Le second tour de l'élection présidentielle a débuté dimanche 21 décembre en Tunisie où près de 5,3 millions d'électeurs sont appelés à départager Béji Caïd Essebsi et Moncef Marzouki. Ce scrutin est la dernière étape de l'instauration d'un régime démocratique en Tunisie, quasiment quatre ans après le renversement de Zine El-Abidine Ben Ali. Au premier tour, le 23 novembre, M. Essebsi a obtenu 39,4 % des suffrages contre 33,4 % pour M. Marzouki, soit moins de 200 000 voix d'écart. La participation avait frôlé les 65 %.
Dans la nuit, l'armée tunisienne a tué un homme et en a arrêté trois autres qui avaient tenté d'attaquer des militaires gardant une école de la région de Kairouan, où était stocké du matériel électoral pour la présidentielle, selon le ministère de la défense. « Un groupe armé a essayé d'attaquer une unité (...). La vigilance des soldats et la rapidité de leur réaction a fait avorter cette opération et entraîné la mort d'un homme arm é d'un fusil de chasse et l'arrestation de trois suspects », a déclaré un porte-parole du ministère.
Essebsi, l'ancien du RCD
Agé de 88 ans, Béji Caïd Essebsi a été ministre d'Habib Bourguiba, qui a pris les rênes du pays en 1957 après l'indépendance négociée avec la France et les a conservées pendant trente ans. Son parti laïque, Nidaa Tounès, est arrivé en tête des élections législatives du mois d'octobre. Ses adversaires l'accusent d'être une figure des régimes autocratiques du passé et voient dans sa candidature le risque d'un retour à l'« hégémonie d'un parti unique ».
Il doit surtout gommer le souvenir de son engagement dans le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) de Ben Ali après le coup d'Etat de novembre 1987 et son passage à la présidence de la Chambre des députés en 1990 et 1991. Après cela, il s'était retiré de la vie politique.
« Essebsi n'est pas un démocrate. Il ne sait pas ce qu'est la démocratie », a affirmé Moncef Marzouki lors de la campagne de l'entre-deux-tours. Mettant en avant son statut d'homme d'Etat expérimenté, M. Essebsi se dit pour sa part le mieux à même de « rendre son prestige » à la Tunisie.
Pas de consigne de vote des islamistes
A l'inverse, M. Marzouki, 69 ans, se voit reprocher son alliance avec les islamistes d'Ennahda qui lui a permis d'être élu président de transition il y a trois ans. Ancien opposant au régime de Ben Ali, exilé plusieurs années en France, il se présente lui comme le protecteur de la « révolution de jasmin » qui a déclenché le cycle des « printemps arabes ».
Le parti Ennahda, deuxième des législatives, avait choisi de ne pas présenter de candidat à la présidentielle et n'a donné aucune consigne de vote, mais le camp Essebsi affirme que Moncef Marzouki a fait le plein des voix islamistes.
Depuis sa révolution de 2011, la Tunisie s'est toutefois distinguée par son souci du compromis, contrairement à la Libye ou à l'Egypte, où le renversement de dirigeants autocratiques a ouvert des périodes de confrontations violentes et de chaos.
Lire (édition abonnés) : En Tunisie, une élection à l’ombre de la révolution
Avant l'élection du Parlement en octobre, la Tunisie s'est dotée en janvier d'une nouvelle constitution garantissant notamment la liberté de culte et l'égalité des sexes. Ce texte a été salué par les pays occidentaux comme un modèle pour l'instauration d'un régime démocratique et respectueux des droits de l'homme. Il n'accorde que des pouvoirs limités au chef de l'Etat, notamment dans les domaines de la défense et des affaires étrangères. Le cœur du futur pouvoir devrait se trouver au Parlement.
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