La troupe du Tambour-major orpheline : Qui pour porter le flambeau du maître ?

On ne peut tourner la page du Tambour-major Doudou Ndiaye Rose sans se demander qui prendra la relève ? Cette question devient impérative et cruciale au lendemain de son inhumation. Beaucoup parmi ses enfants ont été formés à son art. Mais qui jouera le rôle de fédérateur, au point de perpétuer son legs ?


La troupe du Tambour-major orpheline : Qui pour porter le flambeau du maître ?
Doudou Ndiaye Rose a été inhumé hier au cimetière musulman de Yoff. Il a été porté en terre par une foule nombreuse. Mais une question taraude l’esprit après le brutal décès de ce percussionniste talentueux. Qui pour conduire sa troupe ? Qui dirigera désormais les tambours ? Le Dr Massamba Guèye, Conseiller culturel du président de la République, comme beaucoup d’acteurs culturels, se pose ces questions. Interpellé peu après l’inhumation, M. Guèye affirme : «J’ai une angoisse par rapport à son héritage». «Je sais qu’il a laissé Thiouna Ndiaye qui dirige le Sino Mew (l’ancien ballet de Sorano). Je sais qu’il a laissé Moustapha qui administre cette tournée. Je connais son côté professionnel. Je sais qu’il a laissé Arouna et les autres», poursuit-il avant de s’interroger tout de même et fortement : «Mais qui après lui, pour jouer son rôle fédérateur ?»

C’est justement là la grosse interrogation. Une interrogation dont la réponse ne pourra être connue que dans les années à venir. Surtout que, argumente Massamba Guèye, le défunt avait cette grande qualité de fédérateur au sein de sa troupe. C’est lui qui, reconnaissent ses proches, par son aura et son talent menait l’équipe de main de maître. Le Dr Guèye en sait quelque chose. «Quand il y avait 100 griots en scène, il n’y avait que 4 ou 5 qui étaient ses enfants. Le reste était d’autres familles. Et c’est lui, Doudou Ndiaye Rose, qui a souvent évité l’éclatement et les conflits. Qui après lui pour prendre cet héritage-là, en tant que lien social et lien professionnel ?», insiste le conteur, par ailleurs manager général de la Maison de l’oralité. L’on sait que le «vieux» n’a pas été longuement malade et que sa mort a été soudaine et inattendue. C’est ce qui pousse surtout les uns et les autres à s’inquiéter sur l’avenir de sa troupe.
A-t-il véritablement pu organiser les choses pour que l’union et l’entente restent de mise comme cela a toujours été le cas de son vivant ? Autrement dit, cette angoisse du professeur, conteur, écrivain et non moins dramaturge qui a longtemps côtoyé l’illustre disparu, voudrait-elle signifier que ses enfants, sa famille, risquent de ne pas pouvoir gérer l’héritage qu’il laisse ? «Non !» répond Massamba Guèye, persuadé qu’ils seront à la hauteur des attentes.

Thiouna, Moustapha et Arona Ndiaye, le trio d’avenir

«Sa famille est capable de gérer l’héritage. Mais qui va être devant ? Est-ce que les autres vont accepter qu’il soit devant ? Je l’espère et je le souhaite. Ils ont la chance d’être extrêmement disciplinés. Je connais profondément Thiouna Ndiaye qui a les traits de caractère de son père. Je connais Moustapha Ndiaye qui a l’engagement de son père. Je connais Arouna Ndiaye qui a la pédagogie de son père. Avec les autres, ils doivent, ils ont l’obligation d’être le trio qui va incarner toutes les valeurs de Doudou Ndiaye Rose», précise-t-il.
Il faut également souligner qu’en plus de son angoisse, le Dr Guèye a l’ambition de réparer un manquement. Sinon d’honorer à sa façon la mémoire de Doudou Ndiaye Rose. «Aujourd’hui, je suis angoissé et j’ai un peu honte de n’avoir pas pu l’aider à faire ce qu’il avait envie de faire pour que son institut soit en place. Mais je remercie le Bon Dieu d’avoir créé un espace qui me permettra de lui rendre hommage. Car je pense que le dernier espace qui reste à la Maison de l’oralité va porter son nom», informe l’ancien directeur du théâtre Daniel Sorano.

Le Quotidien
Vendredi 21 Août 2015




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