Ousmane Sonko comparé à Talla Sylla - Les réseaux sociaux font la différence d’une époque à l’autre


Les natifs des années 70 aux commandes : Matteo Renzi en Italie ; Emmanuel Macron en France ; Alexis Tsípras en Grèce…Pourquoi pas Ousmane Sonko au Sénégal ? L’ex-inspecteur des impôts et domaines, dépositaire de l’agenda de communication de l’opposition depuis quelque temps, s’est engouffré dans la brèche ouverte par la perspective de la mise à l’écart de Karim Wade et de Khalifa Sall. Ses détracteurs comme Ousmane Tanor Dieng le prennent pour « un aventurier » romantique ; pour ses fervents adeptes, il est le symbole d’une révolution qui s’opère, de l’ampleur de celle de Mai 68. Ce bouleversement donna naissance à des leaders comme Abdoulaye Bathily ou encore Mamadou Diop Decroix. Malheureusement pour cette génération, le contexte de « Parti unique de fait » et l’éclatement du bloc communiste local empêcheront l’avènement du Grand soir. Dans les années 80, la rigueur des temps que charrient les politiques d’ajustement structurel  aura une corrélation avec la crise universitaire et postélectorale de 1988. Quelques années plus tard, le Sénégal connaitra un quasi-monolithisme d’Etat avec la mise en place d’un Gouvernement de majorité présidentielle élargie à la faveur du dialogue entre Abdoulaye Wade et Abdou Diouf. L’actuel maire de Thiès et ses amis créent le Jëf Jële pour occuper le vide et seront servis par la mise en pièces de l’ogre socialiste consécutivement aux départs de Djibo Ka et de Moustapha Niasse (tous les deux ont été soutenus par Talla Sylla successivement en 1998 et en 2000). Jëfe Jële marque sa différence en 2000 en refusant d’intégrer le nouveau gouvernement. De cette année à 2003, les plus violentes attaques contre Wade portaient la signature de Talla, même si ce dernier n’avait obtenu que trois pelés et un tondu aux législatives de 2001. L’agression dont il a été victime le mettra dans la posture de David contre Goliath. Mais la crise au sommet de l’Etat entre l’alors chef de l’Etat et Idrissa Seck aura raison de son étoile. A la présidentielle de 2007, Talla Sylla se retrouve avec 0,53 des suffrages, presque les 30 mille voix et poussière de Sonko en 2017.

Est-ce à dire que le buzz médiatique est loin de la réalité du terrain dans un pays à fort taux d’analphabétisme et où les clivages obéissent à des normes métapolitiques (cas du PUR, 153 000 voix en 2017)? C’est sous ce rapport qu’il faille surveiller Ousmane Sonko. Celui-ci, à la différence de Talla Sylla, bénéficie de l’apport des réseaux sociaux qui ont fait des merveilles aux Etats-Unis durant ces dix dernières années. Mieux, le leader de PASTEF, accusé de crypto-salafiste, capitalise sur l’image d’un pilier de mosquée qui vient nettoyer les écuries d’Augias pour renverser l’ordre établi d’obédience occidentale. Cette vision messianique de l’action politique, qui n’a pas prospéré en Algérie dans les années 90, fait peur aux lobbies et à certains cercles maraboutiques.

C’est pour l’avoir compris que Sonko, en définitive, a initié une opération de charme en direction des familles religieuses pour espérer éviter le syndrome Mamadou Dia.
Mardi 16 Octobre 2018




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