Le Port de Dakar, de la dynamique de l'érection d'un quai fruitier, à l'impulsion de l'exportation des produits agricoles


Le Port de Dakar, de la dynamique de l'érection d'un quai fruitier, à l'impulsion de l'exportation des produits agricoles
« Le Port de Dakar, de la dynamique de l’érection d’un quai fruitier, à l’impulsion de l’exportation des produits agricoles » 
N’est ce pas que les ports constituent des espaces où des entités à caractère industriel et commercial développent leurs activités en vue de créer des richesses ! 

Ainsi, en paraphrasant l’autre : « La terre est la source ou la matière d’où l’on tire la richesse ; le travail de l’homme est la forme qui la produit ; et la richesse en elle-même n’est autre chose que la nourriture, les commodités et les agréments de la vie » 
(Richard Cantillon) 
Ici, le concept de richesse doit être appréhendé sous deux angles 

- Sous l’angle macroéconomique, il s’agit pour les pouvoirs publics d’élaborer des stratégies et des politiques pour une gestion efficiente du secteur agricole au bénéfice des populations 

- Sous l’approche de l’entreprise portuaire, la réponse réside dans le système managérial et stratégique décliné par la direction générale afin de rendre l’outil portuaire plus compétitif. 
Ces trente dernières années, le volume des échanges commerciaux entre les continents a considérablement augmenté. La voie maritime reste le mode de transport le plus usité, avec plus de sept ( 7) milliards de tonnes de marchandises acheminées en 2012 ; entrainant des mutations dans la configuration physique des ports. A certains égards, les espaces géographiques portuaires sont devenus de véritables plateformes logistiques, matérialisées par la construction d’infrastructures, par l’installation de superstructures et par l’utilisation d’équipements plus adaptés au mode d’exploitation de l’outil portuaire. 

Ainsi, en matière d’exploitation et de gestion portuaire, de nouvelles approches organisationnelles sont apparues, avec notamment l’instauration de politique de spécialisation des quais et d’industrialisation des périmètres portuaires. C’est le cas du port d’Anvers, qui a une vocation industrielle (plus grand complexe chimique et pétrochimique européen, premier port européen pour l’acier) ; du port de Dunkerque, avec ses entrepôts à température dirigée et les réserves foncières attenantes de Mardick (futur complexe logistique et portuaire) ; du port d’Abidjan, qui est versé dans la mise en valeur de quai fruitier destiné à l’exportation des produits exotiques ; du Port de Casablanca, qui est doté de quai spécialisé dans l’exportation des agrumes. 

Pour les autorités du port de Dakar, le centre d’intérêt de l’exploitation de l’outil portuaire porte sur la nouvelle approche managériale et stratégique, relatée dans (voir l’article paru dans Dakar actu du 10 Décembre 2013 : « l’approche managériale et stratégique du port autonome de Dakar, pour une entreprise plus performante et plus compétitive ». Il s’agit de faire du port, un havre à vocation polyvalente qui offre des services de qualité à forte valeur ajoutée. Dés lors, l’ambition des autorités portuaires est de s’inscrire dans une dynamique d’ériger le port de Dakar en pôle leader de la sous région ouest africaine dans les activités logistiques, orientée vers une politique portuaire structurante, innovante et axée sur la spécialisation des quais, dont le futur terminal ou quai fruitier. 

L’effectivité d’un terminal fruitier au port de Dakar entre droite ligne dans la vision prospective «Dakar, le Port de l’Excellence de la sous région ouest africaine, Horizon 2023 », initiée et déclinée en actes par la direction générale du Port, en vue de préserver nos produits agricoles et d’accroître nos exportations. Un tel projet ambitieux doit être soutenu par des politiques et des programmes porteurs, définis en amont et en aval de la chaine logistique des transports ou supply chain. 
Au sens large du terme, cette notion de « supply chain » englobe entre autres, les réalisations d’infrastructures et d’équipements portuaires (entrepôts à température dirigée, hangars,…), la gestion du foncier des terres arables, la déclinaison de politique étatique portée sur la chaine de production agricole et exprimée dans la gestion des transports fluviomaritimes liés au cabotage national et international. 

Dans la même veine, pour préserver nos ressources agricoles, il importe d’investir dans les méthodes et les techniques de conservation des produits agricoles (dans l’agro alimentaire, dans la maitrise des techniques de séchage des mangues,…). En effet, comme l’a évoqué le Directeur Général du PAD, le Docteur Cheikh Kanté, dans le magazine Intelligences de septembre 2014, « Nous avons un grand programme pour un terminal fruitier, car j’ai un pincement au cœur quand je vois des fruits qui se gâtent en Casamance et même ici à l’entrée de Dakar, vers Sébikhotane » 

Dès lors, il demeure imminent de booster au mieux nos produits agricoles destinés à l’exportation. La démarche consiste à développer les activités agricoles connexes à la chaine de production (manufactures de transformation des fruits, légumes,…). 
Par ailleurs, en quoi la construction d’un quai fruitier est-elle pertinente ? 
La réponse pourrait se trouver dans le tonnage global enregistré au port de Dakar, en matière d’exportation de produits agricoles. 

En effet, pour l’année 2013, le tonnage total de marchandises enregistré au port de Dakar est de 12 217 987 tonnes, dont 2 716 549 tonnes en export, soit 15% du volume global. Et, les tonnages relatifs à l’exportation de fruits et légumes sont de l’ordre de 24 649 tonnes (21 287 tonnes de fruits, 472 tonnes de conserves de fruits, 1 462 tonnes de légumes, 1287 tonnes de gomme arabique, 141 tonnes de noix de coco,…), soit moins de 1% du volume total des marchandises exportées. 

En outre, au vu des statistiques cités en supra ; le constat est que le volume des exportations en fruits et légumes enregistrés au Port de Dakar reste globalement faible. Toutefois, au regard des données des exportations totales de produits horticoles et fruitiers Origine Sénégal de l’année 2010 (50 000 tonnes) enregistrées à l’échelle nationale, les volumes de produits agricoles en transit au port peuvent être augmentés. « Sources données 2010/2011 : Postes de contrôle phytosanitaire de la DPV au port et à l’aéroport et poste de Rosso pour exportations vers la sous-région (Mauritanie) ». 

Ainsi, pour palier ce déficit d’exportations en fruits et en produits agricoles devant transiter au port, de véritables passerelles doivent être établies entre les pouvoirs publics et les autorités portuaires. Il s’agit de développer en amont des synergies, en termes de gestion rationnelle du foncier (préservation de terres arables), de concrétisation de projets agricoles porteurs dans les zones des Niayes (les mangues, les agrumes,..), dans la vallée du fleuve Sénégal ( la tomate, la patate douce,…), en Casamance ( les mangues, les produits agro forestiers, …,) au Sénégal oriental ( l’exportation du bambou et de ses dérivées , de la banane,..) et de réalisation de pistes de production. En aval, il importe de réaliser des infrastructures adaptées, à l’instar d’ un quai fruitier au port de Dakar. 

Concernant le post et le pré acheminement des produits exotiques par voie fluviale, il importe de rentabiliser nos ports secondaires (Saint Louis, Ziguinchor et Kaolack). A cet effet, il est à encourager la démarche managériale adoptée par le COSAMA dans l’acquisition de navires cargos neufs, adaptés au transport fluviomaritime de marchandises de masse. 

Toutefois, pour mettre en relief l’importance et la pertinence de ce « projet quai fruitier », une série de recommandations y devraient être greffées : 

1. La réalisation du projet du terminal fruitier doit bénéficier de l’appui institutionnel de l’état en matière de célérité des procédures administratives, car la concurrence entre les potentiels ports de la sous région reste criarde, 

2. Que les pouvoirs publics s’activent au mieux, pour une gestion efficiente du foncier dans la zone des Niayes englobant la zone du technopôle, le Diender, le Notto, …, le Gandiol et dans tous les potentiels pôles à vocation agricole, en termes de préservation de l’écosystème et de disponibilité de surfaces dédiées à l’arboriculture, 

3. Que les pouvoirs publics et les entités privées spécialisées dans le domaine de l’agro forestier, de l’agroalimentaire, … jouent le rôle de conseillers auprès des exploitants dans le sens de maximiser leurs rendements, tout en restant en conformité par rapport aux standards internationaux dans la production des fruits destinés à l’export, 

4. Que les pouvoirs publics élaborent des stratégies, visant les populations à s’intéresser et à s’impliquer dans « les politiques de la révolution verte », notamment pour une gestion judicieuse d’un cadre de vie soutenable qui se meut dans un environnement durable, 

5. Dans la perspective de la construction du port sec de Fatick, il urge que les autorités portuaires portent la réflexion sur les modalités de pouvoir bénéficier d’éventuels dividendes relatifs au crédit carbone, en encourageant le reboisement des périmètres jouxtant la dite infrastructure, (voir le processus des conférences relatives à la préservation de l’écosystème de Rio 1992 à Rio 2012) 

6. Aussi, le focus doit être mis : 
• dans la production intensive de mangues (prévisions 100 000 tonnes à l’horizon 2017), comme indiqué dans le Programme d’Accélération de la Cadence de l’Agriculture Sénégalaise (PRACAS). Cependant, il importe de corriger le gap des nos exportations ; car, seules 11 000 tonnes de mangues sont exportées en 2013. 
• dans la production de banane Bio qui représente une fenêtre très prometteuse dans la zone Sud et de l’est du pays 
• dans la Transformation agro-alimentaire 
• dans la transformation de fruits et légumes : jus, fruits séchés, farines 
• dans la synergie à développer entre le PAD et l’Agence Sénégalaise de Promotion des Exportations (ASEPEX) en matière de promotion du quai fruitier et des produits agricoles destinés à l’exportation 

7. Il faut développer le cabotage international aux fins de rendre les échanges des produits exotiques plus reluisants dans l’espace de l’Union des Etats Economiques Ouest Africain (UEMOA), 

8. De procéder à la redynamisation de l’Alliance Bordeless, une entité sous régionale orientée dans la facilitation et la vulgarisation de nos produits locaux pour fructifier les échanges commerciaux entre les pays de la Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), 

9. Pour la prochaine mise en exploitation des deux navires (AGUENE et DIAMBONE) par le Consorsium Sénégalais des Activités Maritimes (COSAMA), des démarches pourraient être enclenchées afin que l’entité puisse bénéficier du programme Marco Polo. C’est un programme de financement de l’Union Européenne pour les projets qui aident à faire passer le transport de fret de la route à la mer, au rail et aux fleuves. Cela signifie moins de camions sur la route, moins de congestion, moins de pollution et un transport plus fiable et efficace des marchandises, 

10. Que les pouvoirs publics se focalisent sur la formation et la mise à niveau des personnes désignées afin qu’elles soient mieux outillées à défendre les intérêts de nos pays dans les négociations internationales, notamment les Accords de Partenariat Economique (APE), 

11. L’urgence pour l’état de mener la réflexion sur la pertinence de la relance du projet du canal du CAYOR, en termes d’extension de périmètres agricoles et de développement de l’arboriculture destinée à l’exportation. Ce canal permettra d’irriguer 8 500 ha, de créer 20 000 emplois agricoles et contribuera au doublement de la production de fruits et légumes (agrumes, mangues, pomme de terre, oignons, tomates…). 
In fine, la pertinence de la construction du quai fruitier au port de Dakar résiderait fondamentalement dans le sens d’équilibrer notre balance commerciale, de booster notre production agricole, de rendre notre outil portuaire plus compétitif et de faire de Dakar une plateforme propice à l’environnement des affaires. 

Commandant Amine TAMBA 
Lundi 22 Septembre 2014




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