Laissé à lui-même : Le monument de Wade veut une Renaissance

Abandonné par l’actuel régime, le monument de la Renaissance africaine souffre aujourd’hui d’énormes maux. Les restaurants, l’hôtel, l’espace pour enfants, entre autres, tardent à être fonctionnels. Mais, il y a également un manque de communication qui ne participerait pas à la visibilité de ce patrimoine culturel. Et l’administrateur de cet édifice de penser qu’ils sont «dans une situation de non régime».


Laissé à lui-même : Le monument de Wade veut une Renaissance
Construit par l’ancien Président sénégalais Abdoulaye Wade en 2010, le Monument de la Re­naissance africaine ne se fait plus sentir depuis la chute du leader du Parti démocratique sénégalais (Pds). Son successeur, Macky Sall, semble vouloir faire oublier l’existence de ce patrimoine culturel africain. Car depuis son arrivée au pouvoir, en mars 2012, aucun acte n’a été posé pour rendre fonctionnel ce monument, qui a été réalisé avec une partie des ressources nationales.
L’administrateur dudit monument, Abdel Kader Pierre Fall, explique : «Actuellement, nous sommes dans une situation de non régime ; c’est-à-dire que le monument ne fait pas de promotion, ne fait rien pour attirer les clients. Le monument devrait pouvoir être dans un niveau de fonctionnement qui permettrait d’attirer beaucoup plus de monde. Mais puisqu’on n’a pas encore étudié le plan d’aménagement général, c’est-à-dire qu’il y a encore beaucoup de choses à construire au niveau du monument comme : les restaurants, l’hôtel, l’aire de jeux pour enfants ainsi de suite».

«On pourrait aller vers des privés qui pourraient revenir prendre la gestion»
Ce manque de communication mais aussi d’engagement des nouvelles autorités pour ce monument ne pousse pas certains passionnés à venir visiter. M. Abdel Kader Pierre Fall nuancera toutefois : «Mais disons quand même qu’il y a un nombre minimum qui vient visiter le monument. Il y a, en premier, les Sénégalais qui viennent en nombre, ensuite nous recevons la visite de certains étrangers comme les Américains qui viennent quand ils sont en visite au Sénégal. Et durant l’année scolaire, nous recevons généralement certains élèves pour les études pédagogiques que nous leur faisons. De façon générale, nous di­sons que le monument fonctionne, mais il ne fonctionne pas à plein régime». «L’infrastructure de­vrait attirer beaucoup plus de monde. On sait qu’on a les moyens de faire une politique de promotion de publicité, sur le plan national et international. Donc, nous allons fonctionner à un niveau tel que le monument va être prêt pour accueillir beaucoup de monde ; mais les conditions ne sont pas encore réunies. Nous travaillons étroitement avec le ministère de la Culture ; nous sommes en train de réfléchir sur beaucoup de schémas, des schémas qui concernent l’exploitation. On pourrait aller, peut-être, vers des privés qui pourraient revenir prendre la gestion du monument. On pourrait aller vers la création des sociétés avec des pouvoirs publics et d’autres actionnaires», fait encore savoir l’administrateur du Mo­nument de la Renaissance africaine.
Aucun «objectif» n’aurait été assigné par l’Etat à travers son ministre de la Culture à l’administrateur du monument, comme on a l’habitude de le voir dans les agences. Ce monument est un complexe touristique et culturel. Touristique parce qu’il a des valeurs au plan touristique, du fait qu’il y a des touristes qui y viennent et, culturel, parce qu’il y a des valeurs qui se dégagent du point de vue culturel. Mais là, les infrastructures n’ont pas encore été réalisées : les infrastructures complémentaires ou satellitaires, comme le pense M. Fall. Et pour ce dernier, «les ré­flexions sont, en ce moment, en cours avec le ministère et d’ici peu de temps ça pourrait être concrétisé.»
Historique : Un ouvrage à polémique
Le Monument de la Renaissance africaine a fait l’objet de nombreuses critiques et a concentré les oppositions au Président Wade. La polémique concerne notamment son coût jugé pharaonique - les travaux ont débuté en 2002, a coûté entre 9 et 15 milliards de francs Cfa (15 à 23 millions d’euros), sans compter le prix du terrain et les aménagements - dans un contexte de crise éco­nomique du pays, un financement jugé par l’opposition peu transparent et l’annonce publique que le chef de l’État se réserverait, au titre de la propriété intellectuelle, 35 % des recettes engendrées par la visite du monument et la fréquentation des infrastructures attenantes et que son fils Karim Wade présiderait le conseil d’administration de la fondation chargée de la gestion. Il est également critiqué que sa construction ait été menée par la dictature nord-coréenne. Peu avant l’inauguration, des centaines de personnes avaient manifesté dans les rues de Dakar pour demander la démission de Abdoulaye Wade pour ces raisons.
Alors que certains jugent aussi le style du monument trop stalinien ou y voient des symboles maçonniques, d’autres le trouvent trop païen et indécent (le pagne porté par la femme fut pourtant rallongé par rapport au projet initial) dans un pays musulman à 95 %. Le 11 décembre 2009, dans un sermon unitaire, une trentaine d’imams de Dakar et de sa banlieue ont prêché contre le monument comme contraire à l’islam et ont donné une conférence de presse pour expliquer leur position.
En leur répondant, le Président Wade a provoqué un incident avec la communauté chrétienne du pays et quelques troubles (violents affrontement entre jeunes chrétiens et forces de l’ordre) en demandant aux imams pourquoi ils ne s’offusquaient pas des statues de Jésus présentes dans les églises, «Des gens adorent le Christ qui n’est pas Dieu», propos dont il s’est par la suite excusé.
Des féministes ont également critiqué la position en retrait de la femme dans la sculpture.

35 % des droits d’auteur détenus par Wade
Le Monument de la Renaissance africaine est un groupe monumental de 52 mètres en bronze et cuivre à Ouakam, une commune d’arrondissement de Dakar, sur l’une des deux collines volcaniques coniques qui surplombent la capitale sénégalaise, les Mamelles, la plus haute portant déjà le phare des Mamelles.
Le monument représente un couple et son enfant, dressés vers le ciel. Il est officiellement inauguré le 3 avril 2010 lors des cérémonies du cinquantenaire de l’indépendance du Sénégal.
L’ouvrage faisait partie des grands projets du Président Abdoulaye Wade qui le veut «dignité du continent». Il s’agit de montrer au travers d’une famille dressée vers le ciel, l’homme portant son enfant sur son biceps et tenant sa femme par la taille, «une Afrique sortant des entrailles de la terre, quittant l’obscurantisme pour aller vers la lumière». Le monument figure en effet une famille africaine résolument tournée vers le Nord-Ouest.
La statue aurait été conçue par le sculpteur d’origine roumaine Virgil Magherusan. Le projet du monument avait été confié à l’architecte sénégalais Pierre Goudiaby Atepa, auteur – notamment – de la Porte du Troisième millénaire qui surplombe la route de la Corniche. L’œuvre a été «dessinée» par le Président Wade qui en détient 35 % des droits d’auteur.
Sa maîtrise d’œuvre est assurée par la société nord-coréenne Man­sudae Overseas Project Group of Companies. Le paiement s’est effectué en nature, avec 30 à 40 hectares de terrain qui seront mis en valeur par l’homme d’affaires sénégalais Mbackyou Faye.
La durée de vie du monument serait de 1 200 ans. L’inauguration du monument initialement prévue le 12 décembre 2009 avait été reportée au 4 avril 2010 afin de «correspondre au 50e anniversaire de l’indépendance de nombreux États afri­cains», selon un communiqué officiel. Le 4 avril est en effet le jour de la fête nationale au Sénégal. Le monument a été inaugurée par le Président Wade en présence d’une vingtaine de chefs d’État africains et du numéro deux d’alors du régime nord-coréen.
Le projet prévoyait initialement que la structure abrite un restaurant panoramique accessible par un ascenseur, mais il n’a pas vu le jour.
Source : Internet
Dimanche 12 Janvier 2014




Dans la même rubrique :