« Sénégal : ce discret succès africain »


 
Alors que les pays en crise ne cessent de faire la « une » de l’actualité, ceux qui enregistrent de francs succès passent généralement sous les radars médiatiques. Le Sénégal fait aujourd’hui partie de cette seconde catégorie qu’il serait utile – pour sortir des sempiternels sentiers battus africains – de replacer sous les feux des projecteurs.
 
Porté par une croissance de 6,5% en 2015 et des projections estimées par le FMI à 6,6% en 2016 puis 6,8% en 2017, le succès sénégalais est d’abord économique. En l’espace de quelques années, le pays de la Teranga est ainsi devenu une véritable locomotive dans la sous-région et sur l’ensemble du continent. Une mue d’autant plus remarquable qu’elle succède à un long cycle de croissance atone. Tirée par des exportations en plein boom, dopée par la filière agricole auxquelles se conjuguent une forte hausse de la consommation intérieure et de l’investissement, cette embellie a permis à l’exécutif de combiner de front politique budgétaire expansionniste et politique sociale volontariste, et ce sans pour autant grever les comptes publics. Autrement dit, si la dette sénégalaise a progressé à un rythme relativement élevé ces dernières années, le déficit budgétaire s’est quant à lui fortement contracté.
 
Une configuration favorable qui a permis au président Macky Sall de tenir ses promesses de campagne sur le front social. En effet, celui qui a labouré les terres du Sénégal avant de remporter l’élection présidentielle de 2012 – quitte parfois à loger chez l’habitant dans les villages les plus reculés – s’est forgé la conviction qu’à sa politique de relance de l’économie devait impérativement se mêler un choc sur le plan social afin de prendre (enfin !) à bras-le-corps la lutte contre la pauvreté. Une fois élu, le nouveau président du Sénégal a, ce faisant, lancé deux programmes totalement inédits en Afrique : la couverture médicale universelle ainsi qu’une myriade de bourses dites de « sécurité familiale ». Le premier offre la possibilité aux Sénégalais les plus démunis de bénéficier de la gratuité des soins et ambitionne de procurer une protection sociale à 75% de la population à l’horizon 2017, tandis que le second propose des bourses trimestrielles de 38 euros aux foyers les moins favorisés. Objectifs affichés par l’exécutif : sortir près de trois millions de personnes de l’extrême pauvreté d’ici deux ans. Un dispositif qui a notamment fait ses preuves au Brésil et, bien qu’il soit encore trop tôt pour en mesurer l’efficacité au Sénégal, fait de la deuxième économique d’Afrique de l’Ouest un pionnier en la matière sur le continent. Ces différentes mesures s’inscrivent dans le cadre du Plan Sénégal Émergent (PSE) ; l’alpha et l’oméga de la politique de Macky Sall qui mobilise – de la santé, au tourisme en passant par l’enseignement supérieur – toutes les forces vives. Reposant sur le tryptique « croissance inclusive, développement humain et bonne gouvernance », le PSE – pensé sur vingt ans par ses artisans – aspire à hisser le Sénégal parmi les pays émergents en 2035.
 
L’autre versant du « succès sénégalais » est quant à lui politique. Les vives tensions qui avaient émaillé l’élection présidentielle de 2012 ont depuis lors été rayées comme un trait de plume, permettant au Sénégal de retrouver la stabilité qui l’avait jusqu’alors caractérisé. Toujours sur le front intérieur, le nouveau chef de l’État s’est attaché à rompre avec les méthodes de son prédécesseur concernant l’épineux dossier de la Casamance, serpent de mer de la vie politique sénégalaise. En engageant un troisième acte de décentralisation, il a créé – sur une étroite ligne de crête – une nouvelle collectivité casamançaise plus consensuelle qui disposera d’un exécutif local et, de facto, de plus d’autonomie.
 
Un sens de la diplomatie que Macky Sall a également su manier à l’extérieur des frontières. Fruit d’une politique étrangère active, Dakar a été désigné membre non-permanent du Conseil de sécurité des Nations unies pour la période 2016-2017 ainsi que membre du Conseil exécutif de l’UNESCO. Des satisfécits onusiens qui viennent récompenser l’implication tant diplomatique que militaire du Sénégal dans la résolution des conflits continentaux : MINUSMA au Mali, MONUSCO en République démocratique du Congo ou encore ECOMIB en Guinée-Bissau.
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Enfin, pays multiconfessionnel à majorité musulmane, situé aux portes du Sahel, le Sénégal fait lui aussi face à la montée de la menace terroriste. Conscient de ce risque qui a déjà frappé ses voisins, il organise chaque année, depuis 2014, un Forum international sur la paix et la sécurité en Afrique. Les autorités sénégalaises ont quant à elles arrêté, fin 2015, une trentaine de prêcheurs islamistes radicaux ; un coup de tonnerre dans un pays réputé pour son islam tolérant.
 
Alors que Macky Sall entame sa visite d’État en France le 19 décembre prochain, force est de saluer les succès enregistrés par le Sénégal ces dernières années. Bien que de nombreux chantiers restent à engager – en matière d’électrification des foyers et de chômage des jeunes notamment – le pays de Senghor a retrouvé l’aura dont il bénéficiait du temps de son père fondateur. Un succès discret, amplement mérité.
 
 
Erwan DAVOUX
Candidat Les Républicains pour les élections législatives dans la 9ème circonscription des Français établis hors de France (Maghreb et Afrique de l’Ouest)
 
Samedi 17 Décembre 2016




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