Page Facebook de Abdou Khadre LÔ : LE ROI DE LA CEDEAO


 
Il y a quelques semaines, le Maroc effectuait son retour dans l’Union africaine. Une organisation (à l’époque, l’Organisation de l’unité africaine, OUA) qu’il avait décidé de quitter le 12 novembre 1984. Entre temps, il s’est renfermé pendant 33 ans sur lui-même pour construire une économie devenue solide, structurée et capable de s’ouvrir sur le continent. A présent, le royaume chérifien demande, officiellement, à intégrer la Communauté économique des États d’Afrique de l'Ouest (CEDEAO) en tant que membre à part entière, après avoir bénéficié pendant longtemps d’un statut d’observateur.
Les autorités marocaines considèrent que cette adhésion serait le couronnement « des liens forts aux niveaux politique, humain, historique, religieux et économique avec les pays membres de la CEDEAO (…), renforcés aux cours des dernières années, à travers les 23 visites royales dans 11 pays de la région. »
Si rien dans les textes de la CEDEAO n’empêche une adhésion du Maroc, il serait important d’analyser froidement les enjeux d’un tel changement de paradigme.
Si la plupart de nos pays chantent et rêvent l’émergence, le Maroc est déjà une économie émergente, avec un PIB de 100,593 milliards USD (source World Data Indicators,  WDI-Banque Mondiale, 2016).
Avec une population de 33,01 millions d’habitants, le Maroc se lance donc logiquement à l’assaut de nouveaux marchés et celui de la CEDEAO, avec ses 330 millions d’habitants, est plus qu’intéressant pour le nouveau dragon. Il n’est pas difficile de constater que les entreprises marocaines s’y imposent de plus en plus, dans des secteurs clés tels que le BTP, les banques et les assurances. Elles sont suffisamment compétitives pour concurrencer les « historiques » françaises.
Avec son ambition économique clairement portée par une vision politique, le Maroc a tout à gagner d’une adhésion à la CEDEAO. Les barrières douanières levées et le TEC (tarif extérieur commun) seront de formidables outils pour son économie émergente. Qu’en sera t-il de nos économies/marchés? 12 des 15 membres de la CEDEAO sont des nains économiques avec des « very narrow markets ». Le Nigéria, la Côte d’Ivoire et le Ghana étant les locomotives. Globalement, la CEDEAO est plus une zone de consommation et d’importation que de production et d’exportation (exception faite pour les matières premières qui nous reviennent plus chères en produits finis).  
Bref, le Maroc a adossé sa demande d’intégration sur une expansion économique tout azimut accompagnée d’une offensive diplomatique et politique murement réfléchie.
Je ne dis pas que nous devrions rejeter sa demande de rejoindre la communauté. J’attire juste l’attention sur le fait que ce serait bien que nous réfléchissions également profondément sur les enjeux à moyen et très long termes d’une telle ouverture. Notre décision sera alors guidée par une stratégie murement pensée et non l’émotion ou la pression, fut-elle la plus « amicale ». Après tout, les Etats n’auraient pas d’amis mais uniquement des intérêts et les négociations sur les APE constituent un beau cas d’école.
 
Excellente semaine à tous,
 
Lundi 27 Février 2017




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