Qui d’Abdoulaye Wade ou de Macky Sall va gagner ? (Par Cheikh Yérim Seck)


Qui d’Abdoulaye Wade ou de Macky Sall va gagner ? (Par Cheikh Yérim Seck)
DAKARACTU.COM Le second tour de l’élection présidentielle est lancé et, à neuf jours de la date fatidique de son issue, nul ne peut dire avec certitude qui d’Abdoulaye Wade ou de Macky Sall va l’emporter. C’est l’élection la plus incertaine de l’histoire de notre République. Et la plus intéressante, car elle arrive au moment où une alternance générationnelle est esquissée et par les électeurs et par les hommes politiques eux-mêmes. Le premier tour a été disputé et a livré ses résultats surprenants qui ont mis en tête de course le président sortant Abdoulaye Wade, suivi de son ancien Premier ministre Macky Sall qui, depuis qu’il l’avait quitté, a sillonné le pays entier et patiemment tracé son destin. Au fur et à mesure qu’approche la date du 25 mars et que la campagne se déroule, apportant chaque jour son lot d’évènements politiques, ses revirements, ses violences, ses outrances et ses outrages parfois, le flou s’épaissit sur la perception qu’on peut avoir du déroulement du scrutin et évidemment de son issue. Chacun des deux candidats peut gagner cette élection, qui se jouera au couteau. Chacun d’entre eux a des atouts à faire valoir pour être le futur président du Sénégal. La prudence des états-majors des deux camps est à cet égard révélatrice : point de fanfaronnades ne viennent l’entacher !
Macky Sall est le challenger. Il a créé autour de lui et de sa candidature une sorte d’unanimité de la classe politique opposée au parti libéral de Wade, et de la société civile dans son ensemble. Dans ce contexte où les simples projections mathématiques lui accordent un stock de 65% des suffrages si on totalise les voix obtenues par les candidats battus au premier tour et qui ont tous, sans exception, rejoint sa nouvelle coalition Bennoo Bokk Yakkar, il peut profiter de cette dynamique entraînante qui, dans un climat de deuxième tour, joue toujours en faveur du candidat arrivé en second derrière le sortant. Une autre donnée peut jouer en sa faveur, c’est l’usure du pouvoir qui frappe Abdoulaye Wade, affaibli par un entourage qui ne s’est pas toujours montré sous son plus bel atour à la faveur de quelques faits scandaleux aux yeux de l’opinion publique. Macky Sall peut aussi profiter de ce doute qui subsiste, malgré les atermoiements du camp Wade, sur ce que le président va faire du pouvoir qui lui serait à nouveau confié, soupçonné qu’il est de vouloir le donner à son fils Karim Wade. L’argument de la dévolution monarchique du pouvoir continue à prospérer et est brandi comme un épouvantail pour persuader les Sénégalais qui hésiteraient encore à sanctionner Wade. Et quand le président sortant, voulant convaincre les électeurs qui pensent que 19 ans c’est beaucoup de temps, se met à brandir la promesse qu’au bout de trois années de mandat il passera la main, cela fait effet contraire chez ceux qui pensent que des élections dans encore trois ans plongeraient le Sénégal dans un cycle infernal et peu propice à notre développement économique qui en a déjà pris un sacré coup ces dernières années du fait de cette permanence de la politique dans notre vie nationale. Ensuite, et ce n’est pas le moindre des atouts de Macky Sall, il s’est taillé une réputation de bosseur, d’un homme calme, poli et pondéré, peu affairiste, emportant même l’adhésion de ceux et celles qui désirent voir enfin au palais de la République une première dame sénégalaise bon teint et, comme on les aime, assumant leur « driankéité » de bon aloi. Enfin, Macky Sall peut capitaliser cette dynamique de l’unité qui s’est faite autour de sa personne, avec cette image de président consensuel qui n’exclut personne et se dit prêt à travailler avec toutes les compétences, quelles que soient les obédiences idéologiques qui les meuvent et abritent leurs convictions politiques. D’autant qu’il a été légitimé par ceux qui ont mené ces Assises nationales qui servent aujourd’hui de viatique, pour ne pas dire de bible de notre espace politique. La présence à ses côtés de Moustapha Niasse, d’Amath Dansokho et d’Amadou Mahtar Mbow a donné à l’homme une sorte de garantie d’homme politique bien entouré et apte pour mener à bien sa mission présidentielle. Rajoutez-y la présence de Youssou Ndour pour galvaniser tout cela, et vous aurez le plus bel aréopage qui puisse porter un candidat à la victoire.

Le président Wade ne manque pas d’atouts non plus pour renouveler son bail au palais de l’avenue-Léopold-Sédar-Senghor. Ils sont même solides. D’abord, il est en position de pouvoir et les Sénégalais sont demeurés très légitimistes, mus par une singulière tendance à donner la prime au sortant. D’autant que, dans nos pays africains, l’argent constitue une « arme de dissuasion massive » pour ceux qui seraient tentés par la maison apériste, et une arme d’attraction déterminante pour d’éventuels transhumants qui ménagent leurs vieux jours de politiciens, conscients que la donne citoyenne a changé et que les choses ne seront plus tout à fait comme avant. Et Dieu seul sait que de l’argent Abdoulaye Wade en a plus que tout le monde. Wade a ensuite su élargir l’assise populaire de son régime, en cooptant des hommes d’influence religieuse comme Cheikh Béthio Thioune ou Cheikh Ndigueul Fall qui lui garantissent le vote des « thiantacounes » et des Baye Fall, représentant un nombre assez important de fidèles passionnés et obéissants, voire soumis aux souhaits de leurs guides. Il exploite à fond la fibre mouride à laquelle tout le monde n’est pas insensible même si le « ndigueul » est relativement passé de mode.

Politiquement, Wade a des hommes solides autour de lui et qui lui sont restés d’une indéfectible fidélité, lesquels pour ne rien gâter sont dans leurs bastions électoraux et leurs fiefs politiques des sortes de parrains et de patriarches bienfaiteurs, comme Pape Diop, insubmersible et inoxydable compagnon de la première heure, comme Souleymane Ndéné Ndiaye, son actuel Premier ministre, Abdoulaye Baldé, maître de la Casamance, Moustapha Guirassy, prophète en son pays Kédougou, Oumar Sarr à Dagana, ou encore des hommes comme Thierno Lô et Modou Diagne Fada qui contrôlent le bassin électoral mouride pour le bénéfice de leur mentor et maître, Abdoulaye Wade. Ce dernier n’a pas dit son dernier mot en ce qui concerne la région de Thiès où il est en train de tailler des croupières à l’ancien maître incontesté des lieux, Idrissa Seck. Il décime ses bases à coup de mallettes, taille sec dans le pouvoir communal en débauchant à son profit 35 conseillers municipaux, emportant dans ses listes de soutiens de la 25° heure deux maires de communes d’arrondissement sur trois, finissant par là-même par vampiriser le réservoir électoral de son ancien sherpa devenu ensuite son Premier ministre, avant de finir tous deux irréductibles adversaires et néanmoins adeptes freudiens du « je t’aime moi non plus ». Abdoulaye Wade bénéficie d’un atout autre et non négligeable, qui est son expérience présidentielle et politique qui le fait sortir des situations les plus inextricables et les plus dangereuses. Sa réputation de Ndiombor, rusé, le rend somme toute sympathique dans un pays où l’on aime bien les joueurs audacieux et qui risquent avec panache, et bluffent avec malice. Homo sénégalensis, ça ne se refait pas. On a vu Wade au pouvoir et pas Macky Sall, ça va faire hésiter plus d’un électeur, et nombre d’entre eux ne reprochent pas grand-chose au « Vieux », mais seulement de vouloir rester au-delà du délai légal, au détriment d’une sortie de grand homme, et de grand président dont personne ne conteste qu’il a posé des actes qui lui confèrent un bon bilan, surtout dans le domaine d’infrastructures qui ont métamorphosé Dakar et bien des endroits du Sénégal. La carte de Wade, c’est son bilan.

Tous les deux candidats au second tour ont donc leur carte à jouer, dans une élection qui sera un tout autre scrutin et pas seulement un simple deuxième tour, pour lequel seules des projections arithmétiques suffiront à faire un scrutin clair. Des incertitudes tenaces sont liées au nombre important d’abstentionnistes qui vont voter au second tour et participer à une véritable et extraordinaire redistribution des cartes. Cela, Macky Sall l’a bien compris, qui évite de faire montre de tout triomphalisme et persuade en permanence ses partisans que rien, alors rien, n’est encore joué et que la plus extrême vigilance s’impose à eux. Quoiqu’il arrive le 25 mars au soir, à défaut d’avoir un nouveau président, le Sénégal aura ce soir-là installé une nouvelle sorte de présidence. Quel que soit le vainqueur du scrutin le plus incertain et le plus excitant de notre Histoire.

Samedi 17 Mars 2012



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8.Posté par you le 17/03/2012 10:24
sans oublier que la candidature de Wade reste ILLEGITIME!

7.Posté par dioufy le 17/03/2012 10:07
CYS , nous t'aimons bien mais arrête de nous prendre pour des demeurés. Que fais tu des 68 % des Sénégalais qui ont voté contre Wade ? Tu crois que ces gens là sont en manque de bons sens. Ils ont voté contre un régime, contre des pratiques,contre un homme au 1er tour, et tu veux nous faire croire que le 25 mars INCH ALLAH, ces mêmes SN dans leur majorité feront du Wax Wakhet.
Wade c fini.Diouf etait beaucoup plus un mythe en 2000, avait 41% des voix et n'empêche il a été balayé au 2éme tour.
Comment peux tu expliquer que Wade en 2007 avait 1 800 000 voix , en 2009 1 100 000 et en 2012 900 000 voix ?
Wade est une créature constitutionnelle que nous avons créee de toute piéce au soir du 19 mars 2000 et pas le contraire.Nous avons souvent tirer la sonnette d'alarme mais des gens de votre race en ont toujours fait une autre lecture, et c votre probléme mais sachez que ce pays nous appartient.
Il ne nous sera pas bien difficile de le foutre dehors au soir 25 mars 2012 INCH ALLAH.
Wait and see

6.Posté par Samouraï le 17/03/2012 10:06
En termes de légitimité, comme ils sont arrivés au second tour parmi quatorze, tous les deux en ont ; même les animateurs du Wakh sa khalat (Ibra Ndiaye, Guorgui thi Yoff, Ayoba Lo…) ont évolué dans leurs positions en priant pour que gagne le meilleur pour le Sénégal et en priant pour la paix, tout en affirmant leurs penchants pour Wade. Les marabouts qui se disent neutres ont également légitimé Macky. Seuls quelques « propagandistes » du FAL (Papa Diop, Mamadou Lamine Kéita…) tentent de vendre l’image d’un Macky immature alors qu’ils ont longtemps été sous ses ordres et ont en vain tenté de freiné son ascension politique !
Pour ceux qui est de l’argent à distribuer, il ne touche qu’une infime minorité même au sein du PDS où il constitue une arme de destruction massive qui décime les rangs : l’effet a été contreproductif et il paraît que Wade vient de stopper la distribution automatique de billets. L’auteur de l’article ne sait pas qu’il ne s’agit pas de quantité d’argent mais d’équité et de ciblage dans la répartition. L’argent a plutôt décrébilisé les partisans de Wade. Rien ne garantit que ceux qui prennent cet argent vont voter pour Wade. La plupart des marabouts souteneurs n’ont même pas de cartes d’électeurs ou ne se déplaceront pas le jour du vote !
Cheikh Béthio et dans une moindre mesure Cheikh Ndigël (qui n’est pas Khalif général des baye Fall !) ont permis à d’autres forces religieuses de se précipiter dans le camp de Macky. Le discours et les actes posés par Béthio repoussent la plupart des mourides, les autres familles religieuses dont les chrétiens et les citoyens sénégalais. En mobilisant ses talibés dans des manifestations, Béthio montre les limites réelles de ses capacités face à l’opposition.
Parler de dignitaires PDS solides en étalant des noms sans évaluer leurs poids réels ou faire la comparaison avec les « noms » de la coalition adverse ne fait que nous divertir. L’oppositon compte plus de talents et de personnalités si l’on s’en arrête aux références. Ce qui intéresse c’est là où Wade avait plus de 50% comme à Dagana, Oussouye etc. Et dans ces zones les choses bougent comme on l’a vu à St Louis ! En réalité Wade ne compte que sur la masse qu’il sous évalue à tort : les marchands ambulants, les lutteurs, les talibés fanatiques…
L’image de Wade stratège rusé s’est depuis longtemps écorné avec ses échecs répétitifs dans ses projets politiques majeurs ( locales de 2009, 23 juin 2011, 1er tour du 26 février 2012…) Combien de fois il a changé de stratégie dans la campagne, différé des activités, est revenu sur d’autres ; s’est répété inlassablement dans ses discours… Pour nous qui l’avions adulé, Wade offre une image pitoyable dont il n’est pas prêt de se départir. Il est empêtré dans ses fausses illusions.
Si on parle politique (et non mystique), Wade n’a aucune chance de passer. Plus on s’approchera du 25 mars, plus les choses se clarifieront !

5.Posté par Anonyme le 17/03/2012 09:49
"plume...constructive" ?
Une analyse doit simplement être objective.

4.Posté par UN AMI le 17/03/2012 09:41
Mon cher Cheikh
J'ai passé un temps à te lire depuis que tu es chez JA. Il m'est arrivé meme de montrer ma fierte car tu etais senégalais tellement ta plume etait constructive et objective. Mais là mon ami , je m'inquiete car sans vous( toi et d'autres qui donnent espoir à ce continent) que fera l'afrique?Ressaisis toi mon journaliste préféré: Relis toi juste et comprendras :

"D’abord, il est en position de pouvoir et les Sénégalais sont demeurés très légitimistes, mus par une singulière tendance à donner la prime au sortant"
Tu etais où en 2000 ?
"D'autant qe, dans nos pays africains, l’argent constitue une « arme de dissuasion massive » pour ceux qui seraient tentés par la maison apériste, et une arme d’attraction déterminante pour d’éventuels transhumants qui ménagent leurs vieux jours de politiciens"
Mais où est ce qu'en Afrique dans ton background journalistique un president sortant a reussi à remporter un 2nd tour ?
Un ami et fan

3.Posté par Amadou le 17/03/2012 09:25
C'est une très bonne analyse. A priori, on ne peut pas dire qu'untel va gagner car les atouts et les faiblesses des candidats semblent s'équilibrer. Macky part avec un léger avantage qu'il lui faudra creuser pour obtenir un vote massif qui pourrait le prémunir. Wade de son côté a bien réagi dans l'ensemble depuis la publication des résultats du 1er tour. Mon opinion est que c'est la région de Dakar qui départagera les deux candidats. Que tout se fasse dans la paix ! C'est mon plus grand souhait. Bonne continuation CYS !

2.Posté par Mangus le 17/03/2012 09:19
VOTONS CONTRE ABLAYE LE CORRUPTEUR POUR ABREGER NOS SOUFFRANCES NOUS PAUVRES SENEGALAIS

VOTONS CONTRE ABLAYE LE CORRUPTEUR POUR ABREGER NOS SOUFFRANCES NOUS PAUVRES SENEGALAIS

VOTONS CONTRE ABLAYE LE CORRUPTEUR POUR ABREGER NOS SOUFFRANCES NOUS PAUVRES SENEGALAIS

1.Posté par Deug le 17/03/2012 07:56
Du n´importe quoi! Wade n´aura meme pas 20%

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