Transrail : L’histoire d’un pillage organisé

Des documents juridiques, faisant suite à des rapports d’audit, montrent comme les Canadiens - et non le repreneur Advens - ont pillé Transrail.


Transrail : L’histoire d’un pillage organisé
Les travailleurs de Transrail doivent s'attendre au pire. Il est fort probable qu’ils ne soient pas payés à la fin du mois. 
En cause : les banques et les fournisseurs ne savent plus à qui s’adresser, à cause des cafouillages nés depuis que les deux Etats -Sénégal et Mali - ont décidé d’éjecter sans raison le groupe Advens qui a pris le contrôle de la majorité du capital depuis 2007. Advens est accusé de tous les noms d’oiseaux. Or, Libération a pris connaissance de documents judiciaires qui attestent que Transrail a été pillée par le groupe Canadien Canac Inc dont les dirigeants ont été lourdement condamnés au Mali, en première instance et en appel. Des investigations menées par le Cabinet Deloitte, à la suite du départ des Canadiens, ont mis en exergue des faits de délinquance avérés entre octobre 2003 et avril 2007. 
Alors qu’ils n’avaient investi que la modique somme de 2,5 milliards de F Cfa, les Canadiens ont fait main basse sur 1,5 milliards de F Cfa, dés le premier trimestre suivant leur arrivée dans le capital. Ensuite, le même montant été détourné tous les ans sur la base d’une convention d’assistance technique et un contrat d e sous-traitance conclu respectivement entre Transrail, Canac Sénégal et Canac Inc, le 15 octobre 2003 et le 4 janvier 2005. Comme l’a souligné le rapport du Commissaire aux comptes, en date du 21 mai 2007 concernant l’exercice social clos le 31 décembre 2006, ces conventions n’ont jamais été soumises au Conseil d’administration qui en a pris connaissance à la suite du re- trait des Canadiens. 
Selon l’audit du cabinet Deloitte, Transrail a ainsi supporté dans le cadre de ses conventions et contre l’intérêt social la somme de 5,07 milliards de F Cfa, ce qui a largement contribué à ses pertes financières. C’est fort de tout cela que le tribunal de Bamako, saisi par plainte, a condamné Canac à rembourser à Transrail les sommes détournées à savoir 3 milliards de F Cfa en règlement de compte et 800 millions à titre de dommages et intérêts. Une autre décision de justice condamne Canac à verser un paiement supplémentaire de 2,7 milliards de F Cfa à Transrail. 
C’est dire, qu’aujourd’hui, Transrail court derrière plus de 5 milliards de F Cfa et, pour permettre l’exécution de ces décisions, la Justice malienne a lancé un mandat d’arrêt contre les anciens dirigeants de Canac. Cette ardoise, qui peine à être recouvrée, a sérieusement fragilisé la boîte qui a été  «achevé » par le non respect des engagements pris par les Etats maliens et sénégalais. 
En effet, la Banque africaine de développement (Boad) s’était engagée en 2009 à renflouer les caisses de Transrail dans le cadre d’un plan d’amélioration des infrastructures du chemin de fer. Montant annoncé : 40 milliards de F Cfa. Les Etats devaient, pour permettre le décaissement de cette manne financière, signer un protocole qui modifierait la concession, en séparant l’exploitation des infrastructures. Ce protocole n’a jamais été signé et la Boad a finalement croisé les doigts. «Le problème est que personne ne sait ce que veulent les Etats. Quand le Mali veut ça, le Sénégal veut autre chose et vice- versa. 
Maintenant, le bouc émissaire devient Advens qui n’a jamais gagné de l’argent dans cette affaire, là où les Canadiens pompaient tranquillement les caisses sans être inquiété », confesse un officiel établi à Bamako. Aujourd’hui, les Etats demandent à Advens de quitter le capital de Transrail sans même le dédommager. Une violation manifeste de la loi sur les investissements privés qui ne repose sur aucune base juridique. 
 
Lundi 30 Mars 2015




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