anathème sur Macky Sall et son régime accusé de vouloir instrumentaliser le vote par un achat de conscience massif et dévalorisant.

La question ne se trouve pas là puisqu’elle est sans enjeu pour des Thiessois politiquement murs et jusque là irréprochables dans leur comportement électoral. Se poser déjà la question sur ce que les Thiessois feront dimanche prochain face à ce que tu appelles un achat de conscience est déjà une insulte. Quel que soit le résultat sorti des urnes, les Thiessois ne se renieront pas le 30 juillet. Ils ont toujours été fidèles et droits dans leurs bottes. On ne peut pas en dire autant pour tout le monde.

Quant à nous, nous avons choisi l’audace de la liberté, l’exigence de l’égalité, la volonté de la fraternité dans le compagnonnage. Comme tu le vois, nous avons choisi l’espoir et l’esprit de la conquête pour un Président rassurant. 

Durant cinq ans, il a fait de son mieux pour apaiser, tranquilliser, rassurer, soulager. A son crédit, contrairement à ce que tu dis, il a refusé jusqu'au bout de porter le masque du monarque. Il est resté droit dans ses bottes, sans jamais céder aux sirènes de l’autoritarisme.

Donc tu parles d'un autre homme et  d'un autre régime mais pas de cet homme aux valeurs et vertus que tu as tant vantés et  qui incarne ce système que nous avons ensemble mis en place au prix de sacrifices et d'efforts communs.
Cher frère, Demain c'est déjà aujourd'hui

 

Maodo Malick Mbaye

Lundi 7 Août 2017




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