Laser du lundi : Grand besoin d’affinement du verbe chez Macky Sall (Par Babacar Justin Ndiaye)


Laser du lundi : Grand besoin d’affinement du verbe chez Macky Sall (Par Babacar Justin Ndiaye)

Le Président Macky Sall a une appétence particulière pour le discours ; notamment dans sa version orale et…improvisée. Ce n’est point un défaut chez l’homme politique. Bien au contraire. Le verbe (magique) est un levier voire une arme capable de redresser les situations qui sont, de prime abord, les plus politiquement compromises. Mais il s’agit, au sommet de l’Etat – c’est-à-dire au faîte des responsabilités – d’un art qui requiert du talent oratoire, des précautions langagières et, surtout, des provisions idéelles. Chez l’homme d’Etat et d’autorité, la prolifération des phrases est contre-productive ; en revanche, le déploiement des idées nourries et laconiques procure une plus-value précieuse et…payante. Un constat réel que la gouvernance actuelle – via une actualité récente –  a mis en exergue.

 

En mars 2013, l’incendie du dortoir des talibés de la Médina (toute une ribambelle d’enfants calcinés) a été le premier bac à incubation d’un discours mal affiné du Président de la république. Ce jour-là, Macky Sall a (verbalement) décrété à brûle-pourpoint : « L’interdiction de la mendicité dans les rues ». Une décision mort-née qui a de facto amorcé l’érosion de la suprême autorité du chef de l’Etat. Pourtant le film du drame ne mettait le Président ni en première ligne ni sous pression. Précédé sur les lieux de la tragédie par le ministre de l’Intérieur Mbaye Ndiaye et le Premier ministre Abdoul Mbaye, le chef de l’Etat avait le doux choix entre la parole (argent) et le silence (or). La seconde option (le silence) lui conférant l’avantageuse faculté  de prendre ultérieurement l’ultime décision qui parachève de façon irréversible les ébauches de solution envisagées par ses subordonnés de haut rang.

 

Le deuxième propos (antérieur ou postérieur au feu létal de la Médina ?) renvoie au profil des marabouts. On prête au Président Sall, la petite phrase que voici : « Les marabouts sont des citoyens ordinaires ». L’assertion est politiquement bête ; parce que fertile en retours de flamme ou de manivelle contre son auteur. La preuve étant son exploitation perpétuelle contre le leader de l’APR. Au demeurant, lorsque l’opposant ou le banni Macky Sall (Président en sursis de l’Assemblée nationale) était confronté aux plans de liquidation de Maitre Wade et de son ministre de l’Intérieur, Cheikh Tidiane Sy, c’est auprès du Khalife Sérigne Bara Mbacké qu’il trouva le paratonnerre efficace et le bouclier cuirassé. Juridiquement, un marabout est un citoyen ordinaire, en ce sens qu’il possède un seul bulletin de vote (un homme, une voix) au même titre que le loubard de banlieue. Mais historiquement, les chefs religieux ont été des Sénégalais extraordinaires, puisque sollicités décisivement dans des circonstances où le destin du pays a vacillé. Pierre Massmer (dernier Gouverneur français de l’AOF) les  mirent à contribution lors du référendum gaullien de 1958 ; tandis que Léopold Sédar Senghor obtint du Vénéré Sérigne Falilou Mbacké, un appel patriotique, mobilisateur et salvateur, pour faire face aux menaces de Modibo Keita qui ponctuèrent l’éclatement de la Fédération du Mali, en 1960.

 

La troisième sortie mal affinée de Macky Sall est relative au sort du Guinéen malade et migrant avec le virus Ebola. Bouleversé – à juste raison – par l’immense  tort soudainement causé à son pays, le Président de tous les Sénégalais a réagi à l’instar de tous les Sénégalais. Erreur. Car le chef de l’Etat n’est pas un Sénégalais ordinaire. A l‘occasion de la dernière cérémonie mensuelle de levée des couleurs, le Président Sall a dit : « Si ce jeune n’était pas dans cet état de malade, il serait conduit devant nos juridictions ». Moins de deux semaines après, le numéro un sénégalais rectifie le tir dans l’hebdomadaire français L’EPRESS : « En concertation avec les autorités de Conakry, nous étudions les voies et moyens d’un retour correct. Cela posé, il ne sera pas rapatrié dans l’immédiat ». (Voir L’AS du 13 septembre 2014). Entre les deux déclarations fort différentes, Macky Sall a-t-il relu  Bismarck et retenu la leçon du célèbre chancelier prussien : « Un pays fait son histoire mais subit sa géographie ». Diplomatiquement, le gouvernement peut, en toute souveraineté, privilégier un axe Dakar-Vienne ; mais éternellement le Sénégal sera soudé à la Guinée-Conakry qui alimente le gigantesque lac de retenue du barrage de Manantali. Et qui – dans un proche passé – a donné à l’Université de Dakar, l’éminent historien Boubacar Barry, réfugié puis retraité sur le sol sénégalais.

 

Le dernier exemple est le segment de discours (hors texte et oralement au rabais) consacré à la revue de presse audiovisuelle et à l’émission « Wakh sa khalat » directement ouverte sur les auditeurs qui l’animent. Non seulement le verbe présidentiel est mal aiguillonné ; mais il s’est fixé sur un cap thématique au-dessus duquel les chefs d’Etat planent superbement. Un parfum d’obsession (présidentielle) embaume d’ailleurs les narines. Quand on est élu à 65% ; quand on a enterré électoralement Abdoulaye Wade (avec sa générosité et son bilan) doit-on redouter la revue de presse claironnante et débordante du sieur Ahmed Aidara ? Un régime qui carbure se moque normalement des observateurs qui cancanent. Car, on ne peut rien réussir de grand pour son pays, sans blâme dans l’opinion. En revanche, un Exécutif qui vante théoriquement les vertus de l’Emergence sans vaincre les incertitudes énergétiques et les aléas pluviométriques, est forcément en posture tremblante devant la presse.

 

Bref, le verbe et le silence sont deux armes, d’égale valeur, entre les mains d’hommes politiques qui ont le génie et/ou le talent de les utiliser. Tous les deux leviers peuvent être mis au service de l’Etat. Sans remonter jusqu’à Lénine, on peut lister des magiciens du verbe qui ont gouverné intensément avec et par le discours. Sans son verbe – tantôt flamboyant, tantôt tonnant et toujours captivant – l’orateur hors du commun Sékou Touré n’aurait jamais enjambé la cascade d’écueils placés sur sa route. Sans sa capacité à malaxer l’habileté et l’ambiguité langagières, le Général De Gaulle n’aurait pas berné les Pieds-Noirs et hâté la fin de la guerre d’Algérie. Qui ne se souvient pas encore de son fameux et trompeur : « Je vous ai compris » ?

 

Face au verbe efficace, il y a le silence indéchiffrable qui fortifie l’autorité en corsant le mystère. Il est l’apanage des chefs d’Etat conscients de leurs limites oratoires. C’est l’Ecole du laconisme et de la retenue à laquelle appartiennent les deux Paul (Kagamé et Biya) et autre Blaise Compaoré. Macky Sall y trouverait sa place et son compte. Sans complexe. Car la magie du verbe est sans rapport avec les palmes académiques ou les diplômes universitaires. Sékou Touré était un syndicaliste, le Général De Gaulle était un Saint-Cyrien et non un Normalien comme Sartre. L’orateur Fidel Castro est quand même un avocat. Toutefois, le Cubain n’a jamais battu le record du Guinéen Sékou Touré qui a parlé (sans notes ni pause) durant 7 heures d’horloge lors d’un séminaire du PDG tenu au Centre Agronomique de Foulaya, non loin de Kindia.

 
Lundi 15 Septembre 2014
Dakar actu




1.Posté par jiggy le 15/09/2014 02:24
depuis quand ce hableur de justin ndiaye s'est-il auto-proclame professeur de communication ou d'expression orale. justin, macky sall, de par sa formation ou amoins d'une reelle aptitude a l'oralite, ne pouvait pas etre un bon debatteur ou tout simplement un bon communicateur. cependant ce que j'aurais aime de sa part c'est qu'il laissasse a Eva Marie Coll Seck Ministre de la Sante le soin de mieux parler a la presse du probleme du jeune Guineen atteint d'Ebola car il faut que chaque ministere assume son role pleinement ce que du reste, Eva Seck a bien fait malgre quelques couacs. Un chef ne doit pas beaucoup parler a moins d'etre un orateur hors paire de la trempe de Obama. ou bien a chaque fois qu'il s'adresse a la nation le peuple doit y retenir quelque chose d'important. justin arretes de nous tympaniser a vec tes propos qui frisent le ridicule. par la meme occasion pourquoi ne pas lui demander encore de nommer Viviane Bompassy Premier Ministre quand on sait Dionne, le menteur, a peur d'ouvrir sa bouche. Macky Sall et son Pm de Dionne devraient prendre des cours d'expression orale aupres de Mr Justin Blabla Ndiaye, eminent professeur d'expression orale. lool

2.Posté par Ibras le 15/09/2014 04:09
Doyen merci pour les conseils. Macky est un homme direct mais très réfléchi.nous qui le connaissons ,on sait qu'il ne dit jamais une chose par hasard. C est ce discours masla ou mensonge qu il ne veut pas habituer les sénégalais.car dans son esprit,il a toujours derrière lui cette volonté de rupture promise dans son programme.mais comme disait le romancier " entre l espoir et la réalité il y a tout un océan".

3.Posté par Quelqu''''un qui vous lit souvent! le 15/09/2014 07:17
j'aime bien vos analyses souvent très fouillées et qui nous changent sensiblement des textes laconiques et sans intérêt de pseudos journalistes qui cherche à faire le buzz plutôt qu'à informer.

Puisse le Président faire une lecture objective de ce texte, ses conseillers aussi devraient en prendre acte. la parole de l'autorité doit être une et irrévocable, sans subjectivité ni sentimentalisme; elle ne doit pas être dictée par l'émotion, faute de quoi elle en deviendrait presque banale et saperait de fait cette autorité.
Bref c'est une bonne analyse de la communication de La Présidence qui montre de nombreuses failles!!!!

par rapport à votre style, je voudrais juste vous suggérer d'essayer de réduire les parenthèses et tirets, ça gâche la lecture et semble montrer que vous n’accordez que peu d'importance aux éléments "encadrés". Si les exemples et rappels que vous citez ne sont pas décisifs pour la bonne compréhension de votre texte ne les mettez pas.
Si au contraire vous jugez qu'ils sont indispensables, essayez de les intégrer en utilisant des points virgules ou des renvois en bas de page. Cela a l'avantage de présenter un texte fluide et aéré.

De même, comme votre sujet c'est la communication du président, votre dernière note dans la conclusion devrait y renvoyer, en essayant de dégager une approche communicationnelle, même si j'ose imaginer que dans votre logique, elle est sous entendue dans les exemples que vous avez cités.

4.Posté par zzzzzz le 15/09/2014 07:35
Le Logos? Macky ne connait pas. N'oublions pas que c'est, dit-on, un géologue. Il devrait conNaitre es profondeurs , mais on remarque qu'il est terre à terre. Il n'a trouvé sous terre que sa femme... c'est une victoire puisque c'est elle qui gouverne.
Vieux père... très bon texte... il est profond, contrairement au président de la république très très démocratique du SUNUGAL

5.Posté par Orion le 15/09/2014 11:17
On ne dit pas 7 heures d'horloge, M. Ndiaye, mais 7 tours d'horloge. C'est élémentaire.

6.Posté par Babacar Justin Ndiaye le 15/09/2014 15:08
Archifaux ! Monsieur ORION le correcteur. On dit bien : "Parler durant 7 heurs d'horloge". Consultez le dictionnaire (le Professeur des Professeurs) LAROUSSE ILLUSTRE 2005 100e ÉDITION page 552. .Des exemples y sont donnés.

7.Posté par idrissa wade le 15/09/2014 15:43
Monsieur NDIAYE,
C'est pertinent comme analyse. Monsieur Maky SALL n'a pas le niveau d'un présidentiable au Sénégal. je ne parle pas de diplôme encore moins de parcours. je parle de compétences et de capacités à gérer le pays dans toute son étendue, dans sous ses segments, dans tous ses contours.

C'est quelqu'un qui n'est pas brillant et qui a toujours été derrière les combines de WADE (2002-2008) afin de se trouver une place au PDS. Il a accepté en durant cette période l'inacceptable; c'est la raison pour laquelle , il a fini numéro 2 et ce s'en ai suivi est connu de tous.
Dites moi une prouesse de son Excellence Maky SALL durant sa vie scolaire et professionnelle? aucune.....

8.Posté par Mamadou le 15/09/2014 17:00
Critiquer un président de la république c'est comme quelqu'un qui s'assoit confortablement dans son salon pour regarder un match de foot,dans ton petit écran dont les le terrain que tu vois dans ton écran est petit dans tes yeux,pendant ce temps les joueurs mouillent leur maillots sous le soleil très chaud,dont le terrain est très vaste,et celui qui est dans son salon peut tout dire car tout lui semble facile,car il ne voit jamais ce qui se passe dans le terrain.Verbe critiquer est très facile mais tout le monde sait Mackky est sur la bonne voie pour émerger le pays,deja il commence à réussir de lutter contre la corruption ,enrichissement illicite et l'impunité

9.Posté par Xeme le 15/09/2014 18:00
Avec Macky la différence se trouve dans le fait qu'il n'est ni à classer dans le lot des maîtrisant du verbe, ni dans le lot des orfèvres du silence. Macky se trouve dans une position intermédiaire. Ou, plutôt, il est poussé dans une position intermédiaire. Tous les conseillers en communication de Macky connaissent bien ses lacunes. Mais tous ont pris pour option d'avoir sous leur coupe réglée la majorité de la presse pour justement affiner le verbe de Macky. Ainsi Macky ne s'est jamais senti obligé d'affiner son verbe au point de penser réfléchir avant de parler. Il a toujours miser sur cette presse pour modifier, rectifier et embellir tout ce qu'il dira. Et ils ne quitteront pas de sitôt cette option pour la simple et unique raison qu'elle a eu un premier résultat: Macky est arrivé au pouvoir de cette façon.
Mais qui règne par le verbe grossier poli par la presse périra par le verbe grossier poli par la presse.

10.Posté par boubacar djigo le 15/09/2014 19:00
les discours d macky nou fai peur

11.Posté par Atpico le 15/09/2014 22:15
Je vote pour 7 tours d'horloge. Sinon Julien s'amuse finement en faisant mine de n'étudier que le verbe de Macky président, comme s'il s'agissait de l'aider à trouver le bon tempo et la bonne diction Julien réussit, en fait, à mettre en évidence chez Macky une carence qui n'est pas que de parole mais de langage, donc de pensée et de vision. ON peut être un mauvaIs orateur , ce qu'est Macky, on peut tout comme lui, manquer de charisme, mais cela n'empêche pas de savoir ce que l'on dit , à qui on le dit , pourquoi on le dit et que ce que l'on dit engage la nation. Ce que Macky ne peut réussir à faire, car Lui, quand il parle, cherche toujours spontanément la ligne qui lui parait devoir plaire au plus grand nombre, à la foule d'électeurs potentiels, fussent - ils paniqués et xénophobes comme dans le cas de l'étudiant guinéen malade;, . L'électoralime obsessionnel lui tient lieu d'éthique, de boussole et de visionce le fait tomber immanquablement dans la démagogie qu'il tente ensuite de corriger sous la pression de ses conseillers et des insatnces étrangères. Macky donc n'est ni un orateur, ni un penseur, ni un homme d'état, c'est simplement un fils de Wade, relativement mediocre, arrivé au pouvoir surtout par rejet de Wade et défaillance de ses adversaires, ce qu'il sait ,ce qu'il sent et ce qui le fait vivre dans la peur d'être isolé et déboulonné avant l'heure. Un Effet de la culpabilité d'un parricide en politique peut être ....

12.Posté par NGOR le 07/10/2014 15:16
UN GRAND MERCI PROFESSEUR
Nous vous remercions pour votre courage et votre intelligence. Votre analyse est pertinente et juste. N'écoutez pas ces gens qui passent tout leur temps sur le net à vous répondre pour des récompenses qui ne leur servent à rien. Mais faites vos analyses pour les étudiants et les sénégalais lambda qui veulent apprendre et qui veulent savoir la vérité sur le fonctionnement de notre pays. Ce régime a fait beaucoup de tapage sur la théorie. Maintenant, il s'agit de l'application, il tâtonne en se comparant à l'ancien régime. Ils seront déçus en 2017. " QUI VIVRA VERRA "



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